La Jeunesse du Père Noël
20 décembre 2012 |
10h19
Savez-vous ce que faisait le Père Noël quand il était petit? Car il n’a pas toujours été gros, Noël; il n’a pas toujours été vieux. Avant d’avoir une longue barbe blanche, avant même d’avoir de la barbe, il a été un enfant, comme vous et moi.
Mais commençons par le commencement. Il y a longtemps, bien longtemps, comme vous le savez sans doute, ce n’était pas le Père Noël que les enfants attendaient avec impatience dans la nuit du 25 décembre… Pour la bonne raison que le Père Noël n’existait pas encore! Dans ce temps-là, c’était Saint Nicolas qui distribuait les cadeaux aux enfants sages. Ce même Saint Nicolas que les anglophones, en déformant un peu son nom, ont fini par appeler Santa Claus.
Or Saint Nicolas, qui était un grand saint, faisait parfois des miracles. Connaissez-vous l’histoire des trois petits enfants et du méchant boucher? C’est une histoire bien triste. Elle raconte qu’un soir, trois pauvres orphelins vinrent frapper à la porte d’un riche boucher pour lui demander l’hospitalité. Ils avaient glané dans les champs toute la journée, ils avaient bien froid dans leurs vêtements troués.
Or le riche boucher était un méchant homme. Il fit entrer les trois petits enfants, mais au lieu de leur donner à manger, au lieu de les amener près du foyer pour réchauffer leurs pauvres petits membres tout bleus de froid, il prit son grand couteau et les égorgea tous les trois. Puis il les découpa en morceaux et les jeta dans le saloir, avec les carcasses de bœufs et de cochons.
Sept ans plus tard, Saint Nicolas passait par là. Il s’arrêta chez le boucher et lui demanda l’hospitalité. Le boucher, tout content de recevoir chez lui un si grand personnage, le fit entrer avec force courbettes. Saint Nicolas demanda à souper; le boucher offrit du jambon, du veau… Saint Nicolas refusa tout ça et demanda du petit salé, qui était au saloir depuis sept ans. À ces mots le boucher comprit que son crime était connu; il prit ses jambes à son cou.
Alors Saint Nicolas alla s’asseoir sur le bord du saloir, il étendit trois doigts et les trois petits enfants sortirent en se frottant les yeux, tout heureux d’avoir si bien dormi.
Ça, c’est l’histoire du miracle de Saint Nicolas. Mais cette histoire ne dit pas ce qu’il advint ensuite des trois petits enfants. Si vous restez sages, je vais vous révéler aujourd’hui ce qui n’a jamais été révélé avant.
D’abord il faut que je vous dise que ces trois petits enfants, deux garçons et une fille, étaient des orphelins; quand il les eut sauvés du méchant boucher, Saint Nicolas les a en quelque sorte adoptés, en tout cas il les a gardés avec lui comme apprentis.
Le premier garçon, le plus vieux, était grand et maigre, avec un long nez planté dans un long visage. Il était d’un caractère soupçonneux, ne riait jamais et ne laissait jamais passer un mauvais coup sans en dénoncer l’auteur. On l’appelait Fouettard, d’abord parce qu’il était long et mince comme un fouet, ensuite parce qu’il semblait prendre plaisir à voir punir ceux qui n’étaient pas sages. En vieillissant, il est resté maigre et son nez s’est encore allongé. Son caractère ne s’est pas amélioré. On l’appelle maintenant le Père Fouettard, et dans certains pays il est aussi connu que le Père Noël. Les enfants de ces pays-là le craignent autant qu’ils aiment le Père Noël, car si ce dernier est chargé de distribuer des cadeaux et des friandises aux enfants sages, le Père Fouettard est chargé, lui, de distribuer les punitions aux enfants qui ont été méchants!
