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Je suis chirurgienne à l’Hôpital Notre-Dame du Lac depuis bientôt neuf ans. Je vous écris, car je suis très inquiète pour l’avenir des soins de santé au Témiscouata. En tant que mère de trois enfants, utilisatrice du système de santé, méde- cin et conjointe d’un médecin, j’ai vraiment de la difficulté à entrevoir avec optimisme l’avenir de nos soins, chez nous. Nous avons appris cette semaine que notre milieu ne pourrait plus accueillir ni femmes enceintes, ni nouveau-nés, à cause de la pénurie de personnel. Ce bris de service prolongé englobe toute la saison estivale, soit du 24 juin au 9 septembre. Au moment d’écrire ces lignes, il n’est pas encore affiché sur le site du CISSSBSL, mais nous avons d’or et déjà débuté le transfert de patientes, et pour ma part, sans que j’aie eu l’opportunité de m’impliquer dans la décision. J’ai appris que mes césariennes électives prévues les prochaines semaines seraient annulées et auto- matiquement transférées à Rivière-du-Loup. Je comprends que bien des efforts ont été probablement déployés en amont pour tenter de résoudre la situation, mais les problèmes datent de bien avant la rupture prolongée. Déjà durant la dernière année, les fins de semaine sont sou- vent en découverture en obstétrique, forçant les patientes à se déplacer à Rivière-du-Loup et les médecins accoucheurs à faire des prouesses avec leurs horaires pour maximiser les opportuni- tés des patientes pour donner naissance dans leur milieu. Et malgré tout, nous en sommes là, à devoir fermer un service pour un été complet. Comme médecin, comme femme, comme parent, comme utilisatrice, je me demande quelle sera la prochaine diminution ou perte de service. Mon département au bloc opératoire travaille à personnel réduit et ne fait pas de bris de service grâce entre autres à la présence de main- d'œuvre indépendante, les soins intensifs de l’hôpital sont eux-mêmes sous respirateur, nous ignorons ce qui nous attend à l’automne quand les infirmières étudiantes retourneront sur les bancs d’école, nous avons des lits fermés depuis plusieurs mois (mesure qui devait être tempo- raire), nos services de laboratoire ont grande- ment diminué. Pourtant, quand j’ai signé mes privilèges pour travailler au CISSS du Bas-Saint-Laurent, il est bien écrit que l’établissement doit me fournir «les ressources raisonnables nécessaires pour exer- cer [ma] profession, satisfaire aux obligations rattachées à [mes] privilèges et répondre aux besoins de [mes] patients». Je respecte ma part de l’engagement, je suis de garde et disponible pour mes collègues, j’offre un service dans les règles de l’art; et pourtant, je n’ai pas le retour de balancier de l’établissement. La plupart des demandes d’aide de la part de ceux qui sont sur le plancher tombent souvent dans l’oubli, parfois même sans accusé de réception de la part de l'établissement. Mme Dionne, nous avions déjà discuté d'une demande de troisième poste dans ma spécialité. Sachez que finalement, bien que cet ajout aux effectifs aurait permis des écono- mies au système, aurait pu éviter le recours au dépannage et aurait assuré la continuité des soins, l’établissement a décidé de ne pas soutenir notre demande et a préféré adresser d’autres enjeux. Cela donne définitivement l’impression que notre milieu n’est pas prioritaire, que nos patients ne sont que des pions qui n’auront qu’à se déplacer plus loin, vers des centres qui sont déjà débordés eux aussi. De nombreux exemples de cette tendance à la centralisation se sont vus dans les dernières années. Peu de gens oseront parler sur la place publi- que. Il règne dans le système de santé une peur d’être réprimandé pour avoir osé dire la vérité, avoir montré l’autre facette, celle du terrain. On y trouve des gens dévoués, qui aiment leur profes- sion, qui ont à cœur de bien soigner leurs patients. Des gens qui sont aussi fatigués, inquiets, qui se font envahir jour après jour de nouvelles procédures, de formulaires, de con- traintes de toutes parts, de coupures budgétai- res. C’est normal que les individus regardent ailleurs et cherchent à quitter le système. Plusieurs ont de bonnes idées pour améliorer les choses, mais nous sommes souvent empêchés de les mettre en place. C’est un système où il est dif- ficile de mettre ses limites, car on nous en demande toujours plus, avec moins. Je suis convaincue que plusieurs de mes collè- gues Témiscouatains, toutes professions confon- dues, partagent mes inquiétudes. Plusieurs n’oseront jamais parler. Je me suis déjà fait sug- gérer de «ne faire que mes petites affaires, pour ne pas avoir de problèmes», mais comme méde- cin, j'ai un engagement envers la population que je dessers. Et actuellement, on ne nous fournit plus les ressources pour honorer cet enga- gement. Je vous