Des biogaz au parfum d’argent
Il y a l’or noir, l’or blanc, mais voici que la Ville de Rivière-du-Loup entend capitaliser sur ce qu’il est maintenant permis d’appeler « l’or brun ». C’est-à-dire sur les biogaz contenus dans le sol de son site d’enfouissement sanitaire de Rivière-des-Vases. En partenariat avec la firme d’ingénierie BPR, la Ville entend ainsi éliminer, sur une période de cinq ans soit jusqu’en 2013, 200 000 tonnes métriques de ces gaz. La vente de ces crédits carbone au gouvernement du Québec au montant de 19,50 $ la tonne permettra à Rivière-du-Loup d’engranger des profits nets de 1,3 M$.
Si le montant de 19,50 $ peut sembler minime en comparaison aux 60 $ la tonne payés en Europe, il s’agit néanmoins du montant le plus élevé versé au Canada. « D’ici la fin de l’entente, le Canada sera sorti des limbes au niveau environnemental et il y aura probablement des bourses du carbone et des revenus importants seront possibles au-delà de 2013 », a commenté le maire de Rivière-du-Loup, Michel Morin.
Afin d’imager ce que représentent ces 200 000 tonnes de moins dans l’atmosphère, c’est comme si Rivière-du-Loup retirait, pendant 5 ans, un total de 50 000 voitures de la circulation. BPR n’attend plus que les autorisations du ministère de l’Environnement pour procéder aux travaux du système de captage et de combustion des gaz.
PROJET
Une cinquantaine de puits seront forés dans deux zones du sol du site d’enfouissement. Ces puits descendront tout au fond de la masse de déchets, soit environ six mètres, et ils seront reliés par un réseau de captage jusqu’à un point convergent. Les gaz y seront aspirés et seront détruits à raison de 99,9 % dans une torchère.
Une combustion quasi complète des gaz, notamment du méthane, à des températures de 800 degrés Celsius. Une température si élevée qu’il n’y aura pas de flamme visible. Tout ce qui sera visible à l'œil sera la présence du cylindre de la torchère. L’installation sera en fonction 365 jours par année, 24 h sur 24.
Le projet d’élimination des biogaz de Rivière-du-Loup s’inscrit dans le cadre du Programme Biogaz du gouvernement du Québec. Le projet louperivois est d’ailleurs le seul à avoir été retenu dans l’est du Québec. Le programme gouvernemental vise la réduction des émissions des gaz à effets de serre des sites d’enfouissements des matières résiduelles, par l’achat de crédits carbone.
Ce projet d’une durée de cinq ans, soit de janvier 2009 à décembre 2013, représente un investissement de plus d’un million de dollars pour BPR. La firme d’ingénierie sera responsable de l’immobilisation, de la conception et de la mise en route du système. De son côté, la Ville assistera BPR dans toutes ces démarches en plus d’être un partenaire actif pour l’opération des systèmes.
CARBONE
Ce qui est communément appelé « crédit carbone » est en quelque sorte un droit de pollution. Le directeur de projet chez BPR, Stephen Davidson explique : « Il y a des intensités qui s’apparentent à un droit de pollution. Ainsi, une entreprise A qui dépasse les normes alors que l’entreprise B, au prix d’investissements est en dessous, peut vendre à la première ses crédits carbone ». Seulement, plutôt que de se faire d’entreprise par entreprise, les crédits carbone transigent via une bourse.
Un marché qui, selon M. Davidson, serait en pleine explosion. « Et c’est quelque chose qui va se maintenir dans le temps. Le protocole de Kyoto avait ciblé une baisse des émissions de 6 % pour 1990, alors que le Canada a plutôt augmenté de 30 % », souligne le directeur de projet.