Un ratio soins/patients «dangereux» dans plusieurs CHSLD de la région, selon la FIQ
Une ou deux infirmières pour prendre soin de plusieurs dizaines de patients la nuit, des professionnelles à bout de souffle et une situation fragile puisqu’elles ne peuvent «pas se diviser en deux». C’est le portrait dépeint par la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), ce mercredi 21 octobre, pour illustrer une problématique vécue quotidiennement dans des CHSLD de la province, dont plusieurs de la région.
Le syndicat a publié ce matin son «palmarès des pires ratios en CHSLD au Québec», espérant faire comprendre à la population et aux élus les conditions de travail de certaines professionnelles en soins.
Selon celui-ci, le ratio soins/patients est considéré «dangereux ++», en soirée ou durant la nuit, dans quatre CHSLD et même un centre hospitalier du KRTB. Il s’agit du CHSLD D’Anjou de Saint-Pacôme, du CHSLD de Chauffailles de Rivière-du-Loup, du CHSLD de Rivière-Bleue, du CHSLD de Saint-Louis-du-Ha! Ha! et du Centre hospitalier de Trois-Pistoles.
Au CHSLD de Chauffailles, par exemple, on déplore la présence de seulement deux infirmières auxiliaires (soins directs aux patients) pour 72 patients dans le quart de nuit. À Rivière-Bleue et à Saint-Louis-du-Ha! Ha! (quart de soir), on note la présence d’une seule infirmière auxiliaire pour 44 et 43 patients respectivement.
Notons que ces trois centres d’hébergement comptent aussi sur la présence d’une assistante-infirmière-chef, selon la FIQ. Celle-ci assiste l’infirmière-chef ou le supérieur immédiat dans ses fonctions, elle exerce lorsque requis les fonctions habituelles d’infirmières et elle planifie, supervise et coordonne les activités d’un centre d’activités. Elle agit également comme personne-ressource auprès de ses collègues.
Dans son palmarès, la FIQ cible aussi les situations des CHSLD de Saint-Cyprien (2 infirmières pour 30 patients), de Squatec (1 infirmière pour 24 patients) et de Saint-Joseph à Rivière-du-Loup (4 infirmières auxiliaires pour 75 patients) comme étant «problématiques» durant la nuit.
«Tous nos CHSLD se retrouvent dans les catégories de problématiques à dangereux ++, nous avons un réel problème», mentionne la présidente de la FIQ SPSICR-BSL, Cindie Soucy.
«Il est extrêmement difficile de donner des soins sécuritaires et de qualité avec de tels ratios. L’évaluation physique et mentale d’un patient est un acte accompli par les infirmières. Trop souvent, nos infirmières doivent faire des choix déchirants, comme par exemple, lorsqu’un résident fait une chute et nécessite une évaluation, et qu’au même moment, un autre résident souffrant a besoin de médicaments. Inévitablement, l’infirmière priorisera un soin plutôt qu’un autre alors que ces deux personnes devraient être soignées au moment où elles en ont besoin. C’est inacceptable, c’est inhumain, pour eux, et pour les professionnelles en soins qui donnent leur 200 %, et qui ne sont pas assez nombreuses pour donner les soins», explique Mme Soucy.
* Les codes de couleurs illustrent le niveau de danger des conditions de travail par la FIQ. Rouge représente «dangereux ++», alors que jaune signifie «problématiques».
«UNE VOIE INCONTOURNABLE»
Le syndicat interpelle le premier ministre François Legault et le ministre de la Santé, Christian Dubé. Il soutient que «l’hécatombe» vécue ce printemps en CHSLD en raison de la pandémie «ne doit jamais se reproduire» et que le gouvernement doit «accélérer les discussions pour diminuer la surcharge de travail». Selon lui, la solution des ratios sécuritaires «est une voie incontournable pour redonner la capacité à [ses] membres de soigner.»
La FIQ précise qu’il n’y a pas de chiffre absolu pour définir des ratios sécuritaires, puisqu’il faut tenir compte de plusieurs facteurs dont la nature des soins prodigués. Les rations sécuritaires sont donc un minimum, dit-on, une norme de soins dont le Québec devrait se doter.
Le syndicat ajoute qu’elle a fait la démonstration de la pertinence de ces ratios, ces dernières années. Selon lui, la réalisation de projets pilotes dans les établissements de santé, en mars 2018, a illustré les effets positifs des ratios sécuritaires sur leurs conditions d'exercices.
Les professionnelles en soins ont observé, entre autres, «une diminution des risques de chute chez les patients, un meilleur contrôle de la douleur, une diminution de certains médicaments, de l'anxiété des patients et de leur famille, une augmentation significative de la capacité de marche des patients, ainsi qu'une meilleure prise en charge de ceux-ci à tout moment et particulièrement lors de complications ou d'imprévu».
Le 20 octobre, en point de presse, le premier ministre François Legault a mentionné comprendre la fatigue et la frustration des infirmières. Il a aussi souligné vouloir faire des efforts financiers pour réduire leur charge de travail, mais a prévenu qu’il ne pourrait le faire tout en donnant des augmentations de salaire plus élevées que l'inflation.
De son côté, le CISSS du Bas-Saint-Laurent n'a pas souhaité commenter le dossier.
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