Ici le Père Fouettard n’est pas très connu, parce qu’ici tous les enfants sont plutôt sages. Toutefois le Père Fouettard a une grosse influence; quand un enfant demande des cadeaux au Père Noël, il arrive que le matin du 25 décembre, il soit un peu déçu; il arrive que ce qu’il reçoit ne soit pas aussi beau que ce qu’il avait demandé. Ça, c’est parce que le Père Fouettard est passé faire son rapport au Père Noël et qu’il a ajusté sa liste de cadeaux selon la sagesse des demandeurs. Alors si vous ne recevez pas le cadeau que vous aviez demandé, n’accusez pas le Père Noël : c’est le Père Fouettard qui a vu vos mauvaises actions de l’année…
Le deuxième des trois enfants sauvés par Saint Nicolas était une fille, une très jolie petite fille. En fait elle était tellement jolie qu’on l’appelait la Fée. Et le plus drôle c’est qu’en grandissant, la petite fille s’est aperçu qu’elle avait vraiment des dons de magicienne, qu’elle était véritablement une fée! Un jour, en regardant passer une étoile filante dans le ciel, sans savoir pourquoi, elle a levé la main et a dit :
—Viens ici, petite étoile!
L’étoile filante a changé sa course dans le ciel et elle est venue se poser sur la main ouverte de la Fée. Tout émerveillée, celle-ci est allée raconter son histoire à Saint Nicolas. Celui-ci a souri un peu tristement dans sa barbe, et il a dit :
—Alors tu n’es plus une petite fille… Il fallait bien que ça arrive un jour! À partir de maintenant, tu vas découvrir peu à peu tous tes pouvoirs. Et comme tu es bonne, tu n’utiliseras tes pouvoirs que pour le bien. Tu seras une bonne fée. Dorénavant, on t’appellera la Fée des Étoiles, car tu sais commander aux étoiles filantes…
Le troisième enfant, le plus jeune, était un gros garçon joufflu qui s’appelait Noël parce qu’il était né le 25 décembre. D’après Fouettard, Noël aurait gardé de son séjour dans le saloir le goût des viandes grasses et des repas plantureux. Ce qui est sûr en tout cas c’est que le petit Noël est devenu un gros bonhomme, avec de bonnes joues rouges et une confortable bedaine!
Saint Nicolas a tout de suite remarqué que Noël était toujours de bonne humeur, qu’il riait tout le temps. Quand il était là, tout le monde autour était joyeux et travaillait bien. Alors Saint Nicolas l’avait nommé en quelque sorte contremaître des lutins qui déjà, à cette époque, fabriquaient les jouets pour les enfants. Ainsi Noël se promenait dans tous les ateliers, il apprenait tous les métiers, il rencontrait tout le monde : les lutins ouvriers, peintres, couturiers, mécaniciens, cordonniers, tourneurs, relieurs, mais aussi les inventeurs, dessinateurs, fournisseurs…
En ce temps-là, les ateliers étaient dispersés un peu partout dans le monde. Les lutins d’Afrique fabriquaient les girafes et les éléphants en peluche, les gobelins d’Angleterre et d’Irlande cuisinaient certaines friandises, les farfadets d’Écosse et de France construisaient les petites voitures, les gnomes des pays du Nord se spécialisaient dans les poupées. Et j’en oublie beaucoup, bien sûr. Noël devait donc voyager dans le monde entier, et souvent il était accompagné de la Fée des Étoiles. Fouettard préférait rester auprès de Saint Nicolas pour lui rapporter les espiègleries des enfants du monde, qu’il espionnait avec une longue-vue magique.
Fouettard avait toujours eu l’air vieux. Noël, avec le temps, était devenu grand et gros; il avait déjà une petite barbe qui commençait à blanchir, et certains lutins commençaient à l’appeler le Père Noël. Quant à la Fée, comme elle est Fée, elle ne vieillit jamais.
En passant, il faut que je vous raconte comment ils ont découvert le Pôle Nord et ont fini par y construire un royaume.
Cette année-là, Noël et la Fée des Étoiles étaient allés visiter un atelier de gnomes en Laponie; là, les gnomes leur avaient offert en cadeau un attelage de rennes. Ils ont voulu tout de suite l’essayer, et c’est ainsi qu’en leur laissant la bride sur le cou, les rennes les ont menés jusqu’au Pôle Nord! Or le Pôle Nord, c’est le toit du monde, comme vous le savez. Noël s’est vite aperçu que c’était le meilleur endroit pour voir tout ce qui se passait dans tous les foyers de la terre. Et aussi que c’était l’endroit le plus central pour organiser la distribution des cadeaux aux enfants sages de partout… Quand ils sont revenus, Noël et la Fée des Étoiles ont beaucoup parlé entre eux de cet endroit merveilleux. Ils ont demandé aux gnomes de Laponie de leur garder leur attelage de rennes pendant quelque temps, puis ils sont retournés auprès de Saint Nicolas.
