«J’ai l’impression d’avoir de l’eau dans le gaz»
Nathalie Ouellet est une femme énergique. Au téléphone, sa voix est contagieuse, communicative. Pourtant, selon son propre aveu, celle-ci cache aussi une fatigue qui ne meurt pas. Près de sept mois après avoir été diagnostiquée positive à la COVID-19, la résidente de Saint-Louis-du-Ha! Ha! a toujours des séquelles de la maladie. Comme si le virus ne l’avait jamais vraiment quittée.
Mme Ouellet va aujourd’hui bien mieux que pendant les semaines qu’elle a combattu le nouveau coronavirus, il va de soi. La fièvre et les importants problèmes respiratoires ont disparu, alors que les grosses toux et les maux de tête «à vouloir se fendre la tête en deux» se sont apaisés après quelques mois. Pourtant, elle ne se sent pas «comme avant». La normalité qu’elle a connue, pré-pandémie, n’est plus…du moins pour le moment.
«Je toussote encore et je suis essoufflée rapidement. C’est comme si je n’étais pas capable de récupérer. J’ai mal partout, dans les articulations aussi…», raconte au téléphone celle qui est toujours en arrêt de travail. «Je veux vraiment retourner [travailler], j’ai hâte que tout redevienne à la normale, mais on dirait que ce pouvoir, je ne l’ai pas. Je traine de la patte tout le temps.»
Et puis, l’image tombe de façon claire et limpide : «J’ai l’impression que je suis une machine et que j’ai de l’eau dans le gaz».
Nathalie Ouellet, 51 ans, a accepté de revenir sur les derniers mois d’une année chamboulée. Sur un printemps hors de l’ordinaire au cours duquel, ses proches et elle, ont fait partie des statistiques de la Santé publique. Elle le fait pour conscientiser. Pour faire réaliser que la COVID-19 est un virus à prendre au sérieux aussi. Et qu’il peut toujours, dans plusieurs cas, avoir un réel impact sur la qualité de vie des personnes infectées.
L’histoire commence à la fin du mois de mars 2020. Deux semaines plus tôt, le premier ministre François Legault annonçait la fermeture des écoles. Le Québec ne compte alors officiellement que quelque 200 cas positifs.
Nathalie Ouellet raconte avoir ressenti les premiers symptômes grippaux deux jours après avoir fait des commissions à Rivière-du-Loup et Saint-Antonin, le 24 mars. Encore à ce jour, elle ne sait pas avec certitude où, ni comment, elle a attrapé le virus. Mais elle se sentait malade. Mal de tête, fatigue intense, fièvre, etc.
Au cours des jours suivants, la situation s’aggrave et son conjoint lui recommande de se faire tester, ce qu’elle fera à la clinique de dépistage de Rivière-du-Loup. En attente de son résultat, son état continue de se détériorer.
«J’avais tellement mal au cœur que je n’avais plus le gout de rien. Je prenais des pilules pour la haute pression et j’étais terriblement faible. Écouter des émissions ou une publicité, être sur mon cellulaire, je n’étais plus capable. Je voulais juste dormir», confie-t-elle.
Quelques jours plus tard, elle va perdre connaissance dans la salle de bain. Transportée à l’hôpital, elle retournera rapidement à la maison après avoir passé un test négatif pour l’influenza. À ce moment, elle n’avait toujours aucune nouvelle de son test, mais le délai lui faisait croire à un résultat négatif. «J’essayais de me convaincre que j’étais correcte, que je m’en faisais peut-être pour rien, mais finalement, ce n’était pas le cas. C’était de pire en pire.»
C’est le 2 avril, exactement sept jours après avoir passé le test à Rivière-du-Loup, que la Santé publique confirme qu’elle est atteinte du virus. C’est un choc, mais aussi un soulagement. Le diagnostic explique les problèmes respiratoires qui s’amplifient, dont sa «difficulté à trouver [son] air.»
«Je respirais vite et ça me faisait mal. La Santé publique m’a conseillé d’appeler l’ambulance et de retourner à l’hôpital. Sur place, j’ai appris que je faisais un début de pneumonie. Je n’étais même pas capable de prendre une radiographie de mes poumons», mentionne-t-elle en soulignant les bons soins du Dr Guillaume Castilloux et de son équipe.
Considérant ses symptômes, Nathalie Ouellet a été transférée la journée même dans une unité de soins intensifs de Québec. Elle y est restée trois jours, une période au cours de laquelle elle n’a pas été intubée, mais où elle a été en isolement, sous observation, avec de l’oxygène et des antibiotiques pour tenter de la soulager. Elle assure cependant que les maux étaient toujours présents.
Même si la mémoire lui fait parfois défaut, une autre séquelle qu’elle associe à la COVID-19 (elle note aussi chercher ses mots et «déparler»), elle se souvient des professionnels «habillés comme des astronautes» et de sa chambre à pression négative où elle était couchée, seule. «Les médecins et infirmières venaient nous voir une fois par jour pour limiter les contacts. Entre temps, ils nous faisaient des signes à travers une vitre. Ce n’était vraiment pas drôle», explique-t-elle.
Elle se souvient aussi avoir beaucoup pensé à ses proches. Elle s’inquiétait notamment pour son conjoint et ses parents qui ont aussi reçu un test positif à la COVID-19 et qui réussissaient, par chance, à avoir des nouvelles régulières de sa situation. «Je me disais que s’il fallait que mon père meure de ça, que j’allais m’en vouloir toute une vie. J’essayais vraiment de récupérer, mais je pensais à ma famille… à mes fils et à ma petite-fille. Je me disais que c’était gros tout ça», note-elle, précisant que ses proches se portent bien dorénavant.
Aujourd’hui, après de longues semaines de confinement et de rétablissement, d’anxiété et de stress aussi, Nathalie Ouellet va mieux. Selon les deux tests - négatifs - qu’elle a passés à la fin du mois d’avril, elle n’a plus la COVID-19 depuis un bail, mais elle ne se sent pas guérie pour autant.
Mme Ouellet est l’une des 97 321 personnes ayant été contaminées au Québec. Après tout ce qu’elle a vécu, elle ne comprend pas comment certaines personnes peuvent encore, à ce jour, réduire la COVID-19 à une simple grippe ou même nier son existence.
Son message? La pandémie n’est pas encore terminée et le virus peut frapper n’importe qui. Il faut penser aux autres, à ses proches, amis et collègues de travail et faire preuve de vigilance. C’est important.
«Oui, il y a des gens pour qui ça ne dure pas longtemps. Mais pour d’autres, ça les affecte durement et sur une longue période, peut-être même pour la fin de leurs jours», dit-elle. «Certaines personnes se croient encore à l’abri, mais on a bien vu que le virus peut frapper des grands sportifs, des vieux comme des jeunes. Des gros, des moyens et des petits... C’est quoi le dénominateur commun? On ne sait pas. Il faut continuer d’être prudents et respecter les autres.»
Dans ses sorties à Rivière-du-Loup ou au Témiscouata, Nathalie Ouellet remarque que le port du masque est respecté dans les commerces. Une situation qui la réjouit, tout comme la baisse des cas actifs dans la région. Après tout, «il y a bien pire que le port du masque quelques minutes», dit-elle.
Difficile de ne pas la croire sur parole.
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