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Les Mystères Lescope (1)

durée 14 avril 2016 | 08h17

Ils étaient six dans le grand hall du Manoir Lescope.  Il y avait d’abord Didier Lescope, quatrième du nom, multimilliardaire, philatéliste enragé, salaud patenté.  Lescope comptait une cinquantaine d’années, deux divorces, un nombre incalculable de maîtresses et encore plus d’ennemis.  Ses invités à cette soirée, au nombre de cinq, étaient une ex-femme et une ancienne maîtresse, plus trois hommes qui chaque nuit rêvaient d’étriper leur hôte, de le décapiter, de le passer dans un hache-viande géant.

L’ex-épouse s’appelait Marion.  C’était une femme dans la jeune quarantaine, une véritable beauté dont la luxuriante chevelure avait la couleur de l’or natif, tandis que ses yeux étaient d’un vert aussi profond que l’émeraude.  Elle avait été mariée à Lescope pendant quinze mois :  un mois de bonheur dans l’ignorance, quatorze mois d’humiliations et de larmes.

Par contraste, Vanessa était brune, piquante, plus jolie que franchement belle.  Lescope s’était amusé d’elle au cours d’un été puis l’avait abandonnée sur une île des Caraïbes sans un mot d’adieu et sans un sou.  Mais Vanessa avait de la ressource : le lendemain elle avait mis le grappin sur Robert, un peu moins riche que Didier mais tout aussi passionné de philatélie et infiniment plus raffiné.  Lescope venait de lui souffler, dans une vente à l’encan, un lot rarissime de timbres de l’île Maurice;  il se vengea en épousant Vanessa et en la couvrant de tendresse et de bijoux. 

Les deux autres invités, Albert et Thomas, étaient des membres du gouvernement.  L’un comme l’autre avaient, à un moment ou l’autre, accordé à Lescope de juteux contrats en retour d’épaisses enveloppes brunes et de minces adolescentes...  Si certaines informations et certaines vidéos venaient à sortir dans le public, c’en était fait de leur carrière, de leur ménage et de leur liberté.

Pourtant, à les voir tous les six, ce soir-là, on aurait dit un groupe de véritables amis.  Sur une table de marbre, au centre du hall, six flûtes rehaussées d’or fin entouraient une bouteille du meilleur champagne, le tout disposé sur un plateau tournant.  Lescope fit sauter le bouchon, versa la précieuse liqueur dans les flûtes.  Puis il donna un élan au plateau, comme s’il voulait bien montrer à ses invités que le hasard empêcherait toute tentative d’empoisonnement…  Quand le plateau s’arrêta de tourner, chacun prit la coupe qui se trouvait devant lui.

À ce moment précis, on entendit sonner un téléphone dans une pièce voisine.

—Je dois absolument prendre ce coup de fil dans mon bureau, dit Lescope sans même s’excuser. Dégustez tranquillement votre champagne, je reviens dans un instant.

Puis il entra dans la pièce d’où provenait la sonnerie et ferma la porte derrière lui.  On entendit nettement la clé tournant dans la serrure.

—Quel mufle! s’écria Vanessa…  Nous n’aurions pas dû accepter cette invitation, ajouta-t-elle en regardant son mari.

—Il m’a promis de me céder une série du castor rouge de 1852, répondit Robert.  Mais vous?  demanda-t-il aux autres.

—À moi, il a promis de me rendre les bijoux qu’il a réussi à garder lors de notre divorce, répondit Marion avant d’avaler son champagne d’un trait.

—On ne refuse pas une invitation de Didier Lescope, murmura Thomas tandis qu’Albert hochait simplement la tête.

Un long silence s’installa.  Marion alla s’asseoir sur l’accoudoir d’un fauteuil.  Vanessa vida sa coupe de champagne lentement et la reposa sur le plateau tournant.  Robert, l’air un peu gêné, regardait autour de lui, cherchant où pourrait être l’entrée de la chambre forte abritant la collection de timbres de Lescope.  Thomas faisait les cent pas, l’air préoccupé, tandis qu’Albert fixait la porte close derrière laquelle avait disparu leur hôte.

Et soudain on entendit un gémissement venant du bureau, puis le petit bruit d’une clé tournant lentement dans la serrure.  La porte s’ouvrit à peine et Didier Lescope apparut, livide, la bave aux lèvres.  Il tenait dans sa main droite une liasse de papiers.  Il fit un pas, tomba sur les genoux puis glissa doucement sur le sol.

 

Je m’arrête ici pour cette semaine, curieux lecteurs.  Que pensez-vous qu’il va arriver maintenant?…  Essayez de l’imaginer.  Pour ma part je vous dis :  à la semaine prochaine pour la suite!

commentairesCommentaires

6

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  • Y
    Yoann
    temps Il y a 8 ans
    Il est mort de soif ? Parce qu'il est parti avant de boire sa coupe... ;)
    Non, sérieusement, j'ai hâte de savoir ce qui va se passer... déjà, je m'imaginais que c'était un stratagème pour laisser ses invités boire le champagne seuls, puisque ce dernier aurait été empoisonné. Vivement jeudi prochain !
  • MT
    M. Thériault
    temps Il y a 8 ans
    C’est super bien parti…. Trop court!! Sans blague, j’ai hâte de voir ce qui va arriver.
    Ma première impression est que c’est un coup monté avec un complice, peut-être pour qu’ils se déchirent entre eux (ils regarderont certainement ce que sont ces papiers et je pense qu’ils ont un rapport avec chacun d’eux) il savait qu’il devait absolument prendre ce téléphone dans son bureau, donc il était au courant de qui se trouvait au bout du fil. La clef dans la serrure, je pense qu’il est toujours possible qu’il voulait s’assurer que personne n’entre à l’improviste pour éviter que l’on découvre ou est caché son coffre-fort mais beaucoup plus probable pour les empêcher de voir ce qu’il mijotait de l’autre côté…

    On peut savoir : C’est la première de combien?
  • R
    Richard
    temps Il y a 8 ans
    @M. Thériault: restons dans le mystère: c'est la première de... 13, voyons! LE chiffre...
    @Yoann: " mort de soif"... Elle est bonne! Je n'y avais pas pensé, à celle-là'!
  • R
    Renée
    temps Il y a 8 ans
    Super belle intrigue! J'ai hâte de voir la suite!
    Il y a un coupable mais lequel? ....
    Et les papiers, qu'est-ce que c'est?????
  • J
    Joce
    temps Il y a 8 ans
    A suivre.....c'est le cas de le dire!
    Bravo Richard.
  • A
    Annie
    temps Il y a 8 ans
    C'est bien méchant M. Levesque. Vous nous brandissez un hameçon avec un beau ver dessus et là, v'lan! vous rembobinez d'un coup! On commence à peine à entrer dans l'histoire et bon... à la semaine prochaine... J'ai bien hâte de voir la suite. Je n'ose pas me prononcer, je suis peut-être un peu trop tordue, histoire de meurtre...
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