Saint Nicolas justement était bien, bien fatigué après des siècles et des siècles de travail. Quand Noël et la Fée lui ont raconté leur voyage et leurs idées, il s’est dit que maintenant, il pouvait sans crainte partir enfin pour le paradis. La relève était assurée. Avec le Père Noël et la Fée des Étoiles pour veiller sur eux, les enfants sages du monde entier seraient récompensés chaque année.
Alors un jour de janvier, après avoir distribué pour une dernière fois ses cadeaux, Saint Nicolas a réuni autour de lui tous ses amis. Au Père Fouettard, il a recommandé de rester juste mais de n’être pas trop sévère; après tout, même un enfant sage peut parfois commettre des bêtises. À la Fée des Étoiles, il a demandé de toujours rester avec le Père Noël, de l’aider de tous ses pouvoirs magiques, et aussi de veiller à ce qu’il ne mange pas trop… Aux lutins, il a recommandé d’aimer le Père Noël comme ils l’avaient aimé, lui, Saint Nicolas. Il leur a demandé aussi de lui rester toujours fidèles.
Au Père Noël, enfin, il a recommandé de travailler toujours au bonheur et à la joie des enfants du monde entier, aussi longtemps que les enfants croiraient en lui et aussi longtemps que les humains célébreraient la naissance de Jésus.
Ensuite il a pris son manteau blanc, son grand bâton et il est parti pour toujours.
Le Père Noël et la Fée des Étoiles sont alors retournés chez les gnomes de Laponie; ils ont repris leur attelage de rennes et ils sont remontés au Pôle Nord. Là, suivant les plans du Père Noël, la Fée des Étoiles a usé de ses pouvoirs magiques pour construire un royaume enchanté, avec un château, avec des maisons et des ateliers pour les lutins, avec des écuries pour les rennes, avec toutes sortes d’autres fabriques et d’autres usines merveilleuses. Ensuite la Fée a fait descendre un nuage d’étoiles de la Voie lactée; ce nuage a enveloppé le royaume d’un rideau d’invisibilité. C’est la raison pour laquelle les humains n’ont jamais pu voir le royaume du Père Noël : pour y entrer, il faut connaître la clé magique. Et cette clé, aucun humain ne la possède. Le rideau d’invisibilité a un autre pouvoir : il assure à tout le royaume une température confortable, même dans cet endroit qui est l’un des plus froids du monde.
Ensuite le Père Noël a fait venir de toute la terre les lutins, gnomes, gobelins et autres elfes, qui ont fini, au fil des siècles, par se fondre en une seule race. Et tous les travaux de confection des jouets et friandises ont été centralisés au royaume magique du Pôle Nord.
Enfin la Fée des Étoiles a nourri chacun des rennes avec du pollen d’étoiles filantes; ainsi ces rennes ont acquis le pouvoir de voler dans le ciel, et de se déplacer aussi vite que des éclairs.
Voilà; je pense avoir tout dit. Maintenant vous connaissez la véritable histoire du Père Noël, de son origine, de ses amis et de son royaume. Je vous demanderai seulement de ne pas révéler que c’est moi qui vous l’ai racontée. Vous comprenez, je suis moi-même un lutin qui a trop grandi, et je m’ennuie beaucoup depuis que je suis exilé chez les humains. Le Père Noël me permet parfois de visiter encore son royaume, là-haut, au Pôle Nord; mais s’il savait que j’ai trahi ses secrets, peut-être qu’il m’enlèverait la clé magique. Peut-être même qu’il m’enverrait le Père Fouettard…
Mais commençons par le commencement. Il y a longtemps, bien longtemps, comme vous le savez sans doute, ce n’était pas le Père Noël que les enfants attendaient avec impatience dans la nuit du 25 décembre… Pour la bonne raison que le Père Noël n’existait pas encore! Dans ce temps-là, c’était Saint Nicolas qui distribuait les cadeaux aux enfants sages. Ce même Saint Nicolas que les anglophones, en déformant un peu son nom, ont fini par appeler Santa Claus.
