TransCanada sous haute surveillance
Cacouna - Les travaux de sondages géotechniques qui ont eu cours à Cacouna jusqu’au mardi 23 septembre, avant que la juge Claudine Roy n’ordonne l’arrêt des opérations jusqu’au 15 octobre, se sont effectués sous l’œil attentif de nombreux observateurs. Vendredi dernier, Info Dimanche s’est rendu au belvédère du Sentier de la montagne qui surplombe Gros-Cacouna, à la rencontre d’écologistes.
Sur place, deux environnementalistes scrutent les eaux du fleuve. Une jeune femme et sa petite fille venues de l’extérieur de la région, ainsi qu’un résident de Trois-Pistoles. Ils bravent le vent et le froid. Au large, face à eux, les deux barges affectées aux sondages géotechniques effectués par l’entreprise TransCanada, sont immobiles.
Rien ne bouge, les travaux sont suspendus, la faute à un petit rorqual aperçu dans la zone d’exclusion quelques minutes plus tôt. Le secteur de Cacouna est considéré comme une pouponnière pour les bélugas du Saint-Laurent, une espèce en péril.
« Je note chaque présence de mammifère marin, que ce soit un rorqual ou un béluga », souligne la jeune femme qui préfère conserver l’anonymat. L’heure et l’endroit sont aussi enregistrés. Un second rorqual pointe le bout de son aileron, c’est le calme plat sur les plateformes.
SURVEILLANCE CONTINUELLE
Les deux environnementalistes se disent soucieux de voir TransCanada respecter ses conditions liées aux travaux de forages. « Il y a quelqu’un ici tous les jours, il y en aura tout le temps qu’eux (TransCanada) seront là », précise la jeune femme en pointant du doigt les deux barges. Elle y est depuis trois jours, même si jeudi « c’était vraiment froid. »
TransCanada n’est pas la bienvenue. Non seulement à Cacouna, mais sur le fleuve. On pourrait croire qu’on se bat ici pour sauver le béluga, mais le débat, on le réalise rapidement, est plus profond. On ne veut pas de cet « or noir, mais sale ». C’est au-delà des baleines blanches de ce fleuve aux grandes eaux, c’est le rejet intrinsèque des carburants fossiles dont il est question.
Si on compte de nombreux défenseurs des bélugas, ils sont nombreux aussi à s’opposer à la mise en service d'un oléoduc de 4 400 km, dont 700 km au Québec, devant transporter quotidiennement plus d’un million de barils de pétrole en provenance de l’Alberta et à l’implantation d’un terminal maritime comprenant un site de stockage de 12 citernes de 500 000 barils de pétrole. C’est l’utilisation même du pétrole, de l’exploitation polluante des sables bitumineux albertains, qui est rejeté.
Pour ces deux écologistes, il n’y a aucun doute possible, le projet d’oléoduc et de terminal maritime est une bombe à retardement. « Ce n’est pas à savoir si l’oléoduc aura une fuite, mais quand et combien de litres se répandront. Des litres de pétroles sales auquel on ajoute un diluant toxique qu’il faudra retourner par train », lance l’homme installé à Trois-Pistoles depuis peu.
Cacouna se situe géographiquement à des milliers de kilomètres de l’Alberta, mais son avenir pourrait y être lié par voie d’oléoduc. Les « verts » arguent que le conseil municipal du village de 2 002 âmes, dirigé par la mairesse Ghislaine Daris, est dépassé par l’ampleur et l’importance du dossier. Un conseil coincé entre les vues de l’entreprise de Calgary désireuse de hausser sa production de pétrole et les environnementalistes convaincus et militant pour des énergies alternatives.
« Comment peuvent-ils tenir tête à TransCanada et son armée de lobbyistes, comment négocier avec un monstre comme ça quand tu n’as aucune compétence ou expérience? », lance la jeune femme. À qui faire confiance, aurait-elle pu demander, dans ce trafic d’influence pro et anti terminal pétrolier.
Ce débat entre convictions et économie pourrait être qualifié de dialogue de sourds. Aux études démontrant que l’exploitation à ciel ouvert des sables bitumineux est de deux à trois fois plus polluante que prévu, on insiste sur la demande énergétique et les impacts économiques.
Mais encore, les deux observateurs rejettent les prétentions des lobbyistes de TransCanada sur l’emploi et les richesses générés. Ils rappellent que dans le dossier de Keystone XL du même promoteur, sensé acheminer le pétrole des sables bitumineux jusqu’aux raffineries du golfe du Mexique, les chiffres du gouvernement américain contrastaient, et le mot est faible, avec ceux de l’entreprise.
En juin 2013, le président Barack Obama avait effectivement exprimé de sérieux doutes quant aux prétentions de TransCanada qui prévoyait la création de dizaines de milliers d’emplois. « Obama a remis les pendules à l’heure. Une fois construit, l’oléoduc n’allait créer que 50 à 100 emplois. Alors l’argument ici est nul en regard des risques et des conséquences », rappelle l’observateur.
Des bélugas apparaissent au nord-est de la zone d’exclusion. Leur présence rassurante se jouera sur fond de pétrole à compter du 15 octobre. Jamais la présence des deux à Cacouna n’aura été autant liée.
2 commentaires
Bien non ils n'en ont pas besoin, pour eux c'est pas dans ma cour et va travailler pour me payer mon chèque . De toute façon c'est bien connu les gens qui travaillent pollu plus que ceux sur le BS