Les nouveaux appétits
Avant que les boomers n’atteignent l’adolescence, la nourriture des Québécois était restée « traditionnelle ». Dans les salles à manger des hôtels et dans les quelques restaurants, on servait de solides portions de rôtis, de ragoûts, d’omelettes, de pâtés. Avec les soupes aux pois ou aux étoiles, les tartes au sucre ou aux fruits de saison, il y avait de quoi remplir la panse des voyageurs et des rares personnes qui, pour une raison ou l’autre, ne pouvaient manger à la maison. Le menu typique coûtait 1,24$, la raison de ce chiffre précis étant que la province ne prélevait de taxe sur les repas qu’à partir de 1,25$…
Pour les plus jeunes il y avait aussi les « cabanes à patates frites ». On y servait le hot-dog à 0,15¢, le hamburger à 0,25¢, le cornet de frites pour 0,10¢ et la liqueur douce pour 0,07¢ sans la bouteille.
Jeux du Québec.Rivière-du-Loup - Gabor Szilasi-1971
On entendait bien parler, à la télévision ou par les cousins de la ville, de mets exotiques comme la pizza, le smoked-meat, le egg-roll ou le sous-marin; mais peu en avaient goûté. Quant aux McDonald's et autres Colonel Sanders, ils n’avaient pas encore franchi nos frontières.
Quand ils ne pouvaient aller dîner tranquillement en famille, les travailleurs partaient au travail (et les écoliers à l’école) avec une boîte à lunch.
Photo : foodblogga.blogspot.com
Tout va changer en même temps : les polyvalentes urbaines remplacent les écoles rurales, les gros cégeps ferment les petits collèges classiques, écoles normales et instituts de technologie. La centralisation des industries et le développement des banlieues rend impossible le retour à la maison pour dîner. Le féminisme transforme les ménagères en femmes de carrière. La hausse constante des salaires donne les moyens à tous de fréquenter des restaurants de plus en plus nombreux, de plus en plus spécialisés : pizzérias, comptoirs à smoked-meat, sandwicheries, restaurants chinois, steak houses… la génération des baby-boomers va faire éclater les frontières culinaires. Elle va aussi, et c’est plus triste, amener l’implantation tentaculaire des « fast-food ».
Les boomers vivent une expérience très rare dans l’histoire : en même temps que la nourriture surabonde, l’activité physique diminue considérablement. Plus question de bûcher au « sciotte », de remplir des camions se sable à la pelle ronde, de fendre du bois. Les travaux de force sont désormais réservés aux machines, les emplois sont de plus en plus sédentaires et de moins en moins physiques.
Il va falloir s’inventer de nouvelles activités pour brûler son énergie… et les excès de calories!
3 commentaires
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J’ai hâte de lire la suite…
Il paraît qu'on mangeait mal dans ce temps-là, qu'on mangeait trop gras... Mais à ma connaissance il n'y avait pas 30% d'obèses!