Or Saint Nicolas, qui était un grand saint, faisait parfois des miracles. Connaissez-vous l’histoire des trois petits enfants et du méchant boucher? C’est une histoire bien triste. Elle raconte qu’un soir, trois pauvres orphelins vinrent frapper à la porte d’un riche boucher pour lui demander l’hospitalité. Ils avaient glané dans les champs toute la journée, ils avaient bien froid dans leurs vêtements troués.
Or le riche boucher était un méchant homme. Il fit entrer les trois petits enfants, mais au lieu de leur donner à manger, au lieu de les amener près du foyer pour réchauffer leurs pauvres petits membres tout bleus de froid, il prit son grand couteau et les égorgea tous les trois. Puis il les découpa en morceaux et les jeta dans le saloir, avec les carcasses de bœufs et de cochons.
Sept ans plus tard, Saint Nicolas passait par là. Il s’arrêta chez le boucher et lui demanda l’hospitalité. Le boucher, tout content de recevoir chez lui un si grand personnage, le fit entrer avec force courbettes. Saint Nicolas demanda à souper; le boucher offrit du jambon, du veau… Saint Nicolas refusa tout ça et demanda du petit salé, qui était au saloir depuis sept ans. À ces mots le boucher comprit que son crime était connu; il prit ses jambes à son cou.
Alors Saint Nicolas alla s’asseoir sur le bord du saloir, il étendit trois doigts et les trois petits enfants sortirent en se frottant les yeux, tout heureux d’avoir si bien dormi.
Ça, c’est l’histoire du miracle de Saint Nicolas. Mais cette histoire ne dit pas ce qu’il advint ensuite des trois petits enfants. Si vous restez sages, je vais vous révéler aujourd’hui ce qui n’a jamais été révélé avant.
D’abord il faut que je vous dise que ces trois petits enfants, deux garçons et une fille, étaient des orphelins; quand il les eut sauvés du méchant boucher, Saint Nicolas les a en quelque sorte adoptés, en tout cas il les a gardés avec lui comme apprentis.
Le premier garçon, le plus vieux, était grand et maigre, avec un long nez planté dans un long visage. Il était d’un caractère soupçonneux, ne riait jamais et ne laissait jamais passer un mauvais coup sans en dénoncer l’auteur. On l’appelait Fouettard, d’abord parce qu’il était long et mince comme un fouet, ensuite parce qu’il semblait prendre plaisir à voir punir ceux qui n’étaient pas sages. En vieillissant, il est resté maigre et son nez s’est encore allongé. Son caractère ne s’est pas amélioré. On l’appelle maintenant le Père Fouettard, et dans certains pays il est aussi connu que le Père Noël. Les enfants de ces pays-là le craignent autant qu’ils aiment le Père Noël, car si ce dernier est chargé de distribuer des cadeaux et des friandises aux enfants sages, le Père Fouettard est chargé, lui, de distribuer les punitions aux enfants qui ont été méchants!
Ici le Père Fouettard n’est pas très connu, parce qu’ici tous les enfants sont plutôt sages. Toutefois le Père Fouettard a une grosse influence; quand un enfant demande des cadeaux au Père Noël, il arrive que le matin du 25 décembre, il soit un peu déçu; il arrive que ce qu’il reçoit ne soit pas aussi beau que ce qu’il avait demandé. Ça, c’est parce que le Père Fouettard est passé faire son rapport au Père Noël et qu’il a ajusté sa liste de cadeaux selon la sagesse des demandeurs. Alors si vous ne recevez pas le cadeau que vous aviez demandé, n’accusez pas le Père Noël : c’est le Père Fouettard qui a vu vos mauvaises actions de l’année…
Le deuxième des trois enfants sauvés par Saint Nicolas était une fille, une très jolie petite fille. En fait elle était tellement jolie qu’on l’appelait la Fée. Et le plus drôle c’est qu’en grandissant, la petite fille s’est aperçu qu’elle avait vraiment des dons de magicienne, qu’elle était véritablement une fée! Un jour, en regardant passer une étoile filante dans le ciel, sans savoir pourquoi, elle a levé la main et a dit :
—Viens ici, petite étoile!
