Rencontre avec le chef pompier Yvan Charron
L’Isle-Verte - Le 23 janvier à 0 h 25, les pompiers de la caserne 20 de L’Isle-Verte se rendent d’urgence à la Résidence du Havre située au 25, rue du Quai. Ils ne le savent pas encore, mais sur place, ils seront confrontés à un véritable enfer.
Après une nuit qu’il décrit comme une « nuit d’enfer », le directeur du Service incendie et ses hommes sont invités à prendre du repos. Malgré l’horreur, la tâche à accomplir, il faut dormir. Ils sont épuisés, transis par le froid, ils ont été témoins d’une tragédie qui secoue non seulement le village de 1 500 âmes, mais toute la province.
Après avoir dormi une seule heure, Yvan Charron est de retour sur le site. « Tu peux pas dormir. Ça te reste en tête. Alors tu y retournes, tu n’as pas le choix. Ça n’a rien à voir avec Yvan Charron. Ça n’a rien à voir avec l’argent. On est pompiers », lance-t-il avec aplomb.
Sur les lieux du drame, la fournaise funeste a fait place à un tombeau de glace. À certains endroits, la glace atteint 60 centimètres d’épaisseur. Près d’une trentaine de corps sont piégés dans les ruines.
La Sûreté du Québec est maintenant responsable de la scène, mais des pompiers de la caserne 20 participent aux fouilles, à la recherche des corps de victimes que plusieurs connaissent. Si la charge de travail est éprouvante, la charge émotive l’est tout autant.
Yvan Charron reconnait que des pompiers ont été ébranlés et ont remis en doute leur passion pour ce métier qu’ils adorent. « Écoute, oui ça nous brasse en dedans, alors on a dû se dire il faut prendre un ''break''. On a disputé des gars, pour les mettre au repos, qu’ils aillent dormir. Nous avons établi un horaire et à partir de là nous avons pu prendre un peu de repos », précise-t-il.
Au moment d’écrire ces lignes, le chef et ses pompiers de la caserne 20 fouillent toujours ces décombres. Ils sont épaulés par leurs collègues de Rivière-du-Loup, Trois-Pistoles, du SSI Kam-Est, Saint-Antonin, Saint-Éloi, Saint-Arsène, Saint-Paul-de-la-Croix, Notre-Dame-du-Lac et Rimouski.
Des collègues dont il dit apprécier le support et l’entraide au plus haut point. « Avec la SQ, et toutes les autres casernes qui sont ici, les autres intervenants aussi, tu comprends, on est tous ensemble. Ça crée des liens. Pour nous autres à L’Isle-verte, on est une brigade, on s’appuie l’un sur l’autre. »
INTERVENTION
À maintes reprises dans le passé les pompiers ont effectué des visites à la Résidence du Havre. Tout récemment, soit le 3 janvier dernier, ils ont dû intervenir au 25 rue du Quai pour le bris d’un gicleur d’eau. Des résidants avaient temporairement dû être relocalisés.
« On se disait que s’il y avait quelque chose, nous étions prêts. En moins de six ou sept minutes, la résidence était évacuée. On s’est dit on est bon. Et puis il y a eu jeudi. Nous avons été rapidement sur les lieux, mais c’était déjà trop tard. Tu ne fais pas ce que tu veux, mais ce que tu peux », commente Yvan Charron.
Les flammes s’étaient propagées à l’aile Est. « En sortant du véhicule, j’ai demandé l’entraide de trois autres casernes. Des policiers de la SQ et des paramédics étaient là et ont fait tout un travail pour évacuer des résidants. Ensemble, on est entré dans l’aile Ouest. On a sorti du monde. La fumée devenait de plus en plus dense. Mes gars ont pris la relève avec leur appareil respiratoire. On devait agir », raconte le chef pompier.
Pendant ce temps, d’autres pompiers ont mis en place la logistique d’intervention ; piscine, camion, boyaux.
Yvan Charron est catégorique, l’aile Est était entièrement embrasée. « Les flammes sortaient de partout. Les bonbonnes de spray du salon de coiffure sautaient, on entendait la bonbonne de propane siffler. Les gars sont allés au bout d’eux autres. »
À la question qui a été sur toute les lèvres : pourquoi ne pas avoir demandé l’intervention du camion-échelle (714) du Service de la sécurité incendie de Rivière-du-Loup (SSIRDL)? Le chef pompier est catégorique. « J’avais déjà quatre casernes sur place, deux autres s’en venaient. En terme de pompiers, nous étions suffisants et en contrôle. Aucun camion échelle n’aurait été utile là. Rivière-du-Loup assurait une présence en relève entre autres pour Cacouna et Saint-Arsène. »
LE CHEF
Yvan Charron est fils d’agriculteur et a repris la ferme familiale. Le père de 6 enfants est devenu pompier au milieu des années 80. Il est nommé chef pompier de la caserne 20 en 1996. Ceux qui le connaissent le décrivent comme une force de la nature.
