Mon journalisme
François Drouin
Chaque année, l'enseignant au programme Arts, lettres et communication du Cégep de Rivière-du-Loup, Benoît Dumais, m’invite à venir présenter Info Dimanche et surtout parler du métier de journaliste, de mon cheminement atypique aussi.
Pour l'occasion, j’étais accompagné de mon collègue Patrice Picard, conseiller média et coordonnateur en projets spéciaux qui a capté cette "ma-gni-fi-que" photo de votre humble serviteur. À ma droite, debout, on reconnait le prof.
Comme c’est le cas depuis de nombreuses années, les étudiants de Benoît participent à l’Écriteau, un cahier spécial rédigé par ces derniers et publié dans votre journal. Cette rencontre est donc l'occasion idéale pour rencontrer un journaliste de la presse écrite et pour en connaître un peu plus sur son quotidien.
L’an dernier, j’ai atterri dans la salle de classe de Benoît une semaine après la tragédie de L’Isle-Verte. La rencontre, très humaine, s’était déroulée sous le signe de l’émotion. Nous avions beaucoup parlé du respect, celui pour son sujet, celui pour son métier et celui très important de ses lecteurs.
En journalisme, le respect - comme l’honnêteté - est une voie plus longue. Certains optent donc pour une trajectoire plus rapide. Pourquoi s’enfarger dans les fleurs du tapis avec l’éthique et le moral, quand après tout, c'est légal?
La légalité ne demande qu'une simple vérification, c’est un processus rapide. Mais l’éthique et la moralité demandent de faire travailler sa matière grise. Bien souvent, sur le beat cette réflexion représente un luxe qu’on ne se permet pas suffisamment. Le philosophe allemand Emmanuel Kant s’est penché sur la question, notamment dans « Critique de la raison pratique », une lecture ardue, difficile, mais néanmoins très intéressante qui démontre la complexité de l'analyse et du raisonnement. Rassurez-vous, je ne leur ai pas parlé de philosophie allemande.
Toutefois, j'ai quitté la classe avec un regret, ce qui explique la raison de ce billet. L’omission d’une chose, un tout petit détail pourtant capital dans ce métier. Il faut savoir s’oublier, s’effacer, faire preuve d'humilité. Une qualité importante en journalisme et qui se perd.
Le journaliste ne doit pas se mettre à l'avant-scène, il n'est pas le reportage, il ne doit pas faire ombrage au sujet. Il faut savoir faire abstraction de ses préjugés, de ses envies, de ses propres attentes, de ses peurs, de ses craintes. Le journaliste ne doit pas être plus gros que son reportage, comme le but de son reportage ne doit pas être un prétexte à sa petite glorification personnelle. Il faut se mettre au service de ses lecteurs, de son auditoire, leur parler à eux, pour eux et non de nous.
Sans EUX, le journaliste est l’incarnation de l’inutile. Et si la passion et la détermination sont au rendez-vous, c’est la fondation d’une carrière qui s’annonce des plus enrichissantes.
Il n’y a pas de petites histoires, il n’y a que des petits journalistes.
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