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Stimulation magnétique transcrânienne répétitive

Santé mentale: briser les tabous

durée 19 février 2023 | 06h55
  • Lydia Barnabé-Roy
    Par Lydia Barnabé-Roy

    Journaliste de l'Initiative de journalisme local

    Chaque jour depuis le 6 janvier, Line Harton de Rivière-du-Loup se rend au Centre hospitalier régional du Grand-Portage (CHRGP) pour recevoir son traitement de stimulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr ou rTMS). C’est la deuxième fois en quatre ans que la patiente de 54 ans participe à ces séances afin d’améliorer sa santé mentale. Même si la rTMS n’est pas «magique», elle l’aide à reprendre sa vie en main, petit à petit.

    «Il y a des hauts et des bas, sauf que ça m’amène à réfléchir. Il y a des moments dans mon passé, dans ma vie, présentement, que je m’aperçois que je réveille. Il y a des affaires que je ne comprenais pas, où je ne voyais pas le bout du tunnel et là on dirait que je suis en train de le voir», raconte Mme Harton. Son traitement n’agit pas sur sa santé mentale en un claquement de doigts, mais il l’aide à éclaircir des pans de sa vie qui s’étaient perdus dans l’ombre de son cerveau.

    La rTMS permet de réduire les symptômes de la dépression, du trouble affectif bipolaire, du trouble obsessionnel compulsif (TOC), du tabagisme, des douleurs chroniques, des acouphènes, des troubles de consommation à l’alcool ou aux drogues, la schizophrénie et du trouble de stress post-traumatique (TSPT), notamment. «On stimule le cerveau de façon extrêmement naturelle, car avoir des potentiels d’action dans un cerveau, c’est normal. On le stimule dans le but de l’aider à repartir et à recommencer à fonctionner», confie Dr Jean-François de la Sablonnière, médecin psychiatre et chef du service de neurostimulation et traitement alternatifs des troubles résistants au CHRGP.

    Line Harton est consciente que les souvenirs ravivés sont difficiles à accueillir sur le coup, mais elle réalise l’importance de leur laisser une place pour qu’éventuellement, elle en soit libérée. Quand elle évoque le bien que ce traitement lui procure, elle ressent encore du jugement, les gens croyant à tort qu’il s’agit de chocs électriques. C’est plutôt une bobine qui est placée sur le dessus de la tête et qui fait de petits coups, comme un pic-bois, image-t-elle. La machine rTMS stimule l’électricité entre les neurones. «Ça nous fait rire, nous on dit : les neurones du bonheur, rigole-t-elle, ça ramène le positif».

    COMMENT FONCTIONNE LA RTMS?

    Vers les années 50-60, les chercheurs en médecine souhaitaient trouver un autre moyen que les électrochocs comportant un bon nombre d’effets secondaires. Il aura fallu attendre près de 30 ans avant que l’anglais Anthony Barker ait l’idée d’utiliser un champ magnétique pulsé en envoyant un courant électrique intense dans une bobine de cuivre (un aimant) à circuit fermé, raconte Dr de la Sablonnière. Selon la loi de Faraday, «le champ magnétique va induire un champ électrique qui va stimuler ce qui est électriquement stimulable à proximité», explique-t-il. Le champ magnétique est de nature et de puissance semblable à celui utilisé pour l’imagerie par résonance magnétique (IRM).

    «Donc à travers le crâne, on crée des potentiels d’actions dans le cortex cérébral. On va être capable de créer un message électrique dans le cerveau», souligne le psychiatre. Par la forme de la bobine, les psychiatres utilisant la rTMS sur leurs patients peuvent concentrer le champ en un point précis, à la zone du cerveau désirée afin de traiter un trouble de santé mentale donné. Dr de la Sablonnière se veut rassurant : aucun courant électrique n'entre dans le corps.

    Les personnes atteintes de troubles de santé mentale ont de l’hypofrontalité, c’est-à-dire que les neurones du lobe frontal communiquent mal entre elles. Sur une image d’un PET-scan, une technique de radiographie afin d’observer l’activité dans les tissus, cette partie des hémisphères sera noircie pour les personnes souffrant d’un trouble de santé mentale, alors qu’un cerveau sans troubles est illuminé partout.

    Entre la fin mai 2018 et mars 2021, 123 patients ont été traités au CHRGP, autant des femmes que des hommes, en rTMS. «Ce qu’on voit dans notre portrait d’utilisation c’est que si les patients avaient une moyenne de 20 points au MADRS (l’échelle de dépression de Montgomery et Åsberg), qui est le score pour une dépression à intensité modérée, dès la première semaine de traitement, ça tombait à 10 et après deux semaines, trois semaines, quatre semaines, cinq semaines, six semaines on descendait en bas de 10 comme moyenne», indique Dr Jean-François de la Sablonnière. 

    Le pourcentage de réponse chez les patients se perçoit par une amélioration d’au moins 50 % des symptômes. Concernant la rémission, cette amélioration doit être combinée à un pointage inférieur à 10. Pour la rTMS, les données se situent autour de 60 % de réponse et 45 % de rémission après quatre à six semaines. 

    La rTMS «n’est pas un traitement de dernière intention comme les électrochocs réservés à des patients qui sont résistants à plus de deux, trois, quatre, cinq ou six pathologies pharmacologies», soutient le psychiatre. Même si cela reste à prouver, il croit que puisque la rTMS traite des patients moins sévèrement atteints d’un trouble de santé mentale, les rechutes sont moindres. Officiellement, les personnes qui peuvent obtenir des séances de rTMS doivent avoir complété au moins un essai non concluant avec un traitement pharmacologique.

    Bien que douloureuse, la rTMS est efficace et peut contribuer à aider plusieurs personnes atteintes de problèmes de santé mentale aux prises avec des difficultés à résoudre des problèmes, des troubles d’attention et de concentration, des troubles de sommeil, des pensées plus émotives, notamment. En tout, le traitement dure 4 à 6 semaines, comptant au total 20 à 30 séances, soit une par jour. Ces dernières durent entre 3 et 45 minutes. Les patients retouvrent très rapidement, après quelques séances, la capacité à éprouver du plaisir, ont plus d’énergie, d’appétit, le gout de faire des choses, se débarrassent de leurs idées suicidaires. 

    Ces changements, Line Harton les a très vite remarqués. Ce traitement la sauve puisqu’elle ne voyait plus de sens à la vie, elle ne savait plus où elle s’en allait. Elle perçoit la même chose chez les autres patients qu’elle croise le matin dans la salle d’attente pour aller obtenir leur traitement. «Ce n’est pas magique, il faut y croire», souffle-t-elle. Chaque jour, Mme Harton donne une chance de plus à la vie et fait des efforts pour s’en sortir.
     

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