De l’arbre à la transformation : tracer la goutte d’érable en un clic
L'érablière compte près d'une trentaine d'employés.
La saison des sucres dure entre 30 à 40 jours. La Coulée Creuse bout entre six et sept heures par jour.
En actif, la Coulée Creuse vaut entre 25 et 30 M $.
L'an dernier, l'érablière a fabriqué entre 2300 et 2400 barils de sirop d'érable. Cette saison, elle vise 3000 barils, soit environ 100 barils par jour.
Une machine de la chambre d'osmose.
L’Érablière de la Coulée Creuse de Saint-Athanase, qui compte 262 000 entailles, a le vent dans les voiles. En 2022, les copropriétaires de l’entreprise familiale, Sylvain Patry et ses fils François et Mickaël, ont investi plus de six millions de dollars pour développer leurs quatre infrastructures à la fine pointe de la technologie et ainsi pratiquer l’acériculture 4.0.
Dans la dernière année, trois agrandissements ont été effectués. Lorsque de tels travaux sont réalisés, un bout de chemin est construit, une ligne électrique est installée, la fibre optique est acheminée et des tuyaux sont enfouis, explique Sylvain Patry.
Entre 40 et 50 kilomètres de canalisations sous-terraines ont été enterrées afin de transporter la sève des érables, vers les érablières, puis jusqu’au centre de bouillage situé à la Coulée Creuse. «100% de l’eau d’érable est transportée par tuyau sous la terre», se réjouit M. Patry. Il partage que des gouttes de sève parcourent jusqu’à 17 kilomètres avant d’atteindre le centre de bouillage. Ces travaux ont couté près d’un demi-million de dollars à l’entreprise familiale.
Près de 20 kilomètres de fibre optique ont été installés afin de brancher les infrastructures au «wi-fi». Sur les 30 stations de pompage présentes sur les terres des Patry, 20 sont connectées à Internet.
Deux érablières ont été acquises par la famille entre la saison 2022 et 2023, dont une de 40 000 entailles et l’autre de 22 000 entailles, moyennant des frais de 4,7 M $. Près de 300 000 $ ont été injectés dans une de celles-ci afin d’installer de nouvelles stations de pompage, d’ensevelir des conduites, de la relier au réseau et d’installer des sondes. Pour tout automatiser, les anciens équipements tels que les évaporateurs et les concentrateurs ont été enlevés pour laisser place à la nouvelle technologie. Les trois érablières autour de la Coulée Creuse servent de grosses stations de pompage et d’entreposage de l’eau d’érable. 11 silos coutant entre 45 et 50 000 $ ont été installés avant la présente saison.
Les copropriétaires se sont aussi débarrassés de toutes les osmoses qu’ils avaient. «Là on a cinq prototypes. Présentement c’est la salle d’osmose la plus moderne, performante et automatisée au monde», souligne Sylvain Patry. Environ 1,5 M$ ont été nécessaires pour mettre en place cette chambre qui pourrait produire jusqu’à 25 barils à l’heure si l’érablière détenait un troisième évaporateur. Une entrée électrique à 150 000 $ a aussi dû être créée afin d’alimenter les machines en électricité. En ce moment, la Coulée Creuse produit 16 barils à l’heure.
DÉVELOPPER POUR LÉGUER
Quand il est question d’innovation et d’investissement, Sylvain Patry n’a pas froid aux yeux : l’homme a toujours eu cette fibre entrepreneuriale, esprit qui lui vient de son père. Alors quand il doit décider entre améliorer l’entreprise ou attendre, il fonce.
Ayant connu les chevaux sur les érablières alors qu’il avait 10 ans, il trouve fascinant de constater l’évolution de l’industrie acéricole. Tout ce qui est optimisé par la technologie le stimule.
Tous les avantages de l’automatisation de la production du sirop d’érable le rassurent de laisser un bel héritage à ses garçons, François et Mickaël. Tout ce qu’il réalise maintenant, il le fait pour eux. «Je regarde pour déléguer tranquillement. Je pense qu’en leur donnant ces outils-là, ça va les aider», confie l’homme de 64 ans.
L’ACÉRICULTURE 4.0
«Ça permet d’avoir une traçabilité du sirop à partir de l’érable jusqu’à sa vente», assure Sylvain Patry. À partir de sondes, il est possible de savoir si une fuite est constatée à une entaille, le nombre de livres extraites par arbre ainsi que le niveau d’eau dans les pompes et les silos, notamment. En un clic, par un ordinateur ou un téléphone cellulaire, il peut savoir ce qui se passe sur toutes ses érablières et sa trentaine de lots à bois. Il peut même contrôler des machines à distance.
Le gestionnaire indique qu’en plus d’éviter l’erreur humaine, d’augmenter la vitesse de production et de rendement, de contrer la pénurie de main-d’œuvre en la réaffectant ailleurs, cette nouvelle acériculture permet aussi de récolter diverses données. Ainsi, M. Patry peut facilement connaitre les secteurs à améliorer dans son érablière.
L’automatisation permet aussi de prévoir les bris majeurs, un lavage des équipements plus rapide et des conditions de travail meilleures pour les employés. Selon Sylvain Patry, tout est plus efficace. S’il se fie aux années 1995, avant tous les changements effectués, il souhaitait un jour pouvoir atteindre les trois livres par entaille. Aujourd’hui, il va chercher jusqu’à cinq livres entaille.