L’étoile filante a changé sa course dans le ciel et elle est venue se poser sur la main ouverte de la Fée. Tout émerveillée, celle-ci est allée raconter son histoire à Saint Nicolas. Celui-ci a souri un peu tristement dans sa barbe, et il a dit :
—Alors tu n’es plus une petite fille… Il fallait bien que ça arrive un jour! À partir de maintenant, tu vas découvrir peu à peu tous tes pouvoirs. Et comme tu es bonne, tu n’utiliseras tes pouvoirs que pour le bien. Tu seras une bonne fée. Dorénavant, on t’appellera la Fée des Étoiles, car tu sais commander aux étoiles filantes…
Le troisième enfant, le plus jeune, était un gros garçon joufflu qui s’appelait Noël parce qu’il était né le 25 décembre. D’après Fouettard, Noël aurait gardé de son séjour dans le saloir le goût des viandes grasses et des repas plantureux. Ce qui est sûr en tout cas c’est que le petit Noël est devenu un gros bonhomme, avec de bonnes joues rouges et une confortable bedaine!
Saint Nicolas a tout de suite remarqué que Noël était toujours de bonne humeur, qu’il riait tout le temps. Quand il était là, tout le monde autour était joyeux et travaillait bien. Alors Saint Nicolas l’avait nommé en quelque sorte contremaître des lutins qui déjà, à cette époque, fabriquaient les jouets pour les enfants. Ainsi Noël se promenait dans tous les ateliers, il apprenait tous les métiers, il rencontrait tout le monde : les lutins ouvriers, peintres, couturiers, mécaniciens, cordonniers, tourneurs, relieurs, mais aussi les inventeurs, dessinateurs, fournisseurs…
En ce temps-là, les ateliers étaient dispersés un peu partout dans le monde. Les lutins d’Afrique fabriquaient les girafes et les éléphants en peluche, les gobelins d’Angleterre et d’Irlande cuisinaient certaines friandises, les farfadets d’Écosse et de France construisaient les petites voitures, les gnomes des pays du Nord se spécialisaient dans les poupées. Et j’en oublie beaucoup, bien sûr. Noël devait donc voyager dans le monde entier, et souvent il était accompagné de la Fée des Étoiles. Fouettard préférait rester auprès de Saint Nicolas pour lui rapporter les espiègleries des enfants du monde, qu’il espionnait avec une longue-vue magique.
Fouettard avait toujours eu l’air vieux. Noël, avec le temps, était devenu grand et gros; il avait déjà une petite barbe qui commençait à blanchir, et certains lutins commençaient à l’appeler le Père Noël. Quant à la Fée, comme elle est Fée, elle ne vieillit jamais.
En passant, il faut que je vous raconte comment ils ont découvert le Pôle Nord et ont fini par y construire un royaume.
Cette année-là, Noël et la Fée des Étoiles étaient allés visiter un atelier de gnomes en Laponie; là, les gnomes leur avaient offert en cadeau un attelage de rennes. Ils ont voulu tout de suite l’essayer, et c’est ainsi qu’en leur laissant la bride sur le cou, les rennes les ont menés jusqu’au Pôle Nord! Or le Pôle Nord, c’est le toit du monde, comme vous le savez. Noël s’est vite aperçu que c’était le meilleur endroit pour voir tout ce qui se passait dans tous les foyers de la terre. Et aussi que c’était l’endroit le plus central pour organiser la distribution des cadeaux aux enfants sages de partout… Quand ils sont revenus, Noël et la Fée des Étoiles ont beaucoup parlé entre eux de cet endroit merveilleux. Ils ont demandé aux gnomes de Laponie de leur garder leur attelage de rennes pendant quelque temps, puis ils sont retournés auprès de Saint Nicolas.
Saint Nicolas justement était bien, bien fatigué après des siècles et des siècles de travail. Quand Noël et la Fée lui ont raconté leur voyage et leurs idées, il s’est dit que maintenant, il pouvait sans crainte partir enfin pour le paradis. La relève était assurée. Avec le Père Noël et la Fée des Étoiles pour veiller sur eux, les enfants sages du monde entier seraient récompensés chaque année.
Alors un jour de janvier, après avoir distribué pour une dernière fois ses cadeaux, Saint Nicolas a réuni autour de lui tous ses amis. Au Père Fouettard, il a recommandé de rester juste mais de n’être pas trop sévère; après tout, même un enfant sage peut parfois commettre des bêtises. À la Fée des Étoiles, il a demandé de toujours rester avec le Père Noël, de l’aider de tous ses pouvoirs magiques, et aussi de veiller à ce qu’il ne mange pas trop… Aux lutins, il a recommandé d’aimer le Père Noël comme ils l’avaient aimé, lui, Saint Nicolas. Il leur a demandé aussi de lui rester toujours fidèles.
