Sortie de crise(s)
Samuel Saint-Denis-Lisée
Les crises se suivent, mais ne se ressemblent pas: crise environnementale, crise du logement, "crise" de la "fête des Parents", etc. Bon, j'avoue, cette dernière crise citée n'en est pas une vraie. Bien que le sujet ait été traité par de multiples médias et sur d'innombrables tribunes et que le ministre de l'Éducation lui-même ait cru bon d'y aller de formules péremptoires1, qualifier de crise cet énième épisode de choc des valeurs n'avait pour but que de servir d'introduction à un billet de blogue qui ne traitera pas vraiment de la fête des Pères ou de celle des Parents. D'ailleurs, si vous me posez la question et bien que je sois père de trois enfants, j'étais en faveur d'une fête des Parents. Bref, je diverge, je diverge.
Qui, in fine, détermine si nous sommes en crise ou si nous sommes en sortie de crise? Tout d'abord, définissons ce que veut dire le mot crise. En regardant la définition qu'en donne Larousse2, on peut voir à quel point ce mot est polysémique. En plus des différents sens possibles du terme, notre point de vue, notre vécu de la situation, influencera grandement notre perception des événements. Si on ne cherche pas un logement actuellement, on peut encore penser que de trouver un logement à 500$ à Montréal est possible3. Ou si on parle avec notre voisin complotiste, on peut se faire dire que les crises ne sont pas là où on pense. Au bout du compte, individuellement, nous sommes mal placés pour évaluer pleinement l'ampleur d'une situation et déterminer si nous sommes en crise ou pas.
Dès lors, pour avoir un point de vue plus global d'une situation, faut faire ses recherches, comme dirait un complotiste... ou un scientifique! Le lieu à privilégier pour cela serait la bibliothèque qui regorge d'informations, de recherches, d'essais, de revues scientifiques, etc. Toutefois, en cette ère de ChatGPT où la rapidité de la réponse semble plus importante que sa véracité4, on préfère s'en remettre à notre ami Google ou ChatGPT plutôt que de se rendre physiquement ou virtuellement dans notre bibliothèque (oui oui, les bibliothèques ont des prêts numériques5). D'ailleurs, il y a un réel problème d'accès à la culture et aux livres dans les municipalités rurales, mais c'est un problème qui semble loin dans la liste de priorités de nos élus et concitoyens.
Sommes-nous condamnés de ce fait à vivre des crises ad vitam æternam, où les crises se multiplient et où les sorties de crise ne sont en réalité qu'un remplacement d'une crise par une autre sur la place publique? À voir les décevantes réponses gouvernementales à la crise environnementale ou à la crise du logement et le faible intérêt de la population pour ces enjeux en-dehors de quelques moments dans l'année, on peut se permettre d'être pessimiste et se dire que le calendrier des fêtes et événements (Jour de la Terre, "Jour du déménagement", etc.) devient peu à peu un calendrier des crises: on parle de crise environnementale le Jour de la Terre, de crise du logement en juin-juillet, etc. À quand un calendrier de sortie de crise(s)?
2 https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/crise/20526