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Marc Jean, l’inventeur musical de Saint-Mathieu-de-Rioux

durée 28 avril 2018 | 06h55
  • Andréanne Lebel
    Par Andréanne Lebel

    journaliste

    C’est à Saint-Mathieu-de-Rioux, dans les Basques, que se trouve l’un des meilleurs fabricants de ligatures de saxophone et de clarinette au Canada. Marc Jean a expédié ses créations haut de gamme spécialisées à des instrumentistes de 59 pays jusqu’à maintenant.

    Après avoir travaillé pendant plus de 20 ans dans le domaine de la réparation d’instruments de musique dans la région de Montréal, il a décidé de faire un retour aux sources en s’établissant à Saint-Mathieu-de-Rioux, dans les Basques, il y a cinq ans. «Ça ne m’a pas fait de peine de quitter la grande ville, j’avais l’impression de manquer d’air. J’avais une boutique à mon compte à Longueuil. Je l’ai fermée et je suis parti avec les outils. J’avais déjà commencé à travailler sur mon projet de ligature», explique Marc Jean, qui a fondé sa compagnie, Musique de Marc en 2005.

    LE PRINCIPE

    Un saxophoniste l’a approché en lui demandant pourquoi c’est le hautbois qui donne la note d’accord aux orchestres symphoniques. «Étant donné que c’est un instrument à anche double, il se dégage plusieurs harmoniques qui permettent à tous de s’accorder, c’est un son très riche», explique-t-il. Il a voulu recréer le principe de ces deux bouts de bois qui vibrent en harmonie, sur un saxophone qui utilise une seule anche. «J’ai créé 21 prototypes de ma ligature avant de trouver les bons angles, la bonne courbure. Ça m’a pris deux ans à peaufiner la première génération de ligatures.» M. Jean a aussi acheté un brevet américain pour officialiser son invention, ce qui lui a couté plus de 8 000$.

    Il fabrique maintenant des ligatures de deuxième génération. L’anche, un bout de bois apposé sur le bec de l’instrument qui créée les vibrations du son, repose sur un autre bout de bois de grenadille, lié avec une pièce de métal circulaire, ce qui lui permet de vibrer avec une résistance minime. «Ça crée une caisse de résonnance supplémentaire et nous permet de dégager deux fois plus d’harmoniques». La nouvelle version de la ligature Marc Jean, sortie il y a moins d’un an, a trouvé preneur à plus de 800 reprises jusqu’à maintenant. «Je gère quelque chose de beau».

    Depuis son retour dans les Basques, il travaille depuis dans son atelier situé au sous-sol de sa maison avec un autre employé à temps complet, «un jeune plein de talent», Emmanuel D’Auteuil de Saint-Mathieu également. Ils utilisent une multitude de machines pour la soudure, le plaquage, la gravure, la confection de bouts de bois, la coupe, le polissage, autant d’étapes pour en arriver avec un produit fini que les musiciens professionnels s’arrachent. «Mes ligatures sont compatibles avec 174 becs différents pour saxophone et clarinette, j’ai entre 20 et 30 modèles», souligne le créateur.

    PASSION POUR LA RÉPARATION

    Il a commencé à réparer des instruments alors qu’il jouait de la musique avec ses amis, au secondaire. Marc Jean avoue qu’il s’agissait d’une manière d’économiser, puisque recourir au magasin de musique commençait à couter cher. «J’ai eu un déclic quand je suis allé porter un de mes instruments à vent chez le réparateur. Quand je l’ai récupéré, il était pire qu’avant. J’ai réalisé que j’étais capable de faire mieux que lui. J’ai toujours été un ‘’patenteux’’», raconte-t-il. Il a travaillé dans plusieurs magasins de musique qui avaient entendu parler de ses compétences. Ce dernier s’est par la suite rendu à London en Ontario pendant deux ans pour apprendre le métier de réparateur d’instruments, une école formatrice mais exigeante.

    Marc Jean a par la suite travaillé chez Twigg comme réparateur d’instruments pendant 17 ans à Montréal. «J’ai toujours aimé faire de la recherche et du développement. Je faisais des adaptations d’instruments pour les musiciens à qui il manque des bouts de doigts ou qui ont certaines particularités physiques, des systèmes de clés modernisés, par exemple. Quand on avait des demandes spéciales, les clients m’étaient référés».

    CRÉATIONS

    Lorsqu’on lui demande comment il fait pour imaginer et faire des liens pour arriver à créer ces accessoires pour les instrumentistes, il a une réponse bien simple. «Dans ma tête, ça n’arrête jamais. Je suis un peu fou», une folie qui fait fureur chez les musiciens. Marc Jean peut désormais vivre de la vente de ligatures, et il continue également de réparer quelques instruments à l’occasion.

    Une autre de ses inventions est la «Tornado Flute Booster», une petite pièce métallique à peine plus grosse qu’un 10 sous qu’on insère dans la tête de la flute. Il s’y trouve un petit espace où s’accumule de la salive de l’instrumentiste, et où peu d’air circule. «La partie surélevée est à l’image de la base d’une tornade et modifie la trajectoire de rotation de l’air dans la flute, tournant plus rapidement», simplifie-t-il. Marc Jean est loin de s’arrêter, il a encore dans sa poche arrière plusieurs projets plus créatifs les uns que les autres. Il fabrique aussi des barillets de clarinette conçus à partir de bois d’orignaux tombés au sol, «l’ivoire du Québec», comme il le décrit à la blague.

     

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