invite donc à soutenir un maillon important pour notre région, votre région ; votre Hôpital de Notre-Dame-du-Lac. Nos soins sont souffrants, nos soignants sont inquiets et notre personnel a besoin d’oxygène. Merci de nous soutenir par tous les moyens possibles, Emilie Desrosiers, MD, FRCSC Chirurgienne-générale, Hôpital Notre-Dame-du-Lac Chargée d’enseignement clinique, Université Laval LE CONTENU DE CE JOURNAL NE PEUT ÊTRE REPRODUIT SANS L’AUTORISATION EXPRESSE DE LA DIRECTION. Dépôt légal Bibliothèque nationale du Québec 1992 ISSN 1192-1579 Société canadienne des postes Envois de publications canadiennes Contrat de vente no 0139858 Abonnement annuel : 115$ au Canada (tx incluses) 320$ aux États-Unis (tx incluses) T I R A G E C E R T I F I É H E B D O S Q U É B E C I N C . 31 809 COPIES JOURNAL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ LE MERCREDI PAR : Les Éditions Info Dimanche Inc. 72, rue Fraser, Rivière-du-Loup, G5R 1C6 Tél. : 418 862-1911 • Téléc. : 418 862-6165 Site : www.infodimanche.com COURRIEL JOURNALISTES : [email protected] COURRIEL ADMINISTRATION : [email protected] ÉDITEUR : Hugo Levasseur DIRECTEUR DE PUBLICATION ET DES VENTES : Martin Morissette ADJOINTE À LA DIRECTION : Lyne Bérubé DIRECTEUR DE L’INFORMATION : François Drouin JOURNALISTES : Andréanne LeBel Marc-Antoine Paquin Lydia Barnabé-Roy de l’Initiative de journalisme local Alyson Théberge CORRECTRICE : Andréanne LeBel COORDONNATEUR DES PROJETS SPÉCIAUX : Patrice Picard CONSEILLERS EN SOLUTIONS MÉDIAS : Robert Desjardins : [email protected] Micheline Côté : [email protected] Patrice Picard : [email protected] Étienne Morissette : [email protected] Michel Courbron : [email protected] CONSEILLERS EN SOLUTIONS MÉDIAS ET MÉDIAS SOCIAUX : Étienne Morissette PUBLICITÉ NATIONALE (TC MÉDIA) : Marie Eve Dubé RÉPARTITRICE DE PRODUCTION : Marie Eve Dubé GRAPHISTES : Mélanie Emond, directrice de l’atelier Véronique Sénéchal, responsable infodimanche.com Denise Beaulieu • Julie Migneault IMPRESSION : Imprimerie Mirabel / Québécor DISTRIBUTION : Distributions F. Levasseur OBSTÉTRIQUE À L’HÔPITAL DE NOTRE-DAME-DU-LAC Lettre à nos élus Témiscouata-sur-le-Lac appuie la démarche de la Dre Emilie Desrosiers FD > C’est avec «stupeur et consternation» que le maire, Denis Blais, a souligné avoir appris la rupture des services en obstétrique à l’Hôpital de Notre-Dame-du-Lac, du 25 juin au 9 septembre. Par voie de communiqué, il a ajouté que l’informa- tion lui a été annoncée le jeudi 20 juin, la veille de la diffusion de la nouvelle. Le maire se questionne sur les «intentions réel- les» derrière le choix de médiatiser la rupture de service tout juste avant un long congé, mais aussi à quelques jours avant la mise en application de la décision. Dans ce contexte, la Ville de Témiscouata-sur-le-Lac appuie donc la MRC de Témiscouata dans les demandes effectuées auprès PDG du CISSS du Bas-Saint-Laurent, le Dr Jean-Christophe Carvalho (voir autre texte). «La Ville appuie incontesta- blement la démarche de com- munication publique entamée par Dre Emilie Desrosiers, chi- rurgienne générale à l’Hôpital de Notre-Dame-du-Lac, et ses collègues. Entre autres, Dre Anne-Marie Boulay, médecin de famille et médecin accou- cheur à Témiscouata-sur-le- Lac, Dre Mireillle Dionne, médecin-chef du service de périnatalité du Témiscouata et madame Vicky Racicot, accompagnante à la naissance, font partie du nombre des spécialistes qui souhaitent se faire entendre», souligne la Ville. Une rencontre a eu lieu entre le maire, Denis Blais, et une gestionnaire de l’hôpital afin de discuter de possibles solutions. Pendant la fin de semaine de la Saint-Jean, le maire a également eu l’occa- sion de s’entretenir directe- ment avec Dre Desrosiers afin de lui réitérer le support de la Ville et son aide pour mettre en action diverses démarches con- crètes d’appui. «C’est certain que nous avons le Témiscouata à cœur et nous ne pouvons pas accepter cette décision sans agir. C’est non seulement inaccep- table et potentiellement risqué pour les femmes enceintes, c’est aussi un frein à l’attrait et la réten- tion des familles à s’installer ici», soutient Denis Blais. La Ville adoptera une résolution d’appui lors de la prochaine séance du conseil, prévue le mer- credi 3 juillet. Elle entend rester disponible pour travailler de concert avec les divers intervenants pour trouver des solutions à long terme pour le bien de toute la communauté témiscouataine. PHOTO; ARCHIVES, LYDIA BARNABÉ-ROY N.D.L.R. La direction se réserve le droit d’abréger certaines lettres. L’opinion des lecteurs exprimée dans cette page n’engage que leur auteur et ne reflète d’aucune façon la position du journal. OPINION DU LECTEUR | I NFOD IMANCHE Le 3 jui l let 2024 • ACTUAL I TÉ 8 >

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