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Au fil des ans, M. Dancause a aménagé le pre- mier bâtiment en atelier, puis, par manque d’espace, a adapté la grange aux besoins de son entreprise grandissante. Cependant, sa propriété étant située en zone verte, M. Dancause ne pou- vait aller de l’avant avec son projet. Il mentionne que sur une terre agricole, il est impossible de vivre d’autre chose à grande ampleur que l’agri- culture, d’après la Loi sur la protection du terri- toire et des activités agricoles de la CPTAQ. «Au Québec, si tu es en zone verte, tu n’as pas le droit de vivre. Tu ne peux pas avoir de com- merce», s’exclame-t-il. Heureusement, l’artisan a obtenu une dérogation lui autorisant ses activités commerciales puisque sa terre est majoritaire- ment en friche et en forêt. Il a reçu son autorisa- tion il y a plus d’une quinzaine d’années. Il se désole que ce ne soit pas tous les artisans qui aient cette même chance. Son chez-soi, le vent qui y souffle, les oiseaux qui y chantent, sa terre à perte de vue avec ses chiens qui y courent constituent des éléments clefs dans l’inspiration et la création de l’artisan. À toute heure de la journée, il est libre de décider de ses faits et gestes : son temps et son espace lui appartiennent. Lauri Dancause souhaite que plus de gens puissent vivre comme lui en campa- gne en vivant de ce qui les anime, la terre faisant partie prenante de l’expérience offerte aux visiteurs. UNE LOI TROP STRICTE? Au départ, la loi avait été implantée pour protéger le territoire agricole des promoteurs dans les grandes villes du Québec. M. Dancause explique qu’une personne n’exerçant pas d’agri- culture à grande échelle ne peut vivre à la campa- gne puisque ses activités peuvent nuire à l’agri- culture. Il indique que les artisans vitalisent la région sans causer de tort, lui qui réside en municipalité dévitalisée. Selon ce dernier, une exception devrait être faite pour les métiers d’art, puisqu’en ce moment, avec l’obliga- tion de faire de l’agriculture, les campagnes se vident. «En ce moment, je récupère des gran- ges abandonnées pour leur don- ner une seconde vie, mais il y a encore mieux que ça… C’est qu’il y ait du monde qui les utilise pour exercer leur art», confie l’artisan. Il croit que la loi est allée trop loin en interdisant à toutes industries ou activités commerciales autres que l’agriculture de s’installer en campagne. Il raconte qu’à une époque, les cultivateurs et artisans vivaient ensemble. Le forgeron, le char- pentier, l’ébéniste aidaient tous l’agriculteur dans son travail. «Le Québec rural et agricole s’est forgé avec les artisans», avance M. Dancause, assurant que sans eux, l’agriculture ne serait pas aussi développée. Il ajoute que l’existence du phénomène en Ontario : les gens se rendent dans un rang et en ressortent avec du vin, du fro- mage, une planche à découper, des vêtements. Mais encore mieux : ils repartent avec le souvenir des discussions échangées, l’image des endroits visités, puis se trouvent ins- pirés à leur tour. UNE SOLUTION AUX DÉFIS ACTUELS ? À l’ère des défis environne- mentaux, de la promotion de l’autosuffisance alimentaire, des enjeux de santé mentale, des difficultés sanitaires, l’artisan se demande si le gouverne- ment ne pourrait pas faire mieux en matière de protection du territoire agricole. À la place d’avoir des terres dévitalisées, il pourrait y avoir de la vie pour des agriculteurs à petite échelle, des couturiers, des maréchaux-ferrants, des pein- tres, et bien d’autres métiers d’art. «J’espère que beaucoup d’entre eux puissent aussi exercer pleinement leurs arts côte à côte. Trop souvent contraints à abandonner leurs rêves de pouvoir vivre décemment de leur talent, dû au coût trop élevé de la vie, puis étant souvent obligés de se relocaliser dans le but de protéger l’activité agricole», indique Lauri Dancause. Avoir un atelier en campagne versus en ville est une énorme différence, surtout sur l’inspiration d’un artisan. Qu’y a-t-il de plus inspirant entre des garages tous pareils, puis de la nature partout, peu importe où l’œil se pose? La loi actuelle étouffe les artisans d’aujourd’hui, les empêche de s’émanciper. Il aimerait que la campagne ne serve pas seule- ment pour ceux qui y vont pour mourir, mais pour les jeunes qui voudraient la vitaliser et vivre de leur talent. Lauri Dancause est reconnaissant d’avoir pu réaliser son métier, sa passion tran- quillement chez lui, mais rêve d’un territoire vivant rempli de citoyens travaillant de leurs mains et s’entraidant. Il croit vraiment qu’une telle alternative pourrait être une manière de sur- vivre aux maux qui sévissent dans la société d’aujourd’hui. Le plaidoyer de Lauri Dancause pour des campagnes revitalisées PHOTO: LYDIA BARNABÉ-ROY • LYDIA BARNABÉ-ROY Initiative de journalisme local [email protected] Dans un petit coin de la MRC de Rivière- du-Loup, à Saint-Paul-de-la-Croix, un arti- san vit de sa passion depuis 22 ans. Lauri Dancause de Meubles Dancause crée des meubles rustiques haut de gamme sur mesure sur son lopin de terre où sont logés sa maison, une grange, un jardin et un autre bâtiment. L’homme de 56 ans se considère chanceux d’avoir pu exercer son talent chez lui toutes ses années et souhaite cette liberté de s’implanter dans un milieu agricole à tous les arti- sans. «J’espère que beaucoup d’entre eux puissent aussi exercer pleinement leurs arts côte à côte. » - LAURI DANCAUSE Rdlenspectacles.com 418 867-6666 1151092322 INFODIMANCHE • LE 8 JUIN 2022 7 ACTUALITÉ

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