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Dragage à Gros-Cacouna: des préoccupations entendues par le BAPE

durée 5 décembre 2024 | 06h59
  • Andréanne Lebel
    Par Andréanne Lebel

    journaliste

    La deuxième partie de l’audience du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur le programme de dragage d’entretien au port de Gros-Cacouna se déroulait le 4 décembre. Six intervenants ont soulevé des enjeux de sécurité, de rentabilité et de protection de l’environnement lors de leur participation à la réflexion concernant le projet à l’étude.

    Le premier à se faire entendre était Vincent Lanouette, vice-président de la Corporation des pilotes du Bas Saint-Laurent. Il a expliqué que l’ensablement graduel du port de Gros-Cacouna complexifie les manœuvres des pilotes. «À 8 mètres de tirant d’eau, c’est compliqué […] parce qu’on doit dépendre entièrement de l’onde de marée», précise-t-il. La Corporation des pilotes du Bas Saint-Laurent est en faveur du dragage. «Je pense qu’il est vraiment temps de ramener les profondeurs qui sont de l’ordre de 8 mètres en aval et certainement près de 10 mètres le long du quai, pour qu’un navire puisse rester accosté sécuritairement le long du quai», a-t-il conclu.

    De son côté, la vice-présidente politique ESG et initiatives futures chez QSL, Claudine Couture-Trudel, a fait valoir que les navires commerciaux qui se ravitaillent au port de Gros-Cacouna ne peuvent être remplis à leur pleine capacité de chargement. Il en résulte donc des répercussions économiques importantes qui affectent directement la compétitivité des entreprises.

    L’un des principaux utilisateurs du port, Groupe Lebel, indique dans son mémoire avoir investi 45 M$ dans son projet d’usine de granules de bois, Lebel Énergie. L’entreprise est propriétaire de son propre terminal de transbordement pour les granules de bois, qui compte une capacité d’entreposage de 33 000 tonnes métriques. Elle a été déterminée en fonction du volume maximal de chargement des navires, qui devait être de plus de 25 000 tonnes.

    «Cette information avait été validée à plusieurs reprises par les parties prenantes, compétentes, lors de la phase de développement de projet. Cependant, la situation actuelle nous laisse perplexes et ne nous permet pas d’atteindre cet objectif», explique Pierre-Olivier Morency, directeur croissance et innovation chez Groupe Lebel. Cette situation affecte la pérennité des opérations de l’entreprise et elle l’empêche de tirer le plein potentiel de ses investissements. Trois ou quatre navires de granules de bois sont chargés par année par Groupe Lebel, en direction de l’Europe. De 2 000 à 3 000 tonnes de chargement ne peuvent être transportées à bord des navires en raison du manque de profondeur d’eau.

    «Nous sommes d’avis que l’entretien [le dragage] devrait être fait de facto régulièrement. On ne peut pas construire une route et ne pas envisager de la déblayer l’hiver», image M. Morency.

    PRÉOCCUPATIONS ENVIRONNEMENTALES

    La représentante du Conseil régional de l’environnement du Bas-Saint-Laurent, Julia Santos Silva, est préoccupée par le faible taux de survie des veaux de bélugas. Le projet de dragage se déroulera dans l’habitat essentiel de cette espèce en péril. Cette population est sensible à l’augmentation de la concentration des matières en suspension dans l’eau, ainsi qu’au bruit et au trafic maritime. «Les changements de la turbidité de l’eau […] affectent à court terme les proies du béluga qui pourraient éviter de telles zones en raison des effets sur leur capacité visuelle. On sait que le secteur de Gros-Cacouna et de Rivière-du-Loup est important pour la reproduction et l’alimentation.»

    Mme Silva a rappelé que selon certaines modélisations, les critères en vigueur de la qualité de l’eau pour les matières en suspension ne seront pas respectés lors des opérations de dragage et du rejet des sédiments en eau libre, dans un site autorisé par Transports Canada à l’Anse-au-Persil, près de Rivière-du-Loup. Cette information avait été partagée dans une audience précédente du BAPE.

    «Il y a un manque de données terrain sur les panaches de sédiments générés par les activités de dragage. Cela pourrait permettre de prendre des décisions plus éclairées», a-t-elle complété. Deux autres intervenants citoyens ont partagé leurs inquiétudes concernant les effets du dragage sur la faune et la flore, dans une zone environnementale aussi sensible. 

    La première opération de dragage, prévue au port de Gros-Cacouna en novembre et décembre 2025, permettrait de retirer 60 000 mètres cubes de sédiments. Elle aura lieu pendant 25 à 30 jours en continu, 24 heures par jour. Le cout des travaux est estimé entre 2 et 3 M$. Deux autres opérations sont envisagées en 2028 et 2031.

    À la suite de l’audience publique du 3 décembre, la commission poursuivra son enquête. Elle rédigera son rapport, qui sera transmis au ministre responsable de l’Environnement au plus tard le 28 février. Ce dernier disposera ensuite de 15 jours pour le rendre public. En parallèle, le ministère de l’Environnement procèdera lui aussi à sa propre analyse environnementale. À la lumière des informations contenues dans ces deux documents, une décision sera prise ultérieurement par le conseil des ministres.

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