«Aucune inquiétude» à la SÉMER, même si le gaz naturel renouvelable a moins la cote
La Société d’économie mixte d’énergie renouvelable de la région de Rivière-du-Loup (SÉMER) ne s’inquiète pas du manque d’intérêt des consommateurs québécois à l’endroit du gaz naturel renouvelable (GNR). À quelques mois du début de la fameuse production de gaz naturel liquéfié à l’usine de Cacouna, la direction garde les yeux fixés sur l’avenir.
La semaine dernière, deux reportages de La Presse illustraient un contexte difficile pour la vente du gaz naturel renouvelable au sein du réseau d’Énergir, la principale entreprise de distribution au Québec. On pouvait y lire que le GNR «ne trouve pas preneur», notamment en raison de son cout «beaucoup plus élevé» que celui du gaz fossile.
Le quotidien revenait aussi sur une récente décision de la Régie de l’énergie qui interdit à Énergir d’obliger ses nouveaux clients à acheter du gaz naturel renouvelable. Un revers qui «remet en question la stratégie de décarbonation du distributeur gazier», a écrit la journaliste Hélène Baril.
Or, malgré ces nouvelles en apparence négatives, la SÉMER garde le cap, assure son président Michel Lagacé. Elle se concentre sur les prochaines étapes menant à la production de GNR (liquéfié) et elle a son approvisionnement au sein du réseau d’Énergir. Rien n’a changé.
«Il n’y a aucune inquiétude», a-t-il maintenu, plus d’une fois dans une entrevue de quelques minutes.
M. Lagacé assure, d’une part, que la SÉMER possède une entente signée avec Énergir concernant l’achat du gaz naturel produit. Un contrat qui s’échelonnera sur une durée de 20 ans à partir de la première livraison, a-t-il précisé. «On a un prix convenu, la durée de temps est convenue. Ce qu’on doit acheminer est convenu. Et c’est pareil pour toutes les autres entreprises qui œuvrent en biométhanisation», a-t-il déclaré, sans vouloir en dévoiler davantage.
Une simple revue de presse permet de retrouver les détails d’un accord survenu entre la SÉMER et Énergir en 2019. Il était toutefois question, à l’époque, de la production de gaz comprimé. «Il y a eu des modifications, notamment sur le prix qui est plus intéressant», a indiqué Michel Lagacé.
EXIGENCE DE QUÉBEC
Dans ce dossier, la SÉMER sera aussi aidée par une exigence imposée à l’entreprise par Québec, soutient le président de la SÉMER. D’ici 2030, 10 % du gaz transporté sur le réseau d’Énergir devra être du gaz de source renouvelable (GSR).
Actuellement, dans un rapport de ses activités 2023-2024 déposé à la Régie de l’énergie, Énergir soutient avoir atteint la cible de 2 % de livraison de GSR. Une bonne nouvelle, mais il va sans dire que plusieurs efforts devront être faits dans les prochaines années. La cible augmentera d’ailleurs à 5 % d’ici la fin de l’année 2025.
«Énergir aura besoin de la production de la SÉMER», a soutenu Michel Lagacé qui ne se préoccupe pas du manque d’intérêt actuel de la clientèle envers le GNR. «Il y a une orientation gouvernementale qui est claire : on doit s’affranchir des combustibles fossiles», a-t-il dit.
«Ça se peut qu’il n’y a pas de preneur au prix du renouvelable, mais il va tout de même se trouver dans les canalisations d’Énergir. Ce n’est pas une vue de l’esprit, c’est une demande. C’est inéluctable.»
Il voit aussi mal le gouvernement revenir sur cette obligation, d’autant plus qu’il est engagé – comme Énergir d’ailleurs – dans une démarche vers la carboneutralité.
ÉNERGIR
Interpellée directement sur la question, Énergir a confirmé la nécessité de l’entreprise d’acquérir davantage de GNR dans un avenir rapproché. «Énergir aura besoin de tous les projets québécois qui sont présentement en activité et ceux qui se développeront au courant des prochaines années», a fait savoir Jade Gratton, porte-parole pour Énergir.
En date d’aujourd’hui, neuf projets québécois injectent dans le réseau du distributeur québécois. De ce nombre, quatre sont en construction et une trentaine de projets supplémentaires (incluant la SÉMER) ont reçu une subvention gouvernementale pour réaliser une étude ou pour entamer des travaux.
«Le Québec a tout intérêt à développer cette filière nécessaire à la décarbonation et à la résilience de notre système énergétique. Et c’est d’autant plus vrai aujourd’hui dans le contexte économique et politique actuel. Notre province peut et a le potentiel pour produire du GNR localement.»
Elle assure qu’Énergir «demeure pleinement investie pour développer le plein potentiel de la filière du GNR au Québec». En exemple, elle rappelle le développement d’une station multiutilisateur de réception et d’injection de gaz porté à Saint-Flavien dans Chaudière-Appalaches. Cette station, dit-elle, vise à favoriser l’émergence de nouveaux projets de production de GNR situés à une plus longue distance du réseau gazier, comme la SÉMER.
DÉBUT DE LA PRODUCTION
Au lieu d'enfouissement technique de Rivière-des-Vases, la direction de la SÉMER est toujours en attente du turbodétendeur, la pièce la plus importante du processus permettant la production de GNL. Un délai de livraison d’un an était nécessaire après l’achat.
«Les travaux de préparation vont être lancés avant l’été et ils se poursuivront durant la saison estivale», a soutenu Michel Lagacé.
La production du gaz naturel de la SÉMER est prévue pour octobre ou novembre 2025.