Yvan Charron: le calme après la tempête
L’Isle-Verte - L’année 2014 a été celle des grands bouleversements dans la vie de l’ancien directeur incendie de L’Isle-Verte, Yvan Charron. Ce dernier a accepté de revenir sur les évènements qui ont chambardé sa vie au cours des 20 derniers mois. Rencontre avec un homme en paix.
Pompier pendant 30 ans, directeur de la caserne 20 de L’Isle-Verte, fermier de père en fils, employé municipal, Yvan Charron a tourné le dos à cette vie au lendemain de deux tsunamis médiatiques qui auraient bien pu le noyer.
Rencontré sur sa terre, l’homme qui cultive aujourd’hui courges et citrouilles se dit serein. «Je vais bien, je suis entouré des miens, je travaille pour des gens qui croient en moi, et j’ai du temps pour profiter de la vie, pour passer du temps avec ma famille.»
Sur cette nuit tragique, il le dit sans ambages : «J’ai fait ce que j’ai pu. Comme mes hommes, j’ai tout donné. Le commissaire l’a souligné, cette nuit-là, tous les mauvais facteurs étaient réunis, et nous y avons fait face avec le meilleur de nous-mêmes.»
RÉSIDENCE DU HAVRE
Dans la foulée de l’incendie du 23 janvier 2014 où 32 personnes ont péri à la Résidence du Havre, dans une vaine tentative de lui permettre de retrouver son souffle, Yvan Charron s’est départi de son bétail et de son quota. Le chef incendie venait d’être happé dans un véritable tourbillon qui en aurait laissé plus d’un groggy. Il s’est accroché... c’est sa nature.
En novembre a suivi la Commission d’enquête présidée par le commissaire Cyril Delage. Le repos et la quiétude allaient devoir attendre. Le nom du chef incendie de L’Isle-Verte s’est retrouvé au cœur de nombreux reportages, locaux comme nationaux. Ses gestes tout autant que ses paroles ont été analysés, scrutés à la loupe. On a remis en question ses aptitudes à diriger, lui, un meneur d’hommes.
UNE FORCE DE LA NATURE
Une visibilité dont le principal intéressé se serait bien passé. «C’était difficile d’entendre certains journalistes faire des résumés qui ne collaient pas avec ce que moi et d’autres collègues avions entendu lors de la Commission. Je pouvais le prendre, vivre avec ça, mais de voir ma femme en larmes, tu n’as pas idée de la colère que ça soulève», raconte-t-il.
La poussière est retombée. Les caméras ont disparu, les micros se sont baissés. Le jugement lapidaire du commissaire Delage aurait pu le laisser brisé, isolé, abattu, mais c’est mal connaitre l’individu qui se définit lui-même comme une véritable force de la nature.
Alors qu’on se l’arrachait dans les colloques, il s’est retrouvé isolé. Le téléphone s’est tu. «Je n’ai pas abandonné. J’ai assuré l’avenir de mon service, je l’ai mis entre bonnes mains puis j’ai pris ma retraite. J’ai démissionné de la municipalité pour moi, en pensant à moi. J’ai pris un peu de temps pour ma famille et tu sais quoi, une entreprise d’ici, X-Métal, est venue me chercher pour un contrat. J’avais encore quelque chose à offrir», raconte-t-il les yeux étincelants.
Mais la boucle n’était pas bouclée pour Yvan Charron. Certaines blessures mettent plus de temps à disparaitre, à se faire oublier. Comme une ombre qui s’étiole trop longtemps.
CÉRÉMONIE
Puis, le samedi 22 aout, dans le cadre d’une cérémonie soulignant le 40e anniversaire de la caserne 20, une plaque commémorative a été remise à l’ancien chef. Son travail, sa dévotion et son implication ont été reconnus. C’était l’occasion pour lui de retrouver ses hommes, une première depuis son départ.
«Je ne voulais pas y aller. Mais une fois là, quand les gens ont applaudi…», encore ému, Yvan Charron ne termine pas sa phrase. Elle reste suspendue dans le temps, où l’écho des applaudissements est toujours audible. Le geste a touché l’homme. L’hommage venait des siens, de sa communauté, une véritable catharsis pour l’ancien directeur incendie.
Aujourd’hui, les pieds plantés dans sa terre, cette terre sablonneuse qui donne cette saveur si caractéristique et sucrée à ses citrouilles, il se prépare à accueillir ses clients. Yvan Charron y est enraciné, il le sait.
Maintenant âgé de 52 ans, il peut aujourd’hui l’apprécier entouré des siens, sa belle Nancy, leurs six enfants et ses trois petits-enfants… sans bruit, ni sirène.
28 commentaires
Un bel article enfin positif !
Bonne continuité a toi, ton épouse et a ta famille
Pour moi les absents ont toujours tort....Vous avez tout fait ce soir là, ce qui était possible de faire....
Merci encore monsieur.
la société aprendras au travers de cet évenement !
tes hommes de caserne eux avaient compris ! le reste , who cares !