Décortiquer l’histoire de femmes «au seuil des mouches à fruits»
Né d’un besoin de trouver écho avec d’autres femmes, le premier recueil de poésie «au seuil des mouches à fruits» de la Pistoloise Valérie Lavoie, alias Bobby Valérie, a été lancé en avril. Édité par la maison d’édition bas-laurentienne, Fond’Tonne, le livre se veut à la fois un récit intimiste et collectif qui tourne autour de l’expérience de femmes dans les sphères sociales et domestiques.
Artiste visuelle, poète et «jobbeuse», Bobby Valérie navigue entre les univers culturel et manuel (agriculture et charpenterie). Elle a travaillé dans plusieurs milieux traditionnellement masculins qui l’ont obligée à prendre sa place en tant que femme, à se faire falloir et à se faire reconnaitre. «Il y avait beaucoup de choses à défendre et à vivre», partage-t-elle évoquant les réflexions autour du genre, les clichés de représentations sociales.
Une colère, des frustrations sont nées de ces discours et l’ont amenée à se pencher sur ses sentiments et à chercher si d’autres femmes vivaient la même expérience. «Là où ça faisait du sens d’explorer mes propres sentiments, c’était de savoir que cette voix-là n’est pas juste intime, elle est aussi plurielle, collective», explique-t-elle.
Bobby Valérie s’est donc entretenue avec beaucoup de femmes, a récolté leurs témoignages, puis s’est inspirée de leurs histoires, et de la sienne, pour les mettre en relation afin d’exposer au jour les difficultés tout en gardant une touche de positivisme.
Extrait : s’affranchir/de l’injustice des sexes, des inquiétudes avoisinantes, des avis contraires, de la rumeur publique, de ce qui adviendra de nous./je me ferai patience pour définir l’embarras du choix
Dans son recueil, la poétesse s’amuse entre les dualités de violence et de tendresse, de pourriture et de renaissance, de colère commune qui tend vers l’amour. Ce dernier aspect fait partie entière de sa démarche artistique, elle qui cherche à créer un pont entre l’individu et le groupe.
Cette petite plaquette est le fruit d’un travail de longue haleine. Quelques poèmes ou des ébauches de certains ont été créés il y a cinq ans alors que Bobby Valérie travaillait en acériculture avec d’autres femmes. De manière assidue et professionnelle, elle a travaillé sur «au seuil des mouches à fruits» ces deux dernières années.
L’artiste a aussi réalisé la couverture ainsi que quelques illustrations retrouvées dans le recueil. «Chaque image vient appuyer délicatement, sans amener d’information supplémentaire, certaines choses du recueil […] Dans l’espèce de bombardement de mots, d’émotions, de senti qu’il y a dans les poèmes, il y avait quelque chose qui suscitait un arrêt, une contemplation quand on arrive à une œuvre visuelle», soutient-elle.