Voir travailler
C’est un gros chantier. Pour les gens de New York ou de Dubaï ce ne serait peut-être qu’une petite cabane, mais pour Rivière-du-Loup, c’est un gros chantier : plus de 90 appartements, avec une passerelle aérienne pour les relier au reste du complexe, plus les espaces de stationnement, l’aménagement paysager… Je vous parle du Bloc 7 de la Résidence des Bâtisseurs, sur la rue Fraser. Des balcons du sixième étage, on est aux premières loges pour suivre l’évolution des travaux. à l’électricité
Au début, j’avais le cœur serré de voir abattre des arbres; mais j’ai confiance que les propriétaires vont planter autant d’arbres qu’ils en ont fait couper, et sans doute de plus beaux. Fort heureusement les oiseaux sont restés, un peu plus loin peut-être, mais ils sont restés. Des corneilles qui chantent mal, des pics qui jouent de la batterie, mais aussi des carouges, des sansonnets, toutes sortes de joyeuses boules de plumes.
Je me suis découvert une âme de badaud. Il m’arrive de passer des quinze minutes sans rien faire d’autre qu’observer les ouvriers, les machines, le lent mouvement d’une naissance architecturale. J’aime voir travailler, essayer de comprendre les étapes, découvrir la raison d’être de cet empilement de madriers, l’utilité de ces montagnes de tuyaux, de longues tiges métalliques, de feuilles de contreplaqué.
Et puis il y a celui que j’appelle affectueusement le diplodocus… C’est en fait une grue spécialisée, avec un cou qui grimpe bien au-dessus de nos six étages puis se plie pour aller déverser aux endroits choisis le béton dont le nourrissent les camions-mélangeurs.
Il y a les bruits. Certains sont plus dérangeants que d’autres : la machine à tasser le sable, qui gronde comme un hélicoptère de combat. Certaines scies qui chantent comme des corneilles. Le pire, peut-être : les chocs en retour du panneau arrière des camions quand ils redescendent leur dompeuse. Par contre j’aime bien le bruit des marteaux, le bruissement des tiges de métal qui s’entrechoquent, la rumeur indistincte des ouvriers qui s’interpellent.
Le chantier a été arrêté pendant deux mois. C’est triste, un chantier mort. Même si ça nous occasionne certains inconvénients, j’étais heureux de voir reprendre les travaux. C’est avec un plaisir un peu coupable que je passe des quinze minutes, parfois, à regarder les menuisiers qui transportent les matériaux, les mesurent, les placent, les clouent. À voir les contremaîtres aller d’un coin à l’autre en consultant leurs plans. À observer les précautions des opérateurs de grues, de niveleuses, de camions. À écouter le mélange des bruits.
C’est joyeux, un chantier vivant. C’est plein de couleurs et de promesses.
Tiens, je vais aller faire un tour sur mon balcon!
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