PPAW1 : le BAPE de retour pour une deuxième fois à Rivière-du-Loup
La commission d’enquête du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) était de retour à Rivière-du-Loup afin de tenir la deuxième partie de son audience sur le projet de parc éolien PPAW1, les 23 et 24 juillet. L’occasion était offerte aux citoyens, aux groupes et aux organismes d’exprimer leur opinion et leurs commentaires sur le projet.
Une quarantaine de personnes se sont réunies pour assister à cette seconde et dernière partie du processus permettant au BAPE de rédiger un rapport à l’intention du ministre de l’Environnement, le 23 juillet en soirée. Du groupe, quelques-uns ont pris la parole pour présenter un mémoire qu’ils ont déposé au BAPE, ou encore, pour s’exprimer de manière spontanée.
Notons que l’audience, en présence de la présidente Marie-Ève Fortin et de la commissaire Linda St-Michel, s’est poursuivie le 24 juillet en après-midi, toujours à l’Hôtel Levesque, ainsi qu’à travers une diffusion vidéo en direct. D’autres personnes ont été appelées à se prononcer.
Au total, 16 intervenants ont fait valoir leur point de vue. Certains étaient en faveur, d’autres non.
NOMBREUSES PRÉOCCUPATIONS
Sans surprise, des citoyens se sont ouvertement présenté en opposition au développement du parc éolien qui prévoit l’installation de 56 éoliennes de 6,2 MW à Pohénégamook, Saint-Honoré-de-Témiscouata, Saint-Antonin et sur le territoire non-organisé de Picard.
Le collectif citoyen Tourne pas chez nous, qui est sorti publiquement à quelques reprises sur cette question, a fait part de nombreuses préoccupations au sujet des impacts sur l’environnement du territoire, de la dépréciation du territoire, du manque de transparence de la démarche, de l’absence de vision d’ensemble et des retombées financières qu’il estime «douteuses».
«Les études d’impacts environnementales se concentrent énormément sur le parc en fonction. C’est insuffisant. Il faut vraiment se pencher sur ce qui sera généré avant l’installation des éoliennes en termes de GES, la pollution générée en amont pendant la construction et l’acheminement des matériaux, ainsi que lors du démantèlement», a soutenu Cassandre Henry, représentante du groupe.
Leurs questions, notamment au niveau du démantèlement des éoliennes au terme du contrat et de la protection de la biodiversité, ont été appuyées par d’autres intervenants, dont Vents d’élus, un mouvement qui rassemble des élus et ex-élus de partout au Québec qui se questionnent sur le développement éolien en province. Les représentants, présents par visioconférence, se sont également inquiétés des impacts cumulatifs de la réalisation des différents parcs régionaux. Ils ont demandé, au même titre que Tourne pas chez nous, la tenue d’un BAPE générique sur cette question.
«Présentement, on évalue les projets à la pièce, sans vue d’ensemble et sans savoir quels sont les effets cumulatifs. Sans BAPE générique, nous nous pencherons sur ces effets seulement lorsque nous les aurons subis», a déploré la porte-parole, Rachel Fahlman.
D’autres intervenants, comme le directeur de Horizon-Nature Bas-Saint-Laurent, Mikaël Jaffré, a présenté les enjeux que soulève le projet au niveau de la connectivité écologique et de la fragmentation des habitats. Le secteur visé, dit-il, est «névralgique» pour les déplacements de la faune. Il craint que le développement de ce parc – tout comme la multiplication des projets régionaux – vienne nuire au succès des passages fauniques installés dans la région, notamment sous l’autoroute 85.
Enfin, des citoyens ont soulevé différents commentaires plus philosophiques sur la vision de notre société quant à la production d’électricité et la transition énergétique. Un autre s’est questionné sur les impacts sur les insectes, les façons de faire du ministère de l’Environnement et l'absence d'études et de littératures scientifiques européennes dans l'étude d'impacts.
DES REDEVANCES IMPORTANTES
À l’inverse, certaines personnes issues des milieux municipaux et économiques ont plaidé pour la réalisation du projet. Simon Grenier, directeur général de la Ville de Pohénégamook, a notamment expliqué que les préoccupations des élus et des citoyens pohénégamookois ont été rassurés par l’instigatrice du projet, Invenergy Canada, quant à la sauvegarde des paysages et le maintien des activités touristiques.
Il n’a pas non plus caché que le développement éolien était porteur pour la collectivité par les redevances significatives qu’il permet d’obtenir. Pohénégamook aurait reçu, depuis 2015, plus de 2 M$ issus de ses implications dans d’autres parcs éoliens du territoire. Des sommes qui ont permis de financer des projets importants pour lesquels il n’y a parfois aucune subvention disponible.
Cet argument a également été évoqué par le Collectif régional de développement du Bas-Saint-Laurent et la MRC de Rivière-du-Loup, notamment. Les représentantes de ces organisations ont reconnu que les retombées des parcs éoliens étaient significatives sur les plans économiques et sociaux et que celles-ci avaient des impacts directs sur les municipalités du territoire. Des exemples de projets encouragés par les revenus générés par les parcs Viger-Denonville et Nicolas-Riou ont été donnés.
Du côté industriel et économique, l’entreprise Marmen Énergie, basée à Trois-Rivières, a soutenu que la réalisation du projet pourrait lui être bénéfique, elle qui est spécialisée dans la construction de tours d’éolienne. Si elle obtient un contrat, celles-ci pourraient être réalisées à Matane où une expertise est disponible et où plusieurs emplois seraient créés.
Notons enfin que le Conseil régional de l’environnement du Bas-Saint-Laurent s’est positionné en faveur du développement éolien, mais pas à n’importe quel prix. Selon l’organisation, ces développements doivent être réalisés intelligemment, de façon réfléchie. Brigitte St-Amour, chargée de projet en biodiversité, a expliqué que la société doit aussi s’intéresser à sa consommation d’énergie et à la réduction de son empreinte énergétique.
Pour la suite, la commission d’enquête dispose d’un délai maximal de quatre mois pour accomplir son mandat. Elle doit remettre son rapport au ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette, au plus tard le 10 octobre 2024. Par la suite, le ministre dispose de 15 jours pour le rendre public.
C’est le conseil des ministres qui, ultimement, prendra la décision finale concernant le projet.
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