La bataille des deux loups

Lorsque que j’étais animateur de vie spirituelle et d’engagement communautaire, j’aimais bien me servir d’histoires afin d’amener les élèves à réfléchir sur le sens qu’ils donnaient à leur vie ainsi que sur la façon dont ils voyaient leur engagement dans la société.

Parmi les histoires que j’aimais bien, il y avait celle de la bataille entre nos deux loups intérieurs. Elle serait inspirée de la sagesse autochtone de la nation Cherokee.

« Un soir, un vieil indien Cherokee raconte à son petit-fils l’histoire de la bataille intérieure qui existe chez les gens et lui dit :

Mon fils, il y a une bataille entre deux loups à l’intérieur de nous tous.

L’un est le Mal : c’est la colère, l’envie, la jalousie, la tristesse, le regret, l’avidité, l’arrogance, la honte, le rejet, l’infériorité, le mensonge, la fierté, la supériorité et l’égo.

L’autre est le Bien : c’est la joie, la paix, l’amour, l’espoir, la sérénité, l’humilité, la gentillesse, la bienveillance, l’empathie, la générosité, la vérité, la compassion et la foi. »

Le petit fils songea à cette histoire pendant un instant et demanda à son grand-père :

Lequel des deux loups gagne ?

Le vieux Cherokee répondit simplement :  Celui que tu nourris. » (1)

Cette histoire illustre bien les situations où nous nous sentons partagés entre deux sentiments opposés, où nous sommes déchirés entre deux comportements à adopter. Elle nous amène également à percevoir que nous avons du pouvoir sur nos sentiments comme sur nos actes et nos comportements. Dans cette bataille intérieure, nous avons le pouvoir de décider quel chemin nous allons favoriser.

Force est de constater qu’à l`ère des réseaux sociaux, nous devons aussi choisir avec beaucoup de discernement la nourriture de notre esprit et de notre cœur. Le fleuve de l’internet transporte avec lui indistinctement le meilleur et le pire. Ce qui faisait dire à Umberto Eco : « « Les réseaux sociaux ont donné le droit de parole à des légions d'imbéciles qui avant ne parlaient qu'au bar et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd'hui, ils ont le même droit de parole qu'un prix Nobel » (2). Je ne serais pas aussi sévère que ce dernier. Les réseaux sociaux ont également permis à des milliers de personnes de s’exprimer alors qu’avant ils avaient très peu accès à la parole publique. Et les conneries qu’on y retrouve ne sont pas le fait uniquement d’imbéciles accottés au comptoir du bar du coin. La propagande haineuse, les injures, les fausses nouvelles et la désinformation proviennent également de personnes intelligentes et parfois même très cultivées et instruites.

La récente décision de Mark Zuckerberg de ne plus procéder à la vérification des faits sur Facebook me laisse plus que perplexe, surtout que le prétexte invoqué est la liberté d’expression. Bien sûr, la liberté d’expression va de pair avec la liberté d’opinion et elle est essentielle dans une société démocratique. Mais comme le soulignait le sénateur américain Daniel Patrick Moynihan : « Chacun a le droit à sa propre opinion, mais pas à ses propres faits. » (3)

Ceci est mon dernier billet pour le Blogue citoyen du Bas-du-Fleuve. Mon état de santé fait en sorte que je doive un peu réduire mes activités. Je remercie les responsables de m’avoir donné cette opportunité d’écrire et d’être lu durant plusieurs années.  

1. https://positivr.fr/legende-amerindienne-deux-loups-philosophie/
2. https://citations.ouest-france.fr/citation-umberto-eco/reseaux-sociaux-donne-droit-parole-125389.html
3. https://www.lapresse.ca/pour-une-presse-forte/201901/25/01-5212438-metier-chroniqueur.php