Dernier tour de piste?
Nous sommes en 1972, au cœur de la Guerre froide. Claude Dumont quitte le Québec pour l’Allemagne, dans la ville de l’Ahr. En trois semaines, il doit peindre une dizaine de toiles, dans un environnement qui lui est totalement inconnu, entouré de soldats et de machines de guerre.
Mais il a de grands alliés : son imagination et son talent. Cette expérience, qui a marqué sa vie et sa carrière, il la relate aujourd’hui avec minutie. Il en a gardé de profonds souvenirs. Trente-sept ans plus tard, cette histoire refait surface et pourrait être en quelque sorte le couronnement de la carrière de ce grand peintre de renommée internationale. À 77 ans, alors que le temps lui a glissé entre les doigts, l’heure de la retraite approche. Il pourrait bien s’agir du dernier tour de piste.
C’est grâce au Programme d’aide des Forces canadiennes aux artistes civiles (PAFCAC) que l’artiste peintre Claude Dumont est invitée en 1972 à se rendre en Allemagne pour y peindre une dizaine de toiles. « C’était stressant » nous raconte l’homme avec beaucoup de sagesse. « Je n’avais plus de repère. J’étais seul. J’avais le sentiment de représenter le Québec. Il ne fallait pas que je me trompe. Je suivais les soldats et j’ai pris confiance en moi. Je me suis dit, je vais faire ce que je peux. »
À son grand bonheur, quatre toiles issues de cette grande aventure sont sélectionnées et prennent la direction du Musée de la guerre à Ottawa. « Ça m’a donné du prestige. C’est bon pour l’égo. Ça m’a beaucoup aidé pour ma carrière par la suite. Ça m’a ouvert des portes, des collectionneurs. Ça été une de mes belles expériences de carrière. C’était un beau défi de me mesurer à quelque chose de différent. »
En 2009, 37 années se sont écoulées, mais les souvenirs demeurent toujours aussi présents. Assis devant moi, il en parle comme si c’était hier. Mais ce n’est pas à tout hasard si l’on se remémore ces souvenirs. En fait, Claude Dumont vient tout juste d’apprendre que l’une de ses toiles parcourra le pays dans le cadre d’une exposition intitulée « Sur le vif – L’art militaire de la Corée à l’Afghanistan. Cette exposition a été organisée par le programme des expositions itinérantes du Musée canadien de la guerre et du Musée canadien des civilisations en partenariat avec la Direction – Histoire et patrimoine, ministère de la Défense nationale.
Elle visitera notamment des villes de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick, de la Colombie-Britannique et de l’Alberta. Et Claude Dumont en est visiblement très fier. « Ça me couronne une fin de carrière. C’est la gloire d’être un artiste. »
Eh oui, le temps court et l’artiste, qui a gagné en sagesse, songe bientôt à ranger ses pinceaux. Mais la page n’est pas encore tournée. La passion lui revient vite lorsqu’il nous fait visiter la magnifique galerie qu’il a aménagée dans sa demeure de Trois-Pistoles. Et cette passion s’accentue lorsque nous avons le privilège de traverser les murs de son atelier situé au deuxième étage. Dans cet endroit unique se côtoient pinceaux, croquis, toiles et une magnifique vue sur le fleuve, celui qui l’a tant inspiré et qui l’inspire toujours. Difficile de croire que cette magie qui l’habite pourra s’éteindre.
Certainement pas complètement puisqu’il a des idées plein la tête. Bien plus, il a un plaisir fou à accueillir les gens, chez lui, et à leur faire visiter son petit coin de paradis tout en dévoilant les petits secrets que cachent ses œuvres. En sa compagnie, le temps n’existe plus. Une rencontre avec cet artiste fascinant, c’est un cadeau à s’offrir, une expérience inoubliable avec un grand homme qui a connu une carrière exceptionnelle.
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