Le «skating», une discipline qui séduit les amateurs de ski de fond
Dans les sentiers du club de ski de fond Amiski de Saint-Antonin, on les remarque rapidement. Libres et dégourdis, ils ont une glisse impressionnante et ils avancent à toute allure. Leur technique est souvent très belle, à un point tel que tout semble facile. Surtout, ils donnent le gout de s’y mettre et d’essayer à son tour. Ils pratiquent le «skating» ou le «pas de patin», une discipline qui branche de plus en plus d’adeptes, dont les plus jeunes.
Pourtant, le style n’est vraiment pas nouveau. En fait, il a pris son envol dans les années 80 après que de grands fondeurs internationaux, dont le Suédois Gunde Svan, aient commencé à donner «des coups de patin» en dehors des sillons afin de prendre de la vitesse lors de compétitions.
«Le skating, c’est une discipline plus technique que le ski de fond de style classique qui rappelle un peu le patin à glace, explique Philippe Côté, membre du conseil d’administration du club Amiski. On avance grâce à des poussées latérales. Contrairement au classique, le mouvement n’est pas dans l’axe du corps, alors c’est un peu moins naturel. C’est plus exigeant, plus complet musculairement aussi, mais on bénéficie d’un beau sentiment de liberté.»
Autrefois pratiqué par une certaine élite sportive, des fondeurs avertis et des biathlètes, le «pas de patin» - appelé aussi «ski de patin» - intéresse aujourd’hui une plus large proportion d’adeptes. La discipline jouit d’un élan particulièrement fort depuis quelques années, au Québec, comme ailleurs.
«Il y a vraiment un engouement marqué en ce moment, concède celui qui s’exerce dans les deux styles depuis une vingtaine d’années. Le nombre de fondeurs qui pratiquent les deux disciplines, le classique et le pas de patin, est en hausse. On en entend beaucoup parler, on voit qu’il y a un fort intérêt.»
À Saint-Antonin, cette volonté des amateurs d’essayer le «skating» ne se dément pas et s’exprime directement sur la douzaine de kilomètres de pistes linéaires accessibles. On estime actuellement à plus de 35 % la proportion des membres qui le pratique. C’est ainsi plus de 200 personnes (ce qui est peut-être même conservateur) qui s’en donnent à cœur joie dans les sentiers.
«Et on peut penser que ce sera en progression, ajoute Philippe Côté. On constate une belle augmentation du nombre de membres cet hiver. Ils commencent avec le ski classique et c’est l’idéal, mais pour certains, ce n’est qu’une question de temps avant qu’ils essaient le ski de patin. On le voit aussi du côté de la location de l’équipement nécessaire, il y a une hausse des demandes. Les gens sollicitent également davantage de cours privés.»
La popularité du «skating» provient, selon les amateurs, de l’engagement physique qu’il génère. La technique de glisse demande beaucoup plus d’efforts que le ski de fond en style classique, la discipline ancestrale qui permet un meilleur équilibre entre l’effort et la contemplation. Ainsi, les «patineurs» en soufflent un coup, mais ils sont cependant récompensés par une glisse plus longue et une sensation de vitesse grisante.
Avec une technique à point et quelques fortes poussées, le skieur – ou patineur – réussit à créer un momentum qui l’aidera à la poursuite de sa randonnée. Lorsqu’il est bien effectué, le mouvement est fluide et élégant. Rapidement, les arbres se mettent à défiler à gauche et à droite. En forêt, l’expérience est unique.
«C’est plus dynamique et énergique. La liberté de ne pas être pris dans des traces nous amène à faire ce qu’on veut finalement, à pousser un peu plus par exemple […] C’est mon choix quand j’ai envie de me dépenser», explique Stéphane Perreault qui pratique la discipline depuis sa jeunesse et qui donne maintenant des cours à de jeunes élèves de l’école de ski Amiski. Il confirme que le style a aussi la cote du côté de cette clientèle, bien au fait de son existence et de ses qualités.
«Quand ça va bien et que les conditions sont bonnes, le skating offre vraiment un beau ‘’feeling’’ de glisse», poursuit à son tour Daniel Talbot, vice-président du club Amiski. «Et on ne passe pas inaperçus! Régulièrement, les gens en style classique s’arrêtent pour nous regarder passer. Ils trouvent ça beau et ils ont envie d’essayer. Ils trouvent que ça semble bien aller.»
Au club Amiski, les adeptes du ski de fond classique et ceux du ski de patin se côtoient dans un large corridor d’environ 22 pieds (dont près de 14 sont dédiés au skating). Cela permet à deux personnes au style différent d’effectuer une randonnée ensemble ou non loin l’une de l’autre. C’est aussi un bon moyen de faire connaître le ski de patin, comme le constatent les responsables du club.
Sur place, le pas de patin est possible depuis quelques années, et déjà, on souhaite ajouter de nouveaux kilomètres praticables. Le terrain de jeu devient fort intéressant. «Quand on a amené le ski de patin ici, on voulait permettre les deux ensemble pour faire découvrir aux gens ce style-là et justement créer un engouement. Nous sommes heureux que ça fonctionne», lance Daniel Talbot.
Plus populaire que jamais, le ski de fond a été redécouvert par plusieurs cet hiver. En ces temps incertains, le sport offre pourtant la certitude d’un beau moment, passé seul ou entre amis, à la conquête de la forêt et de son tapis blanc.
ÉQUIPEMENTS UNIQUES, CONDITIONS ADAPTÉES
Téméraires avertis, il ne suffit pas de sortir des traces avec ses skis de style classique afin de se lancer dans une randonnée de style libre, une poussée à la fois. Bien qu’il soit techniquement possible de pratiquer le «skating» avec un équipement standard, il est (très fortement) conseillé de s’équiper convenablement.
Plus courts et plus rigides pour faciliter les mouvements, les skis destinés au «skating» sont aussi composés uniquement d’une zone de glisse sur toute la longueur de la semelle (on y applique une cire de glisse comme en ski alpin). Quant aux chaussures, elles sont aussi plus rigides et offrent un meilleur maintien de la cheville afin de faciliter le passage d’un pied sur l’autre, alors que les bâtons sont plus longs pour aider à l’équilibre, au support et au maintien du rythme. Pour un bon équipement, il faudra débourser en moyenne plusieurs centaines de dollars.
Quant aux conditions de neige, le «skating» se pratique sur une piste damée dédiée à la glisse. Le style libre est idéal quand la surface, pas trop molle, a été travaillée par la soleil et que la température se rapproche de zéro. Autrement, le ski de fond de style classique sera à privilégier. La bonne nouvelle ? Le mois de mars est souvent une belle période appréciée des amateurs.
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