Enfumage
Pierre Sénéchal
Laissez-moi vous entretenir d’un art ancien, datant des temps immémoriaux : l’enfumage, pratique qui allie maitrise du feu, dosage des carburants et gestion méticuleuse des énergies. L’enfumage est un procédé passablement versatile. Présente dans différentes cultures, aux déclinaisons variées, que ce soit pour magnifier les aliments, se protéger des dangers, communiquer et mystifier les antagonistes, elle offre toujours cette intangibilité laissant celui qui admire tenter de comprendre ce que ses sens ne peuvent saisir.
Fumage
De l’art culinaire on retient généralement de l’enfumage qu’il offre de la saveur et du caractère aux aliments, particulièrement les pièces de viande coriaces et, au sommet de son raffinement à des aliments nobles tel des poissons et de fromages. Ce qui représente une évolution pour ne pas dire une révolution, car au moyen âge l’enfumage de la viande servait majoritairement à camoufler le gout faisandé des restes avariés et des coupes mal conservées laissant les malheureux privés d’acuité olfactive s’alimenter à leurs propres risques.
Fumée
L’homme s’est également prémuni du danger par la fumée de toute époque, au fil des rigueurs de l’existence et des multiples conflits. Il a tôt fait de saisir le pouvoir dissuasif et la crainte qu’inspirait le feu et la fumée d’abord chez les bêtes puis chez ses semblables, par asphyxie, perte de sens et frayeur. Une opportunité de se dissimuler et d’éloigner le danger un tant soit peu. Notez au passage l’omniprésence des émotions liées à un tel processus de défense qui engendre la peur et le doute, déforme la réalité et à coup sûr mystifie l’opposant.
Fumistes
L’enfumage transposé au niveau de la pensée est une méthode efficace d’abuser et de tromper par l’usage d’un narratif truffé de fausses promesses et de mensonges bien emballés. Enfumer quelqu’un c’est en quelque sorte le tromper avec tellement d’élégance que son retour à la lucidité ne se fera que trop tard, impossible de changer quoi que ce soit. Il est l’apanage des beaux parleurs, des fourbes et des manipulateurs dont les proies nourrissent leurs égos et leurs intérêts.
Les salopards savent nourrir les croyances au détriment de la connaissance, ils vous font miroiter richesse et bonheur avec une certitude inébranlable, mais au final ils n’ont qu’un seul objectif, vous déposséder de ce qui vous est le plus précieux. Ils n’hésiteront pas à vous enfumer tel des abeilles pour vous déposséder de votre énergie vitale et ultimement de votre précieux miel.
Cette analogie n’est pas anodine au sens de notre collectivité, notre ruche québécoise. Actuellement, des enfumeurs sont à l’œuvre pour se réquisitionner de notre bien le plus précieux, notre miel, notre hydromel, notre énergie propre… notre hydroélectricité. Un enchainement d’évènements mené par un ministre pas si super à l’éthique plus que discutable cogite actuellement un projet de loi qui fractionnerait le monopole d’état d’Hydro Québec de vendre notre énergie au profit … de l’entreprise privée. Je n’ai pas souvenance d’avoir mandaté aucun gouvernement pour agir en ce sens en aucun moment. Juste d’y penser est absolument ahurissant et inconcevable et si cela devait arriver, une totale transparence serait exigée, rien de moins.
Mais connaissant l’individu qui pilote actuellement ce dossier, on se dit que, chemin faisan, il y a tellement de feu et de fumée qu’il est impossible de s’y retrouver. Et SVP, lâchez-moi avec le show de boucane des Nordiques, des Kings, toutes ces conneries … on est en train de nous voler Hydro Québec.
«Il y a tellement de fumée qu’on arrive plus à distinguer le blanc du noir et l’énergie du désespoir» - Michel berger
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