Une grosse balloune
Pierre Lachaîne
Le plus gros tunnelier au monde fait 15,08 mètres de diamètre et 182 mètres de long. Il a été conçu en Chine par la société China Railway Tunnel Group. De l’équipement similaire a été utilisé pour la construction du tunnel reliant Calais (France) à Folkestone (Royaume-Uni). Mais qu’à cela ne tienne! Celui prévu pour la construction du troisième lien entre Québec et Lévis allait être encore plus gigantesque.
Au début de la semaine dernière, la ministre des Transports et vice-première ministre du Québec, Geneviève Guilbault, annonçait que son gouvernement n’irait plus de l’avant avec le projet de construction d’un lien autoroutier sous-fluvial entre Québec et Lévis. Le projet de construction d’un lien sous-fluvial persiste, mais il serait consacré au transport en commun. Le type de transport choisi n’a pas été révélé.
Nous ne sommes plus surpris d’entendre des énormités en campagne électorale. De promesses en promesses, nous finissons toujours par nous dire que tout cela est de la frime. Les campagnes se terminent par l’élection d’un gouvernement et nous retournons dans nos routines. Mais voilà, cette histoire du troisième lien perdure dans le temps. On en parlait sous le gouvernement de Maurice Duplessis. Dans sa dernière version, l’évaluation très sommaire tourne autour de cinq milliards de dollars. Elle était de dix milliards juste avant que l’on abandonne les automobilistes. La CAQ a roulé avec le projet pendant l’élection de 2018 et celle de 2022.
Les larmes… Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, s’est excusé auprès de ses électeurs avec des trémolos dans la voix. En fait, la plupart des ministres ont eu l’air penaud puisque mis devant le fait accompli. Quelle surprise d’entendre tou.tes ces élu.es nous raconter qu’au sein de leurs circonscriptions respectives les maires et les préfets étaient en pleurs, sans mot devant une telle trahison.
J’ai bien essayé de retourner la situation dans tous les sens. Je ne comprends pas. Est-ce qu’on se serait raconté des balivernes pendant des années voire des décennies et on aurait fini par y croire? Un projet pour lequel il n’y a jamais eu autre chose que des plans de communication. Jamais d’études de faisabilité dignes de ce nom. Pas d’études d’impact environnemental, de quelle composition des sols parlons-nous? Y a-t-il présence d’espèces à risque, existe-t-il un danger potentiel pour les écosystèmes? RIEN.
« Lâchez-moi avec les GES » nous disait le ministre Drainville. Pardon? Dans un article paru dans Le Devoir, je crois que c’était en février, Jean-François Lisée parlait d’une fenêtre qui se rétrécissait. Vous savez la fenêtre dont parlent les scientifiques, une image pour nous signaler que le temps passe vite et que le moment pour atteindre les cibles de réduction des températures du globe est à nos portes. M. Lisée en arrivait à la conclusion que ladite fenêtre était déjà fermée. Le mot qui me vient à l’esprit est « amateurisme ». Une aventure de dix milliards de dollars d’argent public sans des assises rigoureuses, sans fondements scientifiques. Un mensonge, un subterfuge, une erreur que l’on colporte depuis autant d’années. En fait, depuis 2018 on transporte une valise remplie de faux-fuyants, de tergiversations, de demi-vérités et quoi encore.
Comme le disait si bien Voltaire : « Si vous voyez un banquier sauter par une fenêtre, hâtez-vous de le suivre c’est qu’il y a quelques bons profits à faire. »
Maintenant, avec la nouvelle mouture, un tunnel voué au transport collectif arrive encore avec son lot de questions. Quel type de transport? Routier ou ferroviaire? J’ai bien peur d’y voir encore une valise dans laquelle on nous demande de sauter. Vous savez le saut de la foi. Vous posez un pied dans le vide et…
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