Au Père Noël, enfin, il a recommandé de travailler toujours au bonheur et à la joie des enfants du monde entier, aussi longtemps que les enfants croiraient en lui et aussi longtemps que les humains célébreraient la naissance de Jésus.
Ensuite il a pris son manteau blanc, son grand bâton et il est parti pour toujours.
Le Père Noël et la Fée des Étoiles sont alors retournés chez les gnomes de Laponie; ils ont repris leur attelage de rennes et ils sont remontés au Pôle Nord. Là, suivant les plans du Père Noël, la Fée des Étoiles a usé de ses pouvoirs magiques pour construire un royaume enchanté, avec un château, avec des maisons et des ateliers pour les lutins, avec des écuries pour les rennes, avec toutes sortes d’autres fabriques et d’autres usines merveilleuses. Ensuite la Fée a fait descendre un nuage d’étoiles de la Voie lactée; ce nuage a enveloppé le royaume d’un rideau d’invisibilité. C’est la raison pour laquelle les humains n’ont jamais pu voir le royaume du Père Noël : pour y entrer, il faut connaître la clé magique. Et cette clé, aucun humain ne la possède. Le rideau d’invisibilité a un autre pouvoir : il assure à tout le royaume une température confortable, même dans cet endroit qui est l’un des plus froids du monde.
Ensuite le Père Noël a fait venir de toute la terre les lutins, gnomes, gobelins et autres elfes, qui ont fini, au fil des siècles, par se fondre en une seule race. Et tous les travaux de confection des jouets et friandises ont été centralisés au royaume magique du Pôle Nord.
Enfin la Fée des Étoiles a nourri chacun des rennes avec du pollen d’étoiles filantes; ainsi ces rennes ont acquis le pouvoir de voler dans le ciel, et de se déplacer aussi vite que des éclairs.
Voilà; je pense avoir tout dit. Maintenant vous connaissez la véritable histoire du Père Noël, de son origine, de ses amis et de son royaume. Je vous demanderai seulement de ne pas révéler que c’est moi qui vous l’ai racontée. Vous comprenez, je suis moi-même un lutin qui a trop grandi, et je m’ennuie beaucoup depuis que je suis exilé chez les humains. Le Père Noël me permet parfois de visiter encore son royaume, là-haut, au Pôle Nord; mais s’il savait que j’ai trahi ses secrets, peut-être qu’il m’enlèverait la clé magique. Peut-être même qu’il m’enverrait le Père Fouettard…
Commentaires
26
26 commentaires
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Tout cela se tient, est d'une cohérence tissée serrée, m'éclaire --enfin!-- sur la vraie et complète histoire du Père Noël, des liens intimes mais qui ne m'avaient jamais encore été explicités entre Saint Nicolas et l'un de ses deux fils et de sa fille, de ce trio d'enfants adoptés après leur terrible rencontre avec cet exécrable boucher.
Là, j'hésite, chu pas sûr: d'un côté ( du côté droit, en bas), il y a ce bouton qui me sollicite avec son "Dites-le !" , mais de l'autre côté y'a ce brillant auteur qui me demande de ne pas révéler son identité...
Je me contenterai de lui demander le # de Tél de la Fée, ou son courriel, s'il l'a.
C'est que je voudrais demander à cette Belle Fée si elle n'aurait pas encore un peu de ce pollen d'étoiles filantes et si elle acceptait de m'en nourrir quelques gouttes!
Il y a de belles trouvailles: l’explication pour le nom de la Fée, la longue-vue magique, le nuage d’étoiles, la clef magique, le pollen d’étoiles filantes…. C’était un plaisir à lire et de plus, ça recrée devant nos yeux la magie de Noël. Mais dorénavant, il faudra me méfier et craindre davantage les foudres de cet horrible et méchant personnage qu’est le Père Fouettard!
J’y ai retrouvé mon cœur d’enfant. C’est beau ce que vous écrivez.
