Une Louperivoise témoigne du séisme à Mexico City
En huit ans passés à Mexico City, la Louperivoise Lynn Théberge n’avait jamais vécu un tremblement de terre aussi puissant. Quand la terre a tremblé, ce 19 septembre, elle a cru pour une première fois que sa résidence allait s’écrouler. Saine et sauve, elle témoigne aujourd’hui de la grande solidarité des Mexicains dans ces circonstances catastrophiques.
Lynn Théberge était à la maison, d’où elle travaille, quand le séisme d’une magnitude de 7,1 a frappé le centre du Mexique pendant près d’une minute en tout début d’après-midi, mardi dernier.
«C’était une journée tout à fait normale. Vers 13 h, j’étais au 3e étage de la maison quand j’ai subi un sentiment d’étourdissement. Une petite voix m’a dit de tout lâcher et de descendre rapidement. C’est ce que j’ai fait», raconte-t-elle.
À peine quelques secondes plus tard, le sol était secoué violemment et les maisons voisines valsaient toutes ensemble. Lynn Théberge a tout de suite eu une pensée pour sa fille alors à l’école tout près de la maison.
«Je pense que je n’ai même pas pris le temps de mettre mes souliers. Je me suis précipité à l’école juste en face pour voir s’ils avaient besoin d’aide, si tout le monde était correct. Les jeunes étaient sous le choc, mais personne n’était blessé, heureusement.»
«TRÈS CHANCEUX»
Mme Théberge et son conjoint habitent dans la zone rocheuse d’Ajusco, un peu à l’extérieur de la ville de Mexico City. Avec beaucoup de chance, ce secteur a été plutôt épargné par le tremblement de terre.
«C’est quelque chose à laquelle on a pensé quand on a acheté la maison. Mais pour une première fois, je croyais vraiment qu’elle allait s’écrouler. Ç’a brassé énormément. Nous n’avons finalement subi que des dommages matériels. Nous avons été très chanceux», note-t-elle. À ce jour, les autorités ont dénombré près de 300 morts, dont une vingtaine d’enfants.
Après la secousse, il aura fallu plusieurs longues minutes avant que Lynn puisse avoir des nouvelles de son conjoint, lui qui travaille en ville. Souvent, après une catastrophe, les réseaux cellulaires sont inaccessibles. Trop de personnes tentent d’appeler un proche.
«Mon copain revenait d’un rendez-vous au centre-ville. Quand le séisme a frappé, il était dans sa voiture. Son véhicule avançait et reculait d’un mètre tout seul», raconte-t-elle, au bout du fil. «C’était horrible. Il a craint que l’autoroute ne résiste pas.»
L’électricité étant coupée, la petite famille a passé les heures suivantes entre voisins à l'extérieur. Ils ont partagé des repas et les enfants ont joué ensemble. «Personne ne voulait vraiment rentrer chez soi. On avait peur des répliques», explique la Louperivoise. «Encore aujourd’hui, il y a un certain traumatisme. Nous sommes restés à la maison au cours des derniers jours, il y a cette peur que cela recommence.»
ENTRAIDE
Terrible coïncidence, le 19 septembre 2017 marquait le 32e anniversaire, jour pour jour, d’un des tremblements de terre les plus meurtriers de l’histoire mexicaine. Plus de 10 000 personnes y avaient alors perdu la vie. Partout au pays, la plaie est d’ailleurs toujours fragile.
«Plusieurs personnes qui ont vécu le drame de 1985 sont toujours marquées, mais c’est aussi ceux qui aujourd’hui ont porté secours et participent aux recherches. La solidarité ici est extraordinaire.»
Cette entraide, c’est peut-être ce qui émeut le plus Lynn ces jours-ci. Plusieurs citoyens aident aux recherches, forment des chaînes humaines pour déplacer des débris et transportent des denrées. Elle croit que les démarches pour retrouver des survivants pourraient s’échelonner encore sur quelques jours.
«Les gens ont déjà donné énormément de nourriture et de vêtements. Plusieurs des endroits où l’on recueillait les denrées sont saturés. Les surplus ont été redistribués là où il y avait des besoins», témoigne celle qui tente d’aider comme elle le peut.
Lynn Théberge reste cependant très critique envers le gouvernement «qui ne met pas ses culottes», selon elle, puisqu’il n’aide en rien. Pire encore, celui-ci intercepterait les voyages de denrées et les garderaient dans des entrepôts afin de les utiliser plus tard comme capital politique.
«Malheureusement, c’est connu ici, mais pas assez à l’international. Le gouvernement garde les denrées afin de les remettre dans quelques mois en campagne électorale. Utiliser une catastrophe naturelle et humaine pour se faire réélire. Pour moi, qui est Canadienne, c’est inimaginable.»
La Louperivoise explique même que des gens s’organisent maintenant pour aller porter eux-mêmes, en voiture, les denrées qu’ils souhaitent faire parvenir aux gens dans le besoin. Ils s'assurent ainsi de leur arrivée à bon port.
Rappelons que le tremblement de terre du 19 septembre a frappé un Mexique encore sous le coup d'un séisme de magnitude 8,2, soit le plus puissant en un siècle, qui a fait une centaine de morts et plus de 200 blessés, le 7 septembre dernier seulement, dans le sud.
«Les gens retourneront aux travail et à l'école dans les prochains jours. La vie tentera de reprendre son cours, mais ce sera pas facile. Les débris prendront du temps à disparaitre.» Pour certains, les images et les souvenirs aussi, malheureusement.
Le Mexique est l’un des pays au monde où l’activité sismique est la plus forte, puisqu’il est situé au centre de cinq plaques techtoniques.
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