Mes 28 jours sans alcool
François Drouin
En février dernier, j'ai relevé avec succès le défi 28 jours sans alcool.
Je ne me suis jamais considéré comme un «gros buveur». Je dépasse très rarement les 15 consommations hebdomadaires de Santé Canada, mais j'ai senti que j'en avais besoin.
J'ai amorcé mon défi dès la dernière semaine de janvier. Un 28 jours de 32 jours.
Donc je suis «un buveur moyen». Rarement en semaine, mais en même temps, jamais une fin de semaine sans. Sans un ou deux bons vins, sans une Fun Noir d'Aux Fous Brassant le vendredi, jamais sans une ou deux Guiness ou bières de micro le samedi et le dimanche.
J'en suis venu à croire que je ne pouvais plus me passer d'un verre d'alcool le weekend. Tsé, quand l'idée d'un samedi sans vin te préoccupe...
J’ai donc cherché l’origine. D'où vient ce besoin «essentiel» de prendre un verre le vendredi ? Je n’ai pas eu à remonter bien loin. Ça a commencé après la tragédie de L'Isle-Verte. Faire taire les cris. M'engourdir pour ne plus sursauter au moindre son, retrouver un bout de patience que je n’avais plus. Je me disais que ce n'était pas de me geler émotivement, non, mais après deux ou trois verres, j'avais la fausse impression de redevenir moi-même, de ne plus être poqué. En fait, c'est exactement ça se geler émotivement.
Avec le temps c'est devenu une habitude et de nouvelles raisons de prendre un verre inhibiteur ont remplacé celle du stress post-traumatique. Vous les connaissez celles-là. Une grosse semaine au bureau qui t'avale pour te recracher à bout de souffle le vendredi, la fin des rénos du sous-sol, les vacances, un après-midi au soleil, un feu de camp, mais souvent, juste le besoin de faire tomber la pression et lancer le weekend. Ça vous dit quelque chose ?
Mais un «vindredi» pas de vino ? F...ck off!
J'ai donc eu le sentiment que j'exerçais moins de contrôle sur ma consommation d'alcool et en bon français, ça m'a fait ch...
En janvier donc, je me suis dit que je devais me mettre à l'épreuve.
Mais j'ai eu la chienne, un p'tit peu. Peur parce que l'alcoolisme est présent dans ma famille. Je sais trop bien que cette maladie ne se résume pas seulement à boire 8 grosses Molson Ex par jour ou se rincer le gosier quotidiennement au De Kuyper. C'est infiniment plus complexe et pernicieux. Face à ces 28 jours, je me suis senti comme chez le médecin, quand t'es pas super à l'aise, le derrière dans une jaquette ouverte sur la banquette trop haute de son bureau, les pieds pendants en fixant le mur, appréhendant une mauvaise nouvelle. Et si j'échouais !?
Alors je me suis acheté du vin et de la bière sans alcool. Un peu comme tu empoignes une béquille quand tu doutes de ne pas tenir sur tes deux jambes. Chicken un peu le gars.
Le premier weekend, j'ai tout essayé. Natureo blanc, le rouge, la bière noire (coucou Super Bock), quel gout infect! J'ai rapidement renoncé à ces succédanés. Un weekend a passé, puis deux semaines et finalement un mois de 32 jours.
J'ai réussi. Assez facilement même, ce qui m'a rassuré. Les effets positifs ont été nombreux. J'ai redécouvert le plaisir de passer un vendredi soir sans m'engourdir. De vivre une semaine de «rush» sans me demander ce que j'allais boire plus tard le weekend pour décompresser.
Depuis, j'ai aussi redécouvert le plaisir de déguster un bon vin, pour le gout et non pour l’inhibition qu’il apporte, de savourer une bonne bière noire. Boire moins et boire mieux. Boire par choix et non pas par habitude ou dépendance. Comprendre que j'aime le gout d'un vin du Douro et non pas l'alcool qu'il contient. Apprécier les notes de caramel dans une «brown ale», de café et de chocolat dans une noire, etc. Et quand l'envie de m'enfiler un verre pour le plaisir de prendre un dernier verre me tiraille, je me tourne vers une IPA sans alcool (excellente!) de la microbrasserie Buckale.
L’an prochain je participerai à nouveau aux 28 jours sans alcool, parce que la mémoire est une faculté qui oublie. Parce que j'aime me remettre en question. Parce qu’une pause, ça fait du bien, tout simplement.
L'alcool est une drogue et sa consommation doit rester un choix et non une habitude. Parce qu'une habitude qui nous enchaine... c'est une dépendance.
7 commentaires
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@Sobre depuis 13 ans: Premièrement, bravo pour ces 13 ans. Si le vin avait été bon ? Il y en aurait dans mon cellier, tout comme j'ai quelques IPA Buckale et Heinneken 0 dans mon frigo. Est-ce que j'en aurais bu pendant le défi, malheureusement oui, comme une béquille. Si je trouvais un vin sans alcool agréable aujourd'hui, il pourrait très bien être sur la table ce weekend avec une paëlla. Tout à fait.
Car moi aussi j'ai cette crainte de ce fléau dans les familles proches..hérédité quand tu me guettes?
Qu'en sais-je?
Alors je fais souvent des pauses, pour conclure que je n'ai pas de problèmes, ma modération est mon ancrage.
Chapeau pour ce partagr Françous, moi c'est Claire...Haha!
Mais surtout une réflexion et une introspection courageuse
et nécessaire, inspirante également.
Merci Francois Drouin.