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Les stations de lavage sous pression au Témiscouata

durée 27 juillet 2024 | 06h51
  • François Drouin
    Par François Drouin

    Directeur de l'information, journaliste

    Si le silence est d’or à la pêche, le ciel s’assombrit et tonne quand il est question des stations de lavage du quartier Notre-Dame-du-Lac de Témiscouata-sur-le-Lac. Trop chères, dysfonctionnelles, vandalisées, les stations de lavage et le système de barrières ne laissent personne indifférent et déchainent les poissons, les passions plutôt.

    Info Dimanche s’est entretenu au cours des derniers jours avec quatre pêcheurs et des gens d’affaires. Tous, sans exception, ont tenu à souligner l’importance de protéger les lacs témiscouatains des espèces envahissantes comme la moule zébrée et le rôle crucial joué par le lavage des embarcations. Toutefois, ils ont aussi pointé du doigt les couts, la complexité du processus mis en place en juin dernier et l’impact négatif sur le tourisme et les affaires.

    Le maire de Dégelis, Gustave Pelletier, agit à titre de porte-parole dans le dossier des stations de lavage. S’il convient que des correctifs peuvent être apportés, la région est aussi victime de désinformation et d’une certaine mauvaise foi. «C’est la loi du 80-20. 80% des gens sont contents, 20% ne le sont pas, et les insatisfaits font toujours plus de bruit.»

    Le directeur du service de l’aménagement de la MRC de Témiscouata, Mathieu Lehoux, abonde dans le même sens. «On note une belle adhésion pour la protection des lacs. On parle de 400 cartes annuelles, on parle de gens qui font du "in and out", alors que les nous sommes à plus de 800 vignettes pour les embarcations motorisées qui restent sur les plans d'eau, et à plus de 1 000 pour les non-motorisés.»

    STATION DE LAVAGE

    Les deux stations du quartier Notre-Dame à Témiscouata-sur-le-Lac sont celles qui semblent déchainer les passions. D’abord par leur emplacement, jugé trop loin de la marina de Cabano, ensuite par les tarifs des non-résidents. Pour ses détracteurs, le bilan est catastrophique et contribue à faire fuir pêcheurs et touristes.

    Sur les réseaux sociaux, on a pu voir les appareils dégarnis de leur buse, rendant leur utilisation complètement caduque. Tantôt, c’est le code QR qui ne s’imprimait plus où les barrières qui ne s’activaient plus. De nombreuses publications sur les groupes de pêcheurs en font état et attire leur lot de réactions négatives, encore en date du 19 juillet.

    Pour Joël Lord, les incongruités soulèvent de nombreuses frustrations chez les plaisanciers et pêcheurs. «Pour quelles raisons a-t-on privilégié le Centre PGR de Notre-Dame à Cabano alors que c’est là, à Cabano, que les gens vont ? On brule du gaz pour rien. Les pêcheurs et les utilisateurs du lac ne se sentent pas écouté. Les gens sont en colère et ça amène de mauvaises actions comme le vandalisme», déplore le résident du quartier Cabano.

    Un argument que le maire de Dégelis, Gustave Pelletier, balaie du revers de la main. «Aucune raison ne justifie le vandalisme. On a volé les buses, les barrières ont été ciblées. Ça n’a pas sa place», tonne-t-il.

    Le guide de pêche Denis Rossignol se désole de voir la marina vacante alors qu’elle est toujours occupée d’ordinaire. «Ça fait 20 ans que je travaille à faire découvrir la région. J'avais une vingtaine de bateaux qui descendaient me voir et participer au tournoi provincial, et cette année c'est deux personnes qui viennent pêcher en aout. La MRC, ils ont fait des rencontres avec les pêcheurs et jamais ils n’ont écouté leurs besoins. Je suis seul au resto à tous les matins, avant nous étions une quinzaine.»

