Un conflit qui meurt
Eliane Vincent
Il n’y a pas si longtemps, j’ai été témoin de quelque chose de magnifique. J’ai vu naître un conflit, je l’ai vu grandir et exploser, mais surtout, je l’ai vu mourir.
Comme tous les conflits, celui-là a mis quelques semaines à mûrir. Il y a eu le choc, le ressac, l’accumulation, le point de non-retour... Et par un bel avant-midi de pastoutàfait l’hiver, il y a eu des mots durs. Quand les coqs s’ergotent, les plumes volent, et les vérités ne se gênent pas. Ça met du piquant dans l’air ambiant! Moi, je faisais bien attention de rester sur ma clôture, parce que je n’avais pas grand-chose à voir là-dedans dans l’immédiat; je regardais, j’écoutais, et j’attendais de voir où tout ça nous mènerait.
À un moment donné, un ange est passé. Je dis un ange parce que Noël s’en vient, mais en fait, c’était un plutôt un genre de pompier, un humain doué pour éteindre les feux. Il a lancé quelques seaux d’eau judicieux sur les braises, et la vapeur a détendu les esprits fiévreux.
Les deux coqs n’étaient pas des deux de pique. Plutôt que de se braquer, de s’engluer, de s’enfoncer dans leur bon droit outré, chacun a viré sa chaise de bord pour regarder la situation un peu de côté, histoire de mieux voir les angles morts dans la lumière du matin.
Je n’en perdais pas une miette. En ces temps troublés où on s’enfarge dans le moindre tweet, et où les petits riens se transforment en guerres de clochers pour un oui ou pour un non, là, au bord du fleuve dans le plus beau pays du monde, le nœud s’est défait devant mes yeux. C’était beau comme l’éclosion d’un papillon, comme la fin d’un orage quand le soleil se force un chemin dans le chaos. L’image de l’arc-en-ciel est vraiment surannée, mais il y avait de ça...
J’ai vu un conflit s’éteindre sous une douche d’intelligence partagée, de bonne volonté assumée, de souplesse acceptée et d’écoute généreuse. Ce n’est pas si fréquent, et ça tombait à pic pour mon blogue de Noël!
Les humains de bonne volonté
À quelques jours de la messe de minuit , il est d’usage de s’échanger des vœux. Les miens seront simples : pour tout le temps qui nous attend de pied ferme avant la fin des temps, je nous souhaite des conflits qui meurent, des nœuds qui se défont, des portes qui s’ouvrent, des mains qui se tendent. Je nous souhaite des points de vue qui changent, des regards attendris, des méfiances qui s’éteignent.
Je nous souhaite d’être vulnérablement forts, furieusement généreux, doucement exigeants, volontairement réfléchis.
Parce qu’un conflit qui meurt, c’est l’humanité qui revit.
Allez, joyeux Noël!
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