Varia d'été
François Drouin
Par où commencer ? Les derniers mois ont été éprouvants, difficiles. Je ne laisse jamais ma vie personnelle influencer ma vie professionnelle (et j'essaie de faire en sorte que l'inverse soit aussi vrai), mais depuis mars, j'ai dû me résoudre à faire quelques compromis, dont celui de ma présence sur ce blogue.
Vous n'avez pas perdu au change, l'ami Pierre Sénéchal y est allé de quelques billets particulièrement réussis sur les 100 dessins.
Voici donc ce «petit» varia, sur la mort, la France, le cancer et Antoine Desilets.
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La mort
En mai dernier, j'ai eu la douleur de perdre mon père, à quelques jours de ses 77 ans. Trop jeune, trop tôt. C'est toujours trop tôt. Il m'aura toutefois gratifié de quelques derniers enseignements, dont celui de mourir dans la dignité, sans concession, et droit.
J'ai effectué plusieurs allers-retours à Sherbrooke alors qu'il se trouvait aux soins intensifs du CIUSSS Fleurimont. Après le boulot. Quatre heures à l'aller, la tête pleine d'interrogations, quatre heures au retour, tard le soir ou en pleine nuit, tantôt guidé par l'espoir, puis fatalement, le cœur en miettes devant l'inéluctable fin.
Dans les longs silences, seulement brisés par une application de guidage me prévenant des dangers routiers, les kilomètres ont défilé. Et dans ce défilement, une chose m'a marqué, la présence de nos industriels sur les routes du Québec. Transports RDL et Morneau sont partout, des camions de Lepage Millwork et de Prelco ici et là, même chose pour Aliments ASTA et Cascades. Pas seulement dans un rayon bas-laurentien, mais au centre du Québec. Quel rayonnement.
J'ai plongé dans mes souvenirs et je me suis rappelé cet émerveillement à mon arrivée à Rivière-du-Loup au début des années 90. C'était le cégep, la liberté, mais c'était aussi ce fleuve aux grandes eaux si magnifiques, le dynamisme des gens, les artistes que je voyais partout. Et puis, il y avait (elle y est toujours) cette rue Lafontaine. J'y ai plus tard habité pendant près de 10 ans. Et habité n'est pas trop fort, j'y avais mon café (les Sucreries de Jojo), mon magasin de plein air (Plein Vent), mon médecin, ma pharmacie, ma quincaillerie, mon épicerie, ma SAQ, mes restos, mes bars, mon fromager et charcutier, et même ma saucissière. Oui la «Laf» a changé depuis.
Je suis tombé en amour avec Rivière-du-Loup comme on tombe en amour à l'été de ses 12 ans. Sans retenue, sans arrière-pensée, naïf et rêveur.
Surtout, j'y ai rencontré l'amour de ma vie, ma belle amoureuse qui partage cette vie un peu folle avec moi depuis 31 ans. Dès le départ, nous savions que Rivière-du-Loup était notre ville. Après nos études à l'Université de Trois-Rivières, nous sommes revenus à Rivière-du-Loup, elle avec un emploi temporaire, moi avec l'espoir d'y faire ma place, d'y vivre ma vie d'adulte.
Je suis né à Montréal, une ville que j'adore, que je connais bien, mais où j’ai peu vécu, ma famille déménageant à Laval, et surtout, à Thetford Mines tout juste avant mes 11 ans. J'ai détesté Thetford tous les jours de ma vie là-bas. Ville minière, froide, grise, pluvieuse, poussiéreuse. Alors, imaginez comment mon cœur battait la chamade lorsque je me suis posé ici dans ce magnifique Bas-Saint-Laurent.
Au fil des ans, j’ai vu Rivière-du-Loup passer de 10 000 à 20 000 de population, j'ai vu des PME devenir des multinationales, j’ai découvert les villes et villages qui composent le KRTB, ces Basques que j'aime tant, ce lac Témiscouata qui me rappelle un peu du réservoir Taureau qui a bercé mes étés pendant une douzaine d'années. Mes enfants sont nés ici. J'y mourrai sans doute.
