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Petits fruits, grands espoirs 

durée 26 mai 2024 | 06h54
  • Marc-Antoine Paquin
    Par Marc-Antoine Paquin

    Journaliste

    Le printemps est synonyme de bourgeons en fleurs, de chants d’oiseaux et d’une luminosité naturelle plus abondante. Pour les producteurs maraichers et agricoles, comme Martin LeBel et Nathalie Bernier de la Fraisière LeBel, c’est aussi une période de renouveau, d’aspirations et d’optimisme. Un sentiment qui est d’autant plus important après une saison 2023 qui a amené son lot de défis. Pour la prochaine, tous les espoirs sont toutefois permis. 

    Le soleil brille dans les champs de la ferme familiale de Saint-Arsène, le 9 mai en après-midi. Avec leur tracteur John Deere, des membres de leur famille et des amis de longue date, Martin LeBel et Nathalie Bernier travaillent à la plantation de huit acres de fraises, soit plus de 40 000 plants. C’est d’ailleurs la première journée de plantation de la saison pour l’entreprise fondée en 1965. Une tâche manuelle, répétitive, mais qui est essentielle au bon roulement de la production année après année. 

    «C’est beaucoup de travail, mais ça demeure une belle activité qu’on apprécie tous les ans», partage Nathalie qui, derrière le tracteur, s’assure que les plants soient bien mis en terre. «C’est le moment où on peut se souhaiter le meilleur. On ouvre un nouveau chapitre à chaque fois», souligne à son tour son conjoint avec le sourire.

    Une page blanche sur laquelle ils souhaitent retrouver, dans quelques mois, des nuances de rouge, de bleu et de vert, à l’image des petits fruits qu’ils récolteront sur leur propriété, au plus grand plaisir d’une clientèle déjà conquise. 

    Nathalie Bernier et Martin LeBel. 

    DES DÉFIS NOMBREUX

    Chez Fraisière LeBel, comme chez d’autres producteurs maraichers, la plantation de différentes variétés de fraises est une activité traditionnelle, à laquelle participe toute la famille, le mois de mai venu. Pourtant, cette fois-ci, l’activité revêt un caractère un peu plus symbolique. 

    L’an dernier, un virus a ravagé une bonne quantité des plants de fraises de la ferme. Des plants qui devaient produire pour une deuxième saison à l’été 2024 et sur lesquels l’entreprise ne pourra finalement pas compter. 

    Le virus, aussi terrible a-t-il été, n’est pourtant qu’un seul des éléments contre lesquels la famille LeBel s’est butée en 2023. L’eau et l’humidité ont aussi touché les maraichers lors de la dernière saison estivale et le Bas-Saint-Laurent n’y a pas échappé. Si la région a évité les grandes pluies diluviennes vécues plus à l’ouest de la province, elle a tout de même été confrontée à une grande humidité et à la «moisissure grise», une maladie à manifestation chronique qui peut affecter les cultures, dont les fraises.

    «Ça n’a pas été facile», convient Martin LeBel, sans cachette. La dernière présence du virus remontait à 2014 à la ferme. «Oui, il y a eu la maladie, mais la saison n’a pas été évidente pour toutes sortes de raisons. Les pluies ont eu un impact sur le rendement et sur notre capacité à récolter à temps. Les couts d’exploitation à la hausse ont aussi joué un rôle.»

    Par la force des choses, les fraises ont été moins savoureuses. Les framboises et les bleuets, fragiles, ont aussi reçu beaucoup d’eau, trop d’eau. Certains rangs ont même dû être abandonnés, puisqu’il était impossible de les récolter pour la vente dans les délais appropriés. Bref, seul le maïs semble avoir apprécié son été. 

    «On ne souhaite ça à personne. C’est difficile psychologiquement. Notre mission, dans la vie, c’est de nourrir nos gens locaux. L’été dernier, quand ils venaient, on n’était pas toujours en mesure de leur vendre ce qu’ils désiraient et des récoltes se perdaient dans les champs… On a réussi à tirer notre épingle du jeu, mais ça n’a pas été facile», a témoigné M. LeBel. 

    «Cette année, comme un chat échaudé craint l’eau froide, on espère que l’histoire ne va pas se répéter. Ça nous rend un peu nerveux.»

    Dans les dernières années, l’entrepreneur, ingénieur mécanique de formation, a apporté certaines modifications à ses installations afin de s’adapter aux nouvelles réalités climatiques. Les plants de fraises, par exemple, ont été mis en terre sur une petite butte afin de faciliter l’évacuation de l’eau et un nouveau système d’irrigation plus performant en «gouttes-à-gouttes» a été installé. De nouvelles productions de légumes et d’ail, notamment, ont aussi été démarrées afin de diversifier la culture et ainsi réduire les risques. 

    «La sécheresse, pour nous, ce n’est pas un problème du tout. De trop grandes précipitations, trop d’eau, ça c’est problématique. Il nous faut un juste milieu.»

    OPTIMISME MALGRÉ TOUT 

    Après un hiver plutôt doux, le printemps est arrivé comme une dose d’oxygène pour les producteurs. Le moment de tourner la page sur une saison à oublier, et l’opportunité d’entamer de nouveaux mois d’été. Qui dit soleil, barbecue et crème glacée, dit aussi petits fruits, légumes du jardin et maïs sucré, les spécialités de l’entreprise dont la renommée n’est plus à faire. 

    «Pour moi, c’est une nouvelle possibilité de nourrir les gens de la région, les gens de chez nous. C’est pour eux que je fais tout ça», souligne Martin LeBel. 

    C’est aussi pourquoi le producteur regarde en avant et préfère être optimiste pour les mois à venir. Récemment, une première bonne nouvelle a été reçue lorsqu’il a retiré la paille qui a protégé certains plants de fraises des rigueurs de l’hiver. Ceux qui avaient été plantés l’été dernier et qui offriront une première année de production.

    «Ils sont beaux, très beaux. C’est donc encourageant», indique-t-il. «Même avec la moitié des superficies, je m’attends à avoir le double du volume de l’année passée, mais il faut évidemment que les conditions soient de notre côté.»

    «On se souhaite vraiment un bel été. Ça ferait du bien à tout le monde», complète sa conjointe. 

    Expérimenté, Martin LeBel sait cependant trop bien que les maraichers, tout comme les producteurs agricoles, sont impuissants devant les aléas de dame Nature. C’est aussi sans parler du contexte économique. Les consommateurs seront-ils au rendez-vous? 

    «Plusieurs producteurs ont encore la saison dernière sur le cœur, mais nous ne sommes pas des lâcheux, on se retrousse les manches, le soleil ressort, et on recommence ce qu’on fait de mieux», dit-il. 

    S’il n’a pas l’intention d’accrocher un chapelet sur la corde à linge, il convient qu’il aura une discussion ou deux avec son grand-père paternel, Fernand LeBel. «Je vais lui dire d’aller voir les bonnes personnes, de faire en sorte que ça se passe bien», blague-t-il. 

    Pour l’instant, Martin LeBel et les membres de sa famille travaillent fort, mais ils s’encouragent en pensant aux récoltes à venir et aux sourires des consommateurs. «Notre récompense», mentionne-t-il au sujet de la période qu’il affectionne le plus. Moment où la pression tombe et où le fruit du labeur est récolté, littéralement. 

    Si les producteurs étaient récompensés à la hauteur de leurs efforts et de leur passion, les LeBel de Saint-Arsène, comme bien d’autres, auraient l’esprit tranquille à l’approche des mois d’été. Résilients et impliqués pour les bonnes raisons, ce ne sont pas les embûches qui vont les arrêter.
     

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