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Une tarification pour la sécurité civile contestée à Saint-Mathieu-de-Rioux

durée 11 mars 2022 | 06h59
  • Andréanne Lebel
    Par Andréanne Lebel

    journaliste

    En colère après avoir constaté une importante hausse de leurs taxes municipales en raison d’une nouvelle tarification en lien avec la sécurité civile, plus d’une trentaine de citoyens se sont présentés le 8 mars à la séance publique du conseil municipal de Saint-Mathieu-de-Rioux. Depuis deux ans, les taxes ont plus que triplé pour les propriétaires du Camping St-Mathieu.

    En 2022, la nouvelle tarification est basée sur des «unités» de sécurité civile. Chaque logement, commerce, chalet, cabine, restaurant, salle communautaire, terrain vague ou industrie (par groupe de cinq employés) représente une unité dont le montant a été fixé à 166,45 $. Les emplacements des terrains de camping comptent pour une demi-unité.

    Afin de payer cette augmentation, les propriétaires du Camping St-Mathieu, François Lévesque et Jacinthe Dionne, estiment qu’ils auraient dû facturer environ 119 $ de plus par terrain à leurs clients. «Vous venez prendre ça dans ma poche, c’est mon fonds de retraite. J’ai travaillé là-dessus comme un malade. J’en ai mis du temps, je me suis presque rendu malade physiquement et mentalement. Aujourd’hui, la Municipalité vient me chercher 8 000 $ sur mon terrain […] Qu’est-ce que vous faites ? Êtes-vous en train d’envoyer les gens à Trois-Pistoles, Saint-Jean-de-Dieu et au Bic ? Vous êtes en train de tuer l’entreprenariat de votre municipalité», a lancé François Lévesque aux élus lors de la séance publique. En deux ans, les taxes payées par les propriétaires du camping sont passées d’environ 5 730 $ à 19 200 $. Si la tendance se maintient, l’an prochain il sera forcé de fermer son commerce. Il est hors de question pour lui de vendre son camping, puisqu’il y est trop attaché.

    «Mes clients viennent magasiner dans Saint-Mathieu, ils viennent à l’épicerie, ils vont au restaurant […] Peut-être que je n’engage pas 14 employés [comme le Camping KOA], mais que je permets à d’autres commerces de vivre autour», a ajouté François Lévesque. Le Camping KOA est présentement devant le tribunal contre la Municipalité afin de contester une hausse de taxes. Selon les informations de CIEL-FM, les taxes auraient augmenté de 50 000 $ en 2021 à 71 000 $ en 2022 au Camping KOA. L’entreprise a refusé de commenter.

    La propriétaire de l’Auberge-Restaurant Le Vieux Couvent, Virginie Chénard, estime que cette hausse de taxation freine l’épanouissement de son commerce. «Je pense que les entreprises, c’est la base du développement des territoires. Comme nous, plusieurs entreprises se développent dans le but de créer une valeur sociale à notre communauté. Les taxes et les impôts ont vraiment une incidence sur combien je vais pouvoir investir et créer d’emplois.»

    Elle a dénoncé les inégalités créées par cette forme de taxation pour la sécurité civile. En 2022, elle doit aussi payer une tarification d’aqueduc (163 $ l’unité) et d’égout (112 $ l’unité) pour chaque chambre de son auberge, en plus de la taxe foncière générale et de la tarification de sécurité civile. Ainsi, ses taxes sont passées de 5 839,77$ en 2020 à 8 310,79 $ en 2022, une hausse de 142 %.

    Propriétaire de plusieurs terres agricoles, l’agriculteur Alexandre Anctil en avait également long à dire au conseil municipal. Il a soulevé de nombreuses questions et il estime que les élus s’engagent sur une pente glissante en «changeant les paradigmes fiscaux». Comme il est propriétaire de 14 terrains, il devra payer la tarification de 166,45 $ à 14 reprises selon le calcul des unités de sécurité civile. «Ce n’est pas une logique qui se tient de sortir la sécurité publique pour la mettre sur une taxe au matricule, parce que vous êtes capables de faire ça pour les taxes foncières au complet […] C’est une question de répartition, je suis extrêmement déçu que vous ayez fait ça sans davantage de consultation. Pour moi, il n’y a rien de plus inéquitable que de fonctionner comme ça.» Selon cette méthode de calcul, le propriétaire d’une propriété fictive d’une valeur de 300 000 $ ne paierait qu’une unité à 166,45 $.

    RÉACTIONS DE LA MUNICIPALITÉ

    Selon les explications du directeur général de la Municipalité de Saint-Mathieu-de-Rioux, Gino Dubé, le nœud du problème viendrait d’une rencontre qui a eu lieu il y a quelques mois avec la Direction régionale de la sécurité publique. Saint-Mathieu doit se conformer au schéma de couverture de risques qu’elle a adopté. Le Service incendie coutait environ 40 000 $ par année, mais il n’est pas conforme. Saint-Mathieu-de-Rioux s’est retirée de son entente avec Trois-Pistoles en octobre 2021. La création d’une régie incluant Saint-Simon-de-Rimouski est donc envisagée, mais les couts devraient passer de 40 000 $ à 340 000 $ par année.

    La Municipalité devra aussi recruter 9 nouveaux pompiers pour assurer une présence de 21 pompiers en caserne et trouver un nouveau directeur pour son service de sécurité incendie. Si les couts étaient répartis sur la richesse foncière, le directeur général Gino Dubé estime que les citoyens de Saint-Mathieu-de-Rioux paieraient deux fois plus cher que les citoyens de Saint-Simon-de-Rimouski, expliquant ce choix de fonctionner par «unité de sécurité civile». La construction d’une nouvelle caserne doit aussi être prévue. Au budget de 2022, les dépenses de sécurité publique sont évaluées à 204 406,15 $.

    Le conseiller Félix Charbonneau s’est montré ouvert à discuter de cette tarification si elle cause des frictions dans la communauté. «On va en reparler entre nous. De toute façon, on refait un règlement de taxation chaque année, pour le niveau de taxation de base et pour les tarifications. On essaie de contenter tout le monde», a expliqué le maire, Roger Martin. «Il y avait environ 30 ou 40 personnes et elles sont touchées par la décision que nous avons prise au conseil. À Saint-Mathieu, nous avons deux communautés. On a le lac qui contribue à environ 70 % du budget municipal, c’est beaucoup […] Comment on trouve l’équilibre à travers tout ça? J’ai de la misère un peu, il n’y en a jamais vraiment», conclut M. Martin. 

    Il déplore également l’esprit de clocher présent entre les services incendie et que «certains pompiers ne puisse pas mettre leurs intérêts privés de côté pour assurer la protection des citoyens». Au cours des prochaines semaines, la Municipalité de Saint-Mathieu-de-Rioux s’affairera à «faire un ménage dans les comptes de taxes».  

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