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Malade d’avoir mal

durée 23 février 2013 | 09h51
  • Rivière-du-Loup - Elle revient comme une décharge électrique, un élancement ou un coup de poignard : et la douleur neuropathique se soigne mal. Associée à de l’hypersensibilité, elle peine encore à se faire reconnaître comme la maladie qu’elle est.

    Un bain de douleur où plonge une personne sur 15, soit 500 000 Québécois. «Il faut démythifier cette maladie. Les gens souffrent d’un mauvais fonctionnement des nerfs du système de perception de la douleur. Parfois, quand on cherche à les soulager, on empire le problème», relève le neurobiologiste Yves De Koninck, directeur scientifique du Réseau québécois de recherche sur la douleur.

    La morphine que l’on donne pour soulager produit en effet chez ces hypersensibles l’effet contraire: elle augmente la sensibilité à la douleur. L’équipe d’Yves De Koninck a démontré que cet opiacé agit sur les neurones qui transmettent normalement le signal de la douleur au cerveau: autrement dit, il dérègle le mécanisme de régulation chez ces malades.
    Chez eux, le traitement provoque une cascade d’évènements: l’inflammation des cellules microgliales —impliquées dans la signalisation de la douleur— libère des molécules (BDNF) qui entrent en conflit avec le mécanisme d’inhibition de la douleur, réalisée normalement par la KCC2.

    Cela bloque alors la bonne régulation du «signal» de douleur. «Il n’y a plus de contrôle. Les signaux de douleur parviennent constamment au cerveau, même lorsque la source de douleur est absente», explique le chercheur de l’Institut universitaire en santé mentale de Québec.

    Yves De Koninck reste toutefois confiant car sa découverte montre une piste possible: administrer une médication combinant opiacé et des molécules qui stimuleraient le KCC2 lorsque nécessaire.

    Quand le traitement cause le mal

    Diabète, sida, zona, traumatisme nerveux ou suites d’un traitement médical, les racines du mal s’avèrent multiples et inattendues. Difficile à circonscrire, cette lancinante douleur peut être centrale (moelle épinière) ou périphérique: au centre de vos poignets, à la surface de votre peau…

    De plus, le corps s’adapte, en inhibant et facilitant en même temps le signal des récepteurs de la douleur. Il régule alors les effets du traitement que l’on administre à celui qui souffre (voir notre texte).

    Ce qui pousse le chercheur québécois à douter du traitement universel. «Il n’y aura pas de pilule miracle pour tous. Plutôt une personnalisation du traitement antidouleur», explique-t-il. Le Réseau québécois de recherche sur la douleur administre d’ailleurs un registre Québec Douleur pour mettre en lumière ce mal caché.

    70% des personnes souffrant de douleur neuropathique vivent en retrait et ne participent plus aux activités familiales. La douleur mine leur qualité de vie. «C’est le problème numéro un, même chez les paraplégiques. Et une douleur enfouie ou mal traitée ne peut qu’empirer et miner la vie de la personne», martèle Yves De Koninck.

    Source : Isabelle Burgun, Agence Science-Presse



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