Lundi matin, pour la première fois depuis le drame, il a pu traire ses vaches. « J’étais content. Tu penses à autre chose, et puis… ça fait du bien. »
Alors que l’entrevue se termine, Yvan Charon insiste. Il tient à remercier ses proches. Pour la première fois de l’entretien, sa voix se brise. « Je veux absolument remercier ma femme… Je veux remercier mes filles, mes fils et mes gendres, tu comprends. C’est important », dit-il, la voix étouffée par l’émotion.
17 commentaires
Bravo Yvan, tu as toute notre admiration. Tu es d'une trempe exceptionnelle !
Hugues Albert
Souvent ce sont des producteurs agricoles qui ont à gérer leur entreprise en même temps qu'être attaché à un ''bipeur'' ou leur cellulaire. Peu importe ce qu'ils font ..les foins, les semences, les récoltes si ce n'est que d'aider une de leur vache entrain de mettre bas avec des nuits écourtés. Quand ça sonne, c'est que ça presse...
Je m'imagine cette nuit d'horreur quand ils sont tous arrivés sur les lieux et ils ont constatés l'ampleur du drame, c'est sure que c'est l'adrénaline qui embarque.
J'ai demeuré 33 ans à St-Éloi et maintenant je demeure à Lévis la dynamique est bien différente, quand on entend le camion d'incendie c'est à peine si on lève les yeux de notre journal, on ne connaît pas ses voisins et que dire du sentiment d'appartenance et des chicanes de syndicat pour leur sacré fond de pension.
Il y a un proverbe qui dit: ''On peux sortir une fille de la campagne mais on ne peut pas sortir la campagne de la fille''
Dans nos petites municipalités les personnes qui s'investissent ne le font pas pour le salaire mais plutôt pour ce sentiment d'appartenance et le bien-être de leur milieu comme un bon père et une bonne mère de famille.
Je suis moi aussi attristé par le départ atroce de nos bâtisseurs et attristé aussi pour toutes les familles, les pompiers et bénévoles qui auront à guérir leurs plaies lorsqu'ils retourneront chez-eux tranquillement.
Je sympathise avec touts les gens qui sont touchés de près ou de loin par cet événement malheureux.
Exactement la première chose que j'ai pensé sachant que RDL n'était pas sur les lieux. L'échelle représente un bon avantage sur l'approche de l'incendie, mais scinder le service de RDL en deux aurait pu causer d'autres problèmes.
Si Daniel St-Pierre peut enfin arrêter de croire qu'il y a un aspect politique à cette décision, la région pourra ce concentrer sur ce qui est important.
Pourtant moi j'imagine un camion échelle venant chercher ma mère sur son balcon au 3e étage en les emmena, elle et mon frère, en sécurité loin de cet enfer !
au fils des saisons les plaies se refermeront avec leurs proches mais la douleur sera toujours présente en eux.
bon courage à vous tous et prener le temps de jaser et d'échanger à la brigade pour continuer votre bon travail. on a beau être homme où femme mais de l'accompagnement lors d'évènement ainsi est important pour garder le sens à la vie
Respectueusement, j’espère que je comprenez ce que qu'une échelle aérienne. Véhicule très gros et lent sur la route.
C'est un véhicule qui aurait pu prendre 30 minutes à arrivé de rdl et qui aurait pris minimum 10 minutes à installer. Est-ce que vous croyez que sont utilisation aurait pu être utile 40 minutes plus tard. La réponse est non. Il ne faut pas oublier que ça prend beaucoup de place pour utiliser ce genre de véhicule.
Rien ne sera plus pareil pour vous tous suite à cette grande tragédie.
Pour chaque citoyen de cette municipalité on ne pourra oublier cet évènement. Je crois bien
que le but n’est pas d’oublier mais de vivre avec et dans ressortir beaucoup plus fort.
Je vous souhaite repos et paix dans vos cœurs pour vous tous. Michel
2 Le réseaux d'aqueduc aurait eu de la misère a fournir en eau ce qu'une échelle demande dépit gallon- minute
3: imaginer un incendie a cacouna et a toute les place qui ont répondu présent et RDL présent aussi sur les lieu. Qui les protège tu demande l'aide de st- antonin KAMEST et environ et si sa force tu demande des gars du témis sa pas de sens..
Je ne suis pas pompier, mais j’ai des amis qui sont pompier à Montréal (donc il ont le DEC INTERVENTION EN SÉCURITÉ INCENDIE DE L'IPIQ) pour être efficace l’échelle doit arriver 5 minute après l’appel pas 30 minute après. Je ne veux pas faire de moral.
Daniel st-pierre a mis dans la tête de tout le monde que l’échelle aurait du être demande sans savoir de quoi qu’il parle.