Un cœur pour les aimer tous
À l’enfance dans la grange de son grand-père, Jaimie Lapointe dessinait. Avec ses crayons, elle s’imaginait une famille, une grande famille composée d’un petit tas de garçons et d’un petit tas de filles. Pour ses 12 enfants, elle avait tracé des dortoirs où ils pourraient coucher et une vieille maison jaune où ils seraient tous ensemble. Un rêve chéri depuis longtemps et qui n’est pas bien loin de sa réalité d’aujourd’hui.
Jaimie Lapointe et ses 10 enfants habitent une maison centenaire jaune dans le haut de la ville de Rivière-du-Loup. En entrant, les grelots de Noël autour de la poignée résonnent, plusieurs paires de chaussures sont cordées en rangs, beaucoup de manteaux sont accrochés au mur, des bas de Noël sont toujours attachés à la rampe d’escalier, puis en arrière-plan, des paroles sont échangées.
Déjà, la chaleur de la maisonnée se fait ressentir, l’amour partagé entre les membres de la famille se perçoit instantanément. Les plus vieux se trouvent à la cuisine en train de préparer le repas du soir en parlant de leur journée, deux autres écoutent la télévision, les plus jeunes s’amusent ensemble au salon. Tous sourient, s’entraident avec leurs devoirs, jouent, ce qui réjouit la mère de 42 ans.
Enfant unique, elle a été élevée par sa grand-mère qui a eu six enfants. À l’adolescence, elle s’est retrouvée en famille d’accueil et en centre dans un foyer de groupe. «Je trouvais ça tellement génial de me dire que tout le monde était différent, mais que tout le monde habitait ensemble», se remémore-t-elle. Le mouvement, l’énergie provenant de toutes ces personnes l’ont nourrie et lui ont donné le goût d’être entourée.
Ainsi, chaque jour elle est remplie de bonheur aux côtés d’Amy (24 ans), Jolimie (22 ans), Heïdi (21 ans), Vincent (19 ans), Rosalie (17 ans), Téo (14 ans), Maïthée (13 ans), Ulysse (10 ans), Léo (6 ans) et Eugénie (3 ans). Après avoir eu sa première fille à 18 ans, Jaimie Lapointe est tombée en amour. «C’est un sentiment que tu ne peux pas avoir avec autre chose», soutient-elle.
UN RÊVE À DÉFIS
Pendant la période des Fêtes, Jaimie Lapointe a fait la manchette du Journal de Québec à propos des manières de passer à travers un contexte inflationniste en ayant une famille de 10 enfants. La capacité d’organisation et de débrouillardise de cette mère a impressionné la province, mais a surtout rappelé les familles nombreuses des années 1960.
Lorsque Jaimie Lapointe partage le nombre d’enfants qu’elle a eus, les gens sont souvent estomaqués. Pourtant, quand la Louperivoise a retourné la question à une dame âgée qui a donné naissance à 12 enfants, cette dernière lui a dit que c’était plus facile dans son temps. Mme Lapointe, ne partage pas le même avis. Elle soutient que la réalité n’était pas la même, les femmes ne pouvaient utiliser des couches, des voitures, de chauffage électrique, notamment. L’épicerie n’était pas aussi développée qu’à ce jour et les mères n’avaient pas accès à une garderie. «Il n’y avait tellement pas de commodités que ces femmes-là ont gagné leur ciel 20 fois comparativement à moi. Je trouve ça super facile, moi».
La mère monoparentale a déménagé à Rivière-du-Loup il y a quatre ans afin de permettre à ses enfants de se développer dans leurs sports, d’être plus près des services et d’être située entre les villes où habitent ses enfants majeurs. À ce jour, Mme Lapointe a encore huit enfants à charge, dont six restent quotidiennement à la maison.
Selon elle, une des clefs pour y arriver est l’organisation. Mensuellement, elle s’assoit et prend le temps de planifier le mois complet : les heures à ses deux emplois, ses congés, les activités parascolaires, les sports, etc. «Tout est tellement structuré, organisé que ça me donne vraiment du temps pour faire autre chose», assure-t-elle. Sa méthode acquise au fil des années se résume en un agenda et un calendrier familial où chaque enfant a une couleur. Mme Lapointe travaille aussi très tôt, ce qui lui permet d’être à la maison en début d’après-midi, de décompresser, de préparer les repas et d’effectuer des tâches ménagères.
La mère de famille indique que tout est dans la façon de voir les choses. Même si elle a plusieurs enfants, elle ne se prive pas, ne s’empêche pas de faire des activités, de s’entrainer et de faire du bénévolat. «Si je trouve le temps, tout le monde peut trouver le temps», partage-t-elle. Elle souhaite propager ce message aux parents qui seraient à bout, découragés. «Pour moi c’est tellement naturel que je n’ai pas l’impression d’être en train de faire quelque chose d’exceptionnel. Je veux donner espoir aux gens, leur dire gens qu’ils sont capables de passer à travers, qu’ils peuvent tout faire. Je veux leur donner un second souffle».
Ce second souffle, elle souhaite aussi l’offrir à sa maison ancestrale, le foyer de ses rêves qu’elle a acquis pour ses enfants pour convenir à tous leurs besoins. Lorsque celle-ci finira par se vider de ses petits tas d’enfants, elle se remplira à nouveau de jeunes puisque Jaimie Lapointe désire être famille d’accueil pour des adolescents de la Gaspésie qui veulent s’inscrire en sport-études. Ainsi la Louperivoise n’a pas fini d’être entourée et de donner de l’amour à tous les enfants qui passent sur sa route.
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