    Les frais d’automatisation et de réseautage par fibre optique ont fait grimper la facture. Mais les avantages sont indéniables pour les plaisanciers et les pêcheurs, soutient, la MRC de Témiscouata. «L’automatisation permet au pêcheur de mettre son bateau à l’heure qui lui convient, sinon il devrait attendre l’arrivée du personnel à 8 h, ce qui ne ferait pas de sens». Les barrières, souligne-t-elle, sont un moyen de contrôle du lavage qui est obligatoire, et non une limitation de l’accès au lac. Quant à Dégelis, ce sont les difficultés de connexion au réseau Internet qui forcent la municipalité à laisser les barrières ouvertes.

    PRIX EXCESSIFS

    Les tarifs de lavage ont été pointés du doigt et représenteraient un frein quant à la présence d’embarcations sur le lac. Plusieurs vacanciers rencontrés ont souligné que le prix exigé aux stations de lavage était prohibitif.

    Il faut savoir que dans les conditions d'octroi de l'entente avec Québec, la municipalité de Témiscouata-sur-le-Lac fixait les frais journaliers des résidents à 15 $ et des non-résidents à 25 $. C'est plutôt le double qui a été appliqué à l’ouverture de la saison, soit 25 $ pour les résidents et 50 $ pour les non-résidents.

    Une somme difficile à justifier selon le propriétaire de la boutique La Saloppette et l’Aventurier de Saint-Pascal, Philippe Paradis.

    «Pourquoi il y a des tarifs résidents et non-résidents du Témiscouata, pourquoi on a pas respecté le prix annoncé dans l'entente? L'une des exigences du ministère est en lien avec les tarifs excessifs. Dans les annexes, le ministère demande aussi aux municipalités de fixer une échelle tarifaire garantie sur plusieurs années, 10 ans dans les faits, et ce n'est pas respecté», s'insurge l'homme d'affaires. Ce dernier demande donc au ministère de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs de se pencher sur la situation.

    Le maire de Dégelis, Gustave Pelletier, répond que le projet était initialement estimé à 30 000 $, mais qu'il en a couté beaucoup plus. Une hausse de prix qui a contribué, souligne-t-il, a un réarrangement tarifaire.

    «À Témiscouata-sur-le-Lac l'installation, le projet initial ciblait les deux stations. L'aide du gouvernement a donc été de 15 000 $. Mais nous avons réalisé que les systèmes entre les différentes stations devaient être compatibles et automatisés, donc reliés à Internet et ça, c’est encore un défi ici. Nous devions aussi ajouter des guérites et des barrières.»

    La MRC a donc opté pour un système concerté et les couts ont significativement augmenté. Le projet total pour la MRC se porte aujourd’hui à 1,5 M$ alors que l’aide financière se fait toujours attendre.

    «Actuellement, les tarifs exigés représentent le tiers de ce que ça coute à opérer. On ne parle pas d'implantation, mais de frais d'exploitation. (...) Le reste est assuré par les municipalités dont la majorité des revenus proviennent du compte de taxes et de fonds propres à la MRC via encore une fois les fonds éoliens. (…)», insiste Mathieu Lehoux.

    Quant à la différence de tarification entre résidents et non-résidents, qu’il soit journalier, annuel ou annuel sur deux lacs et plus, la différence s’explique par le fait que le non-résident débourse le cout réel. Le résident paie déjà via ses taxes foncières, souligne-t-il.

    Le maire de Dégelis rappelle qu’un non-résident titulaire d’un bail de quayage de trois mois à la marina est considéré comme un résident. «Même chose pour le résident d’un camping qui passe l’été là. Nous sommes conscients que ça ajoute des frais et que ça change des habitudes, on ne peut pas plaire à tout le monde. Le système n'est pas parfait, nous sommes à l'an un, mais nous avons voulu protéger le lac en encadrant son accès», poursuit M. Pelletier.