Mais KRTB, tu ne cesses de m'impressionner. Ta culture s'est enrichie de tous ceux que tu as accueillis, une métissage heureux. Ta capacité à innover, à te renouveler, à inventer me rend fier d'être un citoyen bas-laurentien. De Premier Tech à la petite boulangerie locale, il y a ici une qualité de vie exceptionnelle. Je n'aurais pas voulu voir mes enfants grandir nulle part ailleurs.
Alors que la route et les kilomètres déroulaient tout aussi rapidement que la vie abandonnait mon père, entre deux embruns de larmes, c'est ce à quoi je pensais, ce à quoi je m'accrochais.
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Cancer
Je n'aurai pas eu le temps de pleurer mon père longtemps que ma belle amoureuse entamait son combat contre le crabe, ce foutu cancer. Entre les préparations, les examens, puis l'opération, toujours en mai, elle a été un exemple de force et d’une résilience à toute épreuve. Digne et magnifique.
Il est aberrant de voir à quel point un système de santé qui nous coute aussi cher, qui avale une part si énorme de nos impôts, arrive quand même à échapper autant de vies. Heureusement, dès que son dossier est arrivé entre les mains des gens de l’Hôtel Dieu de Québec, le système lui a offert sa meilleure version. Il était minuit moins une. Aux docteurs Parent et Claveau, merci.
Aux imbéciles qui lui ont crié «hey le cowboy» alors qu’elle marchait la semaine dernière en bordure de la rue Fraser, sachez que son foulard et son chapeau à large rebord protège sa cicatrice (de plus de 150 points) du soleil. La prochaine fois, ne vous étonnez pas si le parebrise arrière de votre véhicule vole en éclat. J’ai encore un bras pour lancer une rapide avec précision.
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En France
Ce qui est le plus magnifique avec les élections en France, ce n’est pas tant l’échec de la droite et de l’extrême droite, non. C’est plutôt l’extraordinaire réponse du peuple français. Cette mobilisation unique. Tandis qu’ici on déchire notre chemise pour du béton, un pont, un tunnel, là-bas, ils ont su se mobiliser pour leurs valeurs intrinsèques. C’est beau.
Cerise sur le gâteau, cette mobilisation a mis en lumière la faillite de tout l’argumentaire du pauvre Mathieu Bock-Coté, complètement déstabilisé, hystérique. À voir en cliquant sur le lien suivant : https://www.facebook.com/xavier.camus.9/videos/1201286924629548
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Antoine-Desilets
Je le dis depuis longtemps, et j'aurais dû l'écrire bien avant, mais Andréanne Lebel sera la prochaine photojournaliste du Bas-Saint-Laurent à remporter le prestigieux prix Antoine-Desilets. Voilà, c'est dit, c'est écrit. Et elle pourrait réussir ce haut fait d'armes dès cette année. Sa photo de Louis-Jean Cormier remplit tous les critères d'une photo gagnante. Et si ce n'est pas celle-là, ç'en sera une autre !
Andréanne est une professionnelle jusqu'au bout des doigts. Oubliez ces journalistes vindicatifs auxquels les lecteurs et auditeurs sont trop souvent confrontés. Ces scribes qui mélangent intérêt personnel, opinion et journalisme. Ces verbeux qui ne prennent pas la peine de colliger l'information, qu'une seule source suffit à leur faire produire un texte flou, mal écrit, et au conditionnel. Andréanne incarne le journalisme moderne dans toute sa rigueur. À cette rigueur s’ajoute une belle touche de créativité qu’elle n’hésite plus à laisser s’exprimer.
Je le répète, elle remportera un prix Antoine-Desilets, plus tôt que tard. Et si un jour, elle met la main sur un prix Judith-Jasmin, je ne serai pas surpris.
De mon côté, je conserve précieusement mes courriels échangés avec M. Desilets après avoir remporté ce prix en 2014, ce grand maitre de la photo, du photojournalisme. Il était un des héros de mon père. Quand j’ai débuté la photo au Cégep de Rivière-du-Loup, mon paternel m’a dit «trouve-toi un livre d’Antoine Desilets, lis-le, et fais ce qu’il recommande. C'est le meilleur.» J’ai suivi ce conseil, judicieusement.
Dieu que mon père était fier quand il a vu le prix.
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