Autre extrait des Mémoires du lutin Kling
Un conte de Richard Lévesque.
—Crois-moi, mon petit Kling, ce n’est pas toujours facile.
Je ne répondis pas. Je ne suis pas très bavard en général. Et puis j’étais fort impressionné, je l’avoue. Le gros bonhomme avait beau rire souvent dans sa barbe blanche, ses yeux malicieux avaient beau contenir toute la bonté du monde, il était quand même le Patron.
—Regarde, mon petit, lis un peu cette lettre, reprit-il en me tendant une feuille un peu froissée, couverte d’une grosse écriture maladroite.
—Lis à haute voix, ajouta le Patron.
Je commençai :
—« Cher Père Noël, je voulait te dire de laissé faire pour les skis, vu que je m’ai cassée une jambe avant-hier. À la place, tu pourrais apporter quelque chose à maman Marianne pour qu’elle recommence à chanter comme avant. Tu pourrait-tu faire partir les papiers sur la petite table avec le mot facture dessus? Maman Marianne les regarde souvent puis elle se cache pour pleurer mais moi je la vois parce que je reste couché avec ma jambe cassée. Si mon papa serait encore là je pense qu’il saurait quoi faire, mais il est partit au ciel depuis l’accident. Je t’embrasse malgré ta barbe et je t’aime fort, fort. Signé : Clément de la rue Henri ».
J’avais essayé de ne pas laisser trembler ma voix, mais à la fin je pense bien que je chevrotais un peu. Le Patron s’en est bien aperçu : il voit tout, le Patron, il entend tout. Il m’a dit :
—Tu es un brave petit lutin, mon Kling. Tu vois que ce n’est pas toujours facile pour moi. Je voudrais bien apporter le bonheur et la sérénité à tous les enfants de la Terre, mais souvent le sort des enfants ne dépend pas de moi, mais de leurs parents, de leur entourage, des adultes. Et moi je n’ai pas tous les pouvoirs. Je ne peux donner qu’à ceux qui croient en moi.
J’étais bien surpris :
—Comment, Père Noël, il y a des gens qui ne croient pas en vous?
Le Patron eut un sourire indulgent.
—Brave petit Kling! Tu es bien jeune encore, tu n’as que 150 ans, si on compte comme les humains.
Je me tortillais un peu, gêné d’avoir osé poser une question au Patron.
La suite du conte ici, sur le blogue de Richard Lévesque.
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