Mais si j'étais toi, j'éviterais le pollen d'étoiles filantes. Un de mes confrères lutins a essayé, dans le temps... Ses pieds se sont élargis en sabots, il lui est poussé un solide panache, bref il a été changé en renne. Ça ne lui plaisait pas plus que ça, alors malheureusement il s'est mis à boire plus que de raison, et à la longue il a attrapé la trogne des ivrognes, tu sais, le gros nez rouge...
Comment s'appelait-il, donc? Ah! oui, quelque chose comme Rodolphe, ou Rudolf, je ne sais plus trop...
Tu es chanceux Richard de recevoir un si beau compliment de ta nièce Chantal. Très touchant que son commentaire.
Tout est en place pour un beau Noël d'Antan: la neige, le vent et...pas de fin du monde! Juste un peu de paix, partout sur la terre, souhaitons-le.
Marie
Merci pour ton dernier texte qui démontre , comme toujours, ton solide talent d'écrivain. À ceci s'ajoute ton extraordinaire sens du merveilleux qui réussit à impressionner ton lecteur texte après texte... Par ailleurs, crois-tu que la Fée des Étoiles pourrait me donner pour Noël un putter magique? On peut toujours rêver, n'est-ce pas?
À bientôt.
-- « Mais non, répondis-je. Mon père ne s'est pas gelé la nuque! »
Parfois, ces quiproquos peuvent mener à des chicanes, comme la fois où ma copine Lorraine me demande « Pour qui t'a voté aux dernières élections? » et que, tout rouge de gêne, je lui réponds « Elle s'appelait Maryse, mais c'était des années avant qu'on se connaisse, ma chérie! »
Le pire, c'est que je ne suis pas du tout convaincu que je souffre d'un problème mécanique au niveau de mon appareil bio-auditif sonore! Pour en avoir la preuve scientifique, je me suis placé sur la liste d'attente du CHRGP afin de subir un test d'audiologie. Après deux ans d'attente, j'ai finalement pu rencontrer la technicienne et je conserve précieusement copie des résultats de ces tests en chambre insonorisée et avec écouteurs . Je puis fièrement produire le verdict officiel et objectif : « PERCEPTION AUDITIVE NORMALE ». Il me semblait aussi que j'entendais bien! J'étais arrivé à cette conclusion, bien avant l'examen de l'audiologiste, grâce à des expériences répétées où, marchant en forêt avec d'autres bipèdes, j'étais souvent le premier à entendre un train, ou un avion ou un véhicule au loin et qui s'approchait.
Non, mon problème est au niveau du décodage. Comme si, dans ma tête où tout va trop vite, et étant un peu trop « au premier degré » , parmi la myriade d'interprétations possibles de ces sons émis par les gens qui me parlent, j'oublie le contexte et les conventions langagières locales et j'adopte une interprétation qui s'avère être dans le « champ gauche »!
À moins que, comme ce pauvre Adolphe, j'ai besoin qu'on parle à mon cœur...
Pensez-vous que je pourrais abuser de vos liens privilégiés et demander au Père Noël de me donner, pour 2013, une meilleure année que celle que j'ai eue en 2012? C'est le seul cadeau que je voudrais recevoir. Malgré les pièges qui, je crois maintenant en lisant votre histoire, ont sûrement été mis sur ma route par Fouettard, j'ai quand même réussi à rester sage... Je crois que je le mériterais. Merci de lui faire suivre ma requête.
Je vous souhaite de passer un beau temps des Fêtes et je vous souhaite une bonne année 2013, avec plein de ce que vous désirez le plus...
J'espère donc le meilleur pour toi, Annie, pour tout le reste de l'avenir!
Je n’ai pas réussi à mettre la main sur « La Rumeur Du Loup » ce mois-ci.
Mais si d’autres sont dans la même situation que moi, voici le lien pour y accéder.
Bonne lecture!
http://www.rumeurduloup.com/uploads/1/0/0/8/10084669/rdl50_dcembre_2012web_lh.pdf
nous enrichissent...
Nos conversations évoqueront certainement les écrits que tu viens patiemment nous servir..pour le plaisir.
Bien à vous,
Drahcir Euqsevel, ancien lutin nostalgique...
"L'homme est un dieu déchu qui se souvient des cieux" ?
Je l'ai traduit comme ceci:
"L'adulte est un enfant déchu qui se souvient de l'enfance"...