Pénurie de dentistes en vue
Magellan Dionne a opéré un cabinet de dentiste à La Pocatière pendant 31 ans. Il s'est retiré en mars 2009 pour des raisons de santé. Son local, sur la 4e Avenue, est toujours inoccupé. M. Dionne n'a trouvé aucun acheteur pour prendre la relève. « Les nouveaux dentistes ne veulent pas venir travailler en région », dit-il.
Le Dr Denis Roy est secrétaire permanent de la Société dentaire Nord-Sud qui couvre l'Est-du-Québec et la Côte-Nord. Il estime à 4 000 le nombre de dentistes actifs au Québec. De ce nombre, 235 seulement pratiquent sur le territoire couvert par son organisme. « Plusieurs dentistes vont prendre leur retraite au cours des cinq prochaines années dans les régions, la situation risque de devenir critique », dit-il.
L'un des problèmes que rencontre la profession est que les nouveaux dentistes souhaitent demeurer à Québec ou Montréal et travailler à pourcentage dans un cabinet déjà en place au lieu de démarrer leur propre bureau, explique le Dr Roy en entrevue téléphonique. Il a envoyé 150 lettres à de jeunes dentistes pour les inviter à s'établir en région. « Ils n'ont manifesté aucun intérêt », dit-il.
Le Dr Magellan Dionne n'a toujours pas trouvé d'acheteur pour son cabinet de dentiste
Photo: Maurice Gagnon
Le ratio augmente
Lorsque le Dr Dionne a quitté la profession, 2 000 patients ont dû se trouver un nouveau dentiste. Si, dans Kamouraska et L'Islet, cinq dentistes prennent leur retraite d'ici cinq ans, ce sont 10 000 nouveaux patients qui devront opter pour un nouveau professionnel. « Les dentistes en place seront surchargés et les délais d'attente vont augmenter », prédit Magellan Dionne.
Trois universités forment des dentistes : McGill, l'Université de Montréal et l'Université Laval. Cette dernière devait fournir les régions à l'est de la Capitale. Les choses ont changé. Sur les gradués de 2010, deux seulement sont pressentis pour s'établir en région, selon le Dr Dionne.
Présidente de l'Ordre des dentistes du Québec, Diane Legault évalue que les universités produisent environ 145 nouveaux dentistes par année, dont 125 qui débutent immédiatement. Ils commencent par travailler à pourcentage avant d'ouvrir leur cabinet, dit-elle. Ce qu'il faut, croit Mme Legault, c'est de les inciter à sortir de la ville, notamment en leur proposant des stages en région durant leur dernière année d'études.
Une stratégie
« On [l'Ordre des dentistes] travaille avec nos partenaires pour mettre en place une stratégie pour faire face au problème lorsqu'il va se présenter », dit Mme Legault. Les partenaires, ce sont les facultés universitaires, les syndicats professionnels et les sociétés dentaires.
Déjà, certaines pistes de solution sont mises de l'avant. Le Dr Magellan Dionne propose, par exemple, que les facultés universitaires tiennent compte de la provenance de leurs candidats lorsque vient le temps de les admettre.
Les dentistes n'ont pas comme les médecins des plans régionaux d'effectifs médicaux qui assurent une présence en région. Toutefois, la présidente de l'Ordre des dentistes du Québec, Diane Legault, propose que les dentistes, lorsqu'ils choisissent de s'établir en région, reçoivent du gouvernement certains avantages pécuniaires sur les services couverts par l'Assurance maladie, notamment ceux dispensés aux enfants.
Mme Legault croit qu'il faut faire la promotion des régions auprès des finissants, « mettre en valeur le fait de travailler en région. » Une sorte de « grande séduction » destinée à ces nouveaux dentistes.
Même si la situation s'annonce critique, surtout dans l'Est et dans le Nord du Québec, Diane Legault fait confiance à la relève. « On sent une sensibilité des jeunes par rapport à leur mission sociale », dit-elle.
Reste à voir comment elle se traduira dans les prochaines années. Une chose est sûre, la présidente de l'Ordre des dentistes est consciente qu'il ne faut pas attendre d'être devant le fait accompli et commencer dès maintenant à mettre en place une stratégie.
Collaboration : Maurice Gagnon, leplacoteux.com
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