    La MRC de Témiscouata s’est elle-même inspirée de ce qui a été fait en Estrie, particulièrement à Lac-Mégantic. Les tarifs de lavage y sont les mêmes. Mais voilà que de nombreux pêcheurs et plaisanciers n’ont pas tardé à rapporter la nouvelle gratuité des stations de lavage pour 2024. Il faut savoir que les tarifs aux stations de lavage ont été temporairement abolis en raison d'une poursuite judiciaire des quatre municipalités qui ceinturent le lac Mégantic contre Orbility Canada, le fournisseur du système automatisé de lavage d’embarcations. Le système fonctionnant avec un code QR a connu des ratés depuis l’an dernier. Au Témiscouata, c’est l’entreprise General Tech qui a remporté l’appel d’offres.

    IMPACTS ÉCONOMIQUES

    De son côté, à l’instar de certains commerçants de Témiscouata-sur-le-Lac, Philippe Paradis a observé une baisse de ses ventes en magasin. Même situé à Saint-Pascal, soit une bonne heure de route du lac Témiscouata, La Salopette et l’Aventurier est un arrêt obligatoire pour certains pêcheurs de l’extérieur.

    «J’ai des clients qui m’ont avoué ne pas aller au Témiscouata cette année. Ces gens-là représentent des retombées pour l’économie locale. Ils ne font pas d’aller-retour de Montréal ou de Québec, ils font le plein dans les stations d’essence d’ici, ce sont des nuitées au Témiscouata, ils mangent dans les restos, ils consomment local.»

    Pour Tristan St-Pierre, du magasin J.A. St-Pierre à Témiscouata-sur-le-Lac, le dossier est complexe puisqu’il s’articule autour de la nécessité de protéger le lac, tout en préservant l’impact que la pêche et les activités de plaisance ont sur l’économie locale et régionale.

    «Oui, j’ai une baisse d’achalandage dans la section pêche du magasin. Il y a moins de pêcheurs cette année et le processus de lavage n’est pas optimal et peut certainement être bonifié. Toutefois, il ne faut pas oublier d’autres facteurs, comme l’inflation. Tout coute plus cher, les taux hypothécaires sont élevés et les familles disposent de moins de budget pour les loisirs et les vacances.»

    Une tempête parfaite donc, qui pourrait expliquer, du moins en partie, la diminution du nombre de plaisanciers et de pêcheurs observés sur le lac Témiscouata.

    Pour un couple qui s’installait au Camping Cabano, pas question d’apporter un bateau pour cette visite de trois jours. «Nous ne serions pas allés ailleurs [qu’au lac], mais il nous aurait quand même fallu nous rendre à Notre-Dame, le laver, le ramener ici pour le mettre à l’eau, et ça, c’est si on ne fait qu’un passage par jour sur le lac. Minimalement, c’est 150$ de frais de lavage, sans compter les aller-retour au centre PGR ni les frais de mise à l’eau. Pour nous cette année, c’est sans le bateau», a témoigné une habituée. Cette dernière se disait étonnée d’avoir réussi à obtenir un terrain d’ordinaire recherché et rarement disponible à ce moment-ci de l’année.

    Certains trouvent aussi dommage qu’à trop vouloir tout «régenter», la MRC de Témiscouata ait involontairement envoyé le message que le lac n’est plus ouvert à tous. Gustave Pelletier s'en remet donc au post-mortem de la saison estivale et à une assemblée qui se tiendra l’automne prochain où pourront être soumises les doléances, mais surtout des solutions. Le maire assure être en mode écoute… lorsque les propos se veulent respectueux et constructifs.

    Invité à commenter la baisse d’achalandage de certains commerces et entreprises de sa municipalité, le maire de Témiscouata-sur-le-Lac, Denis Blais, a préféré passer le témoin à son homologue de Dégelis, Gustave Pelletier. À noter qu’Info Dimanche a aussi tenté de joindre la Chambre de commerce du Témiscouata, en vain. Sa directrice générale, Martine Lemieux, n’a pas retourné notre appel. L’organisme n’a pas encore réagi à la situation. Soulignons que son conseil d’administration ne s’est pas réuni depuis son assemblée générale annuelle tenue en juin dernier.

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