Assurance-emploi : parce que 15 semaines, ce n’est pas assez
Marie-Hélène Dubé.
Imaginez-vous combattre un cancer, faire face aux difficiles traitements et tout cela en moins de 15 semaines pour reprendre le travail, car oui, après 15 semaines à 55 % de votre salaire, les prestations cessent. Parlez-en à Marie-Hélène Dubé, cette Louperivoise de 46 ans qui s’est fait remarquer dans son combat contre l’assurance-emploi.
Marie-Hélène Dubé est une battante. Mère monoparentale de deux enfants, elle a dû affronter trois cancers en cinq ans l’obligeant à lourdement hypothéquer sa maison de Laval. Et elle se dit chanceuse, plusieurs n’ont pas de propriété sur laquelle s’appuyer. C’est pourquoi elle lance aujourd’hui sa nouvelle stratégie de réforme de l’assurance-emploi : «15 semaines, ce n’est pas assez !».
Déjà en 2009 Mme Dubé avant lancé une pétition canadienne pour augmenter le nombre de semaines de prestation fixé à 15 semaines. Forte des 600 000 signatures obtenues, dont 500 000 ont été présentées à la Chambre des communes, elle passe à une nouvelle étape de sa lutte contre un programme désuet et vieux de 46 ans.
ÉCRIRE
Dans sa ligne de mire, on retrouve les députés locaux, le premier ministre Justin Trudeau, le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social Jean-Yves Duclos, ainsi que les chefs des partis politiques du Canada. Comment ? Par l’envoi d’un courriel personnalisé à chacune de ses personnes. L’idée est de prendre d’assaut leur messagerie.
«Nous sommes rendus là. On doit passer le message, de cette façon ils ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas, qu’ils n’étaient pas au courant. Ils sont en vacances actuellement, profitons-en pour créer un effet de masse! Et puis, le message va se rendre directement!»
Pour ce faire, il suffit de consulter le site www.15semaines.ca. «Un seul clic suffit, il faut se faire entendre auprès de tous les élus», lance Mme Dubé.
ASSURANCE-EMPLOI
Actuellement, les patients atteints d’un cancer reçoivent des prestations d’assurance-maladie pour les 15 premières semaines, une disposition qui remonte à 1971. Le régime public n’est plus représentatif de la réalité, soutient Mme Dubé. «Ça ne correspond plus à 2018 et sur plusieurs facettes. La société n’est plus la même qu’il y a 46 ans, y compris en terme de survie aux cancers.»
L’Agence de la santé publique du Canada lui donne raison. Le taux de survie au cancer après cinq ans a augmenté, passant de 25 pour cent dans les années 1940 à 60 pour cent aujourd’hui.
Mais ces rémissions demandent du temps soutient Marie-Hélène Dubé qui rappelle que plus de 70 % des Canadiens n’ont pas accès à un régime collectif d’assurance salaire. «La question financière soulève des inquiétudes bien réelles. C’est un stress fou et, on s’entend, quand tu combats un cancer ou une maladie grave, tu n’as pas besoin de ce stress là.» La question qu’elle soulève est de savoir comment un patient parviendra à survivre financièrement dans ces circonstances.
«J’ai dû hypothéquer plusieurs fois ma maison, j’ai même dû retarder une opération à mon troisième cancer, car je n’avais pas encore atteint les 630 heures requises pour avoir droit à mes 15 semaines. Ça a eu une incidence sur ma rémission. Je suis arrivée à l’opération épuisée. J’ai eu plusieurs complications. Heureusement, j’étais appuyée par ma patronne et j’avais une maison. Ceux qui sont à loyer, ils se retrouvent dans le chemin!», lance-t-elle avec conviction.
UN AN
Depuis 2009, le prolongement des prestations au-delà de ces 15 semaines a fait l’objet de sept différents projets de loi dont certains se sont rendus jusqu’en deuxième lecture, mais jamais plus loin. «Il y a cinq ans, Justin Trudeau a voté en faveur du projet de loi qui visait à augmenter les prestations à 50 semaines. Actuellement, le Canada reste le seul pays du G8, outre les États-Unis, à offrir des prestations d’assurance-maladie de moins d’un an. Depuis, il est devenu premier ministre, mais il n’a rien fait», fustige Mme Dubé.
Si Marie-Hélène Dubé se réjouit que les proches aidants aient désormais accès à une nouvelle prestation de 15 à 26 semaines et même de 35 semaines s’il s’agit d’un enfant, elle ne manque pas de soulever l’ironie de la situation. «L’aidant naturel doit avoir accès à ces prestations, mais la personne malade elle... Non ?»
Elle présente donc sa nouvelle stratégie comme un projet de société. Les chiffres lui donnent raison. Selon l’Agence de la santé publique du Canada, la moitié des Canadiens recevront un diagnostic de cancer à un certain moment de leur vie, et on estime que 1 Canadien sur 4 mourra de cette maladie.
«C'est pour ça qu'il faut cliquer, qu'il faut se faire entendre. Soyons nombreux», conclut Marie-Hélène Dubé.
13 commentaires
Tu es très forte. Continue.
Je t’envoie des ondes positives.
Andreanne
Et pour répondre à @malade, non, ça ne changera absolument rien pour une simple grippette ;) ce sont les médecins qui vont continuer à déterminer la durée nécessaire de la convalescence, pas les gens eux-mêmes, donc aucun stress de ce côté.