Rareté du logement : la bonne étoile de Jovette Levasseur
Qu’ils soient petits ou grands, situés dans un quartier ou un autre, les logements abordables sont une denrée rare dans la région de Rivière-du-Loup. Alors imaginez la difficulté de trouver un appartement quand les critères se multiplient, quand il doit être un adapté – ou adaptable – aux besoins particuliers d’un ou plusieurs enfants. Un cauchemar auquel a été confrontée Jovette Levasseur et qui a été source de doutes et d’incertitudes entre les printemps 2019 et 2021. Jusqu'à ce qu’un propriétaire lui tende enfin la main.
Il y a quelques semaines à peine, Mme Levasseur habitait un appartement 5 ½ aménagé dans une ancienne maison de la rue Fraserville de Rivière-du-Loup avec ses quatre enfants. Un logement propre, bien situé et fonctionnel qui devenait cependant incompatible avec les besoins grandissants de sa plus jeune, Anaïs.
La fillette de quatre ans est atteinte de lissencéphalie sévère, une malformation cérébrale qui touche un enfant sur 100 000. Elle est grande, enjouée et souriante, mais elle n’est pour le moment pas capable de se déplacer elle-même – peut-être ne le sera-t-elle jamais. Une situation qui amenait son lot de défis quotidiens, ne serait-ce que pour atteindre la salle de bain à l’étage ou même la nuit, alors que maman devait partager sa chambre au rez-de-chaussée pour être à ses côtés en cas de besoin.
«Quand je suis devenue mère monoparentale, c’est devenu de plus en plus difficile. C’était évident que je devais trouver mieux, quelque chose de plus grand et surtout plus adapté à notre réalité», confie la mère de famille.
En 2019, Jovette Levasseur s’est donc mise à la recherche d’un nouveau milieu de vie pour sa famille. Ses critères? Un logement dans le quartier Saint-François où ses enfants vont à l’école primaire et secondaire. Elle espérait aussi quatre chambres, dont deux au rez-de-chaussée, près d’une salle de bain et des aires de vie.
«J’ai tout essayé pour trouver un nouvel endroit. Les sites, les groupes Facebook…mais rien n’a fonctionné. Quand je trouvais quelque chose qui pouvait faire l’affaire, c’était soit trop cher ou dans un mauvais quartier, ce qui m’obligeait à déraciner les enfants. Ce n’était vraiment pas l’idéal.»
Quelques appartements intéressants se sont quand même présentés au cours de ces deux années. Certains ont été loués le temps de cligner des yeux, d’autres n’étaient simplement pas accessibles à tous, a-t-elle réalisé.
«J’ai vu quelques grands logements disponibles, comme des 6 1/2, mais la problématique était souvent la même. C’était indiqué sur l’annonce que c’était idéal pour couple tranquille ou personne vivant seule… Le message était clair : pas d’enfants.»
Et quand ce n’était pas la famille elle-même, c’était l’éventualité d’adapter le logement qui nuisait aux démarches. «Je n’ai jamais caché ma situation avec Anaïs. C’était expliqué dans mes annonces que ma fille avait des besoins particuliers et plusieurs sont restées sans réponse. Certains propriétaires m’ont aussi carrément dit qu’ils refuseraient [les travaux d’adaptation], même s’ils n’ont normalement pas le droit», regrette-t-elle.
Dans ses démarches, Jovette Levasseur a également vérifié du côté des logements à loyer modique. Étant maman monoparentale à la maison, elle était éligible. Cependant, là encore, elle a fait face à un problème. Les espaces disponibles, dans Saint-François, étaient trop petits. «Ce sont des trois chambres maximum, pas de quatre chambres. Il y a aussi des défis du côté de l’accessibilité», résume-t-elle.
Il y avait toujours une nouvelle embûche, un élément qui faisait en sorte que les recherches devaient continuer. «C’était extrêmement stressant. J’étais vraiment au pied du mur. Certains me disaient que je devais regarder à l’extérieur de Rivière-du-Loup, mais c’était difficile. Ma priorité était de rester ici pour mes enfants.»
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L’OUVERTURE D’UN PROPRIÉTAIRE
Au printemps 2021, n’ayant toujours pas trouvé où elle allait déménager sa famille, Jovette Levasseur était résignée à demeurer au même endroit une année supplémentaire avec les défis que cela représentait. Elle a toutefois essayé une dernière tentative : demander à son nouveau propriétaire s’il était ouvert à l’idée d’ouvrir la maison pour fusionner son logement avec celui du voisin, un 3 ½ inoccupé. Une ligne à l’eau, une demande un brin désespérée, qu’il a finalement acceptée, proposant même un prix mensuel honnête à sa locataire.
Steven Michaud, propriétaire de CSC Portes et Fenêtres Inc., avait fait l’acquisition de la maison quelques mois plus tôt. Avec sa réponse positive, il a offert à Mme Levasseur tout ce qu’elle recherchait à court et moyen terme.
«Jovette est une très bonne locataire et n’avoir qu’elle dans la maison fait mon affaire. Elle est aussi contente du résultat, ça lui enlève un poids sur les épaules, alors c’est parfait comme ça», mentionne-t-il.
Dès qu’il a reçu l’accord de la Ville, en août, l’entrepreneur a lui-même effectué les travaux d’agrandissement. Il a défoncé un mur et détruit la seconde cuisine pour en faire un petit salon et un espace de jeux près de la table à manger. En une journée, la famille Levasseur avait une maison entière pour s’épanouir.
Pour le moment, l’homme d’affaires a épongé les couts des travaux d’adaptation, mais des démarches ont été effectuées pour obtenir une aide financière de l’État destinée à aider les familles à couvrir des dépenses comme celles-ci. La construction d’une rampe d’accès extérieure est aussi dans les plans.
«Quand il a accepté, et que nous avons eu le OK de la Ville, c’est une tonne de briques qui est tombée de mes épaules. Steven a fait preuve d’une grande ouverture et c’est vraiment apprécié […] Si tous les proprios étaient comme lui, ça aiderait pas mal», souligne Jovette Levasseur, concédant que les propriétaires peuvent vraiment faire une différence dans la vie de leurs locataires.
Humble, Steven Michaud souligne qu’il était simplement heureux de donner un coup de main. Il confirme aussi avoir signé un bail de cinq ans avec Jovette Levasseur pour s’assurer, mutuellement, d’une certaine stabilité.
«Je n’ai pas l’intention de vendre, mais si c’était pour se produire, c’est aussi une sécurité pour elle et ses enfants, le temps qu’ils grandissent davantage. Je trouvais ça important.»
Pendant des mois, Jovette Levasseur a cherché le logement qui répondait aux besoins de ceux et celles qu’elle aime le plus. Ironiquement, l’appartement idéal était sous ses yeux. Il ne fallait que la bonne personne pour lui permettre d